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Après l’esclavage la Martinique a eu une histoire.

Yves-Léopold MONTHIEUX
Après l’esclavage la Martinique a eu une histoire.

La méconnaissance de l’histoire martiniquaise ne s’était pas limitée à la seule période de la colonisation et de l’esclavage. En effet, depuis les années 1950, avec le retour progressif puis en masse des intellectuels revenus de leurs études, ainsi qu’à la « découverte » du 22 mai 1848, la connaissance de l’histoire de l’esclavage a fait un véritable bond.  Sous le magistère d’anciens tels qu’Armand Nicolas, Léo Elisabeth, Edouard Delépine, s’est développée une génération de professeurs d’histoire, tous formés à l’étude de l’esclavage. Le plus connu d’entre eux, l’historien Gilbert Pago, a produit plusieurs ouvrages et n’a pas cessé d’intervenir depuis 50 ans dans les écoles, sur les radios et télévisions, et au cours de conférences diverses. Lui et les autres historiens cités plus haut, en particulier Edouard Delépine[1], l’historien et homme politique, ont tous publié le fruit de leurs recherches sur l’esclavage dans des ouvrages, thèses et articles, et participé à des colloques en Martinique et ailleurs. De leurs propres aveux, ces travaux n’ont pas eu le succès escompté auprès de la jeunesse.

En conséquence, si on peut comprendre que les jeunes qui ont raté leur scolarité n’aient pas pu être suffisamment avertis de l’histoire de l’esclavage, aucun diplômé âgé de moins de 60 ans ne peut imputer décemment leur ignorance de cette période au fait qu’elle leur aurait été cachée.

Au contraire, il convient de reconnaître que les élèves et étudiants martiniquais ont bien moins appris de l’histoire des années de guerre et d’après-guerre mondiale où le sort de la Martinique avait failli basculer. Curieusement personne ne s’en plaint. Ce n’eut été la cinéaste Euzhan Palcy et certains des survivants eux-mêmes, l’épisode de la dissidence serait demeuré inconnu. Par ailleurs, il n’est venu à l’idée d’aucun historien ou journaliste de demander au député Césaire pourquoi, lui l’anti-assimilationniste reconnu, il a justifié la demande de la départementalisation en utilisant plus de 20 fois dans son texte de rapporteur du projet de loi le mot « assimilation ». Sans doute aurait-il répondu que les colonies antillaises avaient été en danger, et qu’au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la Martinique et la Guadeloupe auraient pu se retrouver dans le giron des USA. Le célèbre martiniquais n’a-t-il pas succombé, en effet, à l’invitation pressante de son parti, le Parti communiste français, et du Général de Gaulle, afin de mettre fin au vœu des américains. Ces derniers n’avaient pas fait mystère de leur dessein de s’offrir ces colonies en paiement de l’aide militaire apportée à la France. Pour preuve la présence de la marine américaine dans la mer des Caraïbes et plus particulièrement à Fort-de-France, où des croiseurs avaient investi la rade. Au summum de la tension, par crainte d’un bombardement de la ville, celle-ci avait été vidée de sa population pendant 24 heures. De ces évènements, il bien sorti deux ou trois noms qui auraient mérité d’être connus des jeunes martiniquais. Qu’en savent-ils ? Qu’en ont-ils appris de leurs professeurs ?

Il ne leur a pas davantage été enseigné que durant les années 1960 – 1970, où avait été mis en œuvre une réforme foncière, des milliers d’hectares de la terre martiniquaise sont passés des mains des Békés à ceux des non-Békés et que cette mutation est à l’origine du mitage que l’on observe aujourd’hui de la campagne martiniquaise.

Bref, dans la recherche de son équilibre identitaire, comment croire que la jeunesse martiniquaise puisse avoir une pleine connaissance de son histoire, en faisant abstraction d’épisodes historiques qui ont profondément transformé la Martinique et la situation des Martiniquais ?

Fort-de-France, le 22 juin 2020.

Yves-Léopold Monthieux

 


[1] Edouard Delépine – Dix semaines qui ébranlèrent la Martinique – 2 mars – 4 juin 1848.

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