Le "NON" l'avait emporté par 98% des voix lors du premier référendum en 1987, puis par 56% des voix lors du deuxième, mais la situation a changé depuis et désormais, le "OUI" a toutes ses chances. En effet, aux Kanaks, autochtones du pays, majoritairement favorables à l'émancipation, sont venus s'ajouter progressivement des Caldoches (Békés calédoniens), des Tahitiens, des Wallisiens, des Vietnamiens, des Réunionnais ou encore des Antillais, populations immigrées, à des dates diverses, qui peu à peu se sont enracinées et qui ne vénèrent plus le drapeau bleu-blanc-rouge comme les premières générations.
C'est qu'il s'agit pour le FLNKS (Front National de Libération Kanak Socialiste) non pas de revenir au passé ou à l'avant-colonisation française, mais de bâtir une Nouvelle Nation Kanak qui accueillera tous ceux qui voudront s'atteler à sa construction, cela quelque soit leur "race". Jean-Marie TJIBAOU, leader emblématique du FLNKS, l'a payé de sa vie. Il proclamait ceci :
"Le retour à la tradition est un mythe. Aucun peuple ne l'a jamais vécu. La recherche d'identité, le modèle, pour moi, il est devant soi, jamais en arrière. C'est une reformulation permanente. L'identité, elle est devant nous".
Cependant si jamais le "NON" en venait à l'emporter une troisième fois, un quatrième et dernier référendum est prévu en 2022 ! C'est dire que la France sait organiser ce type de consultation laquelle n'a rien d'extraordinaire puisqu'on en a vu bon nombre à travers le monde depuis les années 60 du siècle dernier. Au lieu de s'engager bêtement dans d'interminables et meurtriers conflits (guerres d'Indochine, d'Algérie etc.), les élites politiques françaises ont fini par comprendre qu'il valait mieux s'en remettre au vote démocratique. Mais ne nous illusionnons pas pour autant ! La France a tout mis en œuvre depuis le début du nouveau millénaire pour renforcer sa présence en Kanaky jusqu'à finir par mettre les Kanaks en minorité dans leur propre pays. Ce que, par contre, elle n'avait pas prévu, c'est que les deuxième et troisième générations d'immigrés finiraient, pour certains, par embrasser la cause kanak. Par se sentir calédonien et non plus français.
Elle n'avait pas du tout prévu qu'un sentiment néo-Kanak finirait par naître. Les chiffres le montrent sans discussion possible : 98% de "NON" en 1987, 56% de "NON" en 2018. Il suffit donc, ce dimanche 4 octobre que ce "NON" tombe à 49%.
Reste à espérer toutefois que ce troisième référendum se déroulera sans heurts et surtout sans tricheries et qu'enfin, la Kanaky pourra se séparer de son colonisateur dans la tranquillité, dans l'amitié même. Sans haine ni racisme à rebours. Le jour venu, elle siégera à l'ONU à côté de cet ancien colonisateur comme aux côtés de tous les pays libres du monde.
En tout cas, nous, Martiniquais, plongés depuis quelque temps dans une hystérisation scénarisée de l'indignation complètement ridicule (mais qui n'est que la conséquence directe du békéisme, cet aveuglement raciste tri-séculaire), aurons beaucoup de leçons à tirer de ce référendum. Ou alors du quatrième, en 2022. Car un terrible danger guette la Kanaky : ce qu'Edouard GLISSANT a appelé "le processus d'hawaïsation" c'est-à-dire sa transformation en Hawaï, îles du Pacifique comme la Kanaky (et lieu de naissance de Barack OBAMA soit di en passant). En effet, à Hawaï, territoire américain, le peuple autochtone a fini par être définitivement marginalisé et la bannière étoilée y flotte définitivement...
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