Malgré ses propos racistes, le président Jair Bolsonaro séduit des figures afro-brésiliennes. Elles incarnent la division d’une communauté face à la personnalité du chef de l’État.
Au Brésil, on le surnomme « l’ombre de Bolsonaro ». Il est toujours juste derrière lui, durant ses allocutions publiques les plus importantes. Il l’accompagne dans les stades ou dans l’avion présidentiel, sérieux en costume cravate, pour rencontrer les grands de ce monde : Xi Jinping, Mohammed Ben Salman ou même Donald Trump, croisé au G20 d’Osaka. « Il valait mieux que j’amène Hélio ou Obama ? », avait alors plaisanté Bolsonaro auprès de son homologue américain. Car oui, comme l’ancien président démocrate, Hélio Lopes est noir.
Et le moins qu’on puisse dire c’est que la présence de ce colosse souriant détonne, au côté d’un Bolsonaro réputé pour ses saillies racistes. En 2017, ce dernier déclarait par exemple à propos de descendants d’esclaves : « Ils n’en foutent pas une ! Je pense qu’ils ne sont même plus bons à procréer. » Et pourtant, Hélio est fou de « son » Jair.
« Jair vient chez moi et je fréquente sa maison. Il m’appelle “Hélio Negão” [“gros nègre”], je l’appelle “mon ami”. C’est très spontané ! » Hélio Lopes
En septembre 2018, il fut l’un des rares autorisés au chevet du futur président, poignardé en pleine rue lors d’un meeting électoral. « On est amis depuis vingt-deux ans, avait déclaré Lopes. Il vient chez moi et je fréquente sa maison. Il m’appelle “Hélio Negão” [“gros nègre”], je l’appelle “mon ami”. C’est très spontané ! »
Dans un Brésil aux plaies mal refermées, dernier pays des Amériques à avoir aboli l’esclavage, en 1888, ce compagnonnage intrigue ou écœure. Hélio Lopes, 50 ans, député de Rio de Janeiro, est d’ailleurs affublé d’un tas de surnoms peu flatteurs : « Perroquet du pirate », « Proctologue de Bolsonaro », et même « Capitão do mato », en référence aux hommes autrefois chargés de pourchasser les Noirs fugitifs. Et pourtant, il est loin d’être une exception. Minoritaires mais très actifs sur les réseaux sociaux, les « afro-bolsonaristes » donnent aujourd’hui de la voix.