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BOKANTAJ DE KOUT-TJOK A L'ANCIEN RESERVOIR

BOKANTAJ DE KOUT-TJOK A L'ANCIEN RESERVOIR

   Yéé-krik !
   D'abord-et-pour-un, une petite traduction pour nos chers lecteurs francophones ou devenus bien trop assimilés pour saisir les nuances et subtilités de notre dialecte local bienaimé (tu parles !) : "bokantaj" signifie "échange" et "kout-jok" peut signifier "direct du gauche". Bon, pour l'Ancien Réservoir, prière de vous rapprocher d'une personne fort âgée dans l'un des EHPAD de la bonne ville de Foyal qui vous indiquera où ça se trouve. En fait, se trouvait du temps où c'était encore un réservoir d'eau potable. Aujourd'hui, y'a plus d'eau et fort heureusement car elle n'aurait point été potable du tout au vu de la faune qui fréquente l'endroit.

   Donc à l'Ancien Réservoir, l'autre soir, au lendemain de terribles élections et d'une défaite non moins terrible sous forme de fessée et de raclée, de "lévé-fésé" pour les adeptes de notre "ladja" national, se tint le conclave des vaincus parmi lesquels il y avait désormais beaucoup de cons vaincus et très peu de convaincus. Il s'agissait de faire le bilan du désastreux désastre et de savoir qui continuerait à cheminer, tête basse forcément, dans les travées de l'ancien-nouveau hémicycle et qui y siégerait tête haute face (de préférence) face à l'ennemi vainqueur. 

   L'une des participantes à la scandinave chevelure monta sur ses grands drakkars, enfin ses grands chevaux, pour déclarer haut et fort qu'il ne fallait plus que certaines personnes quoiqu'élues continuent à siéger sinon ce serait la mort de la tribu à moyen, voire court terme. En effet, ces indésirables, par leur comportement irrespectueux, délictueux, mafieux et bilieux avaient précipité la chute du Grand Chauve au fin fond des urnes. Analyse que n'appréciât point, aux dires des personnes présentes, Fourmi rouge, accorte et dodue créature qui déchaîne habituellement les fantasmes de la gent masculine insulaire, laquelle exigea derechef de la Viking qu'elle prononçât les noms des futures persona non grata. Boudoum !
   "Toi par exemple !" déclara la Viking sans se démonter.
   "Sa ka rivé'w la-a ?" se mit soudain à beugler Face de Rat, prenant la défense de Fourmi rouge, la bave aux lèvres et les yeux injectés de sang comme les "majors" du temps jadis du côté du Pont de l'Abattoir.
   "Je vous ai déjà dit de ne pas vous adresser à moi comme ça, monsieur !" rétorqua la Viking toujours sans se démonter ni mollir d'une maille.
   Yéé Mistikrik !
   Yéé-Mistikrak !
   D'abord, estomaquée, estébécouée, estourbie et estintchée devant pareil offense à sa rondouillarde personne, Fourmi rouge se ressaisit et balança un kout-jok à la Viking qui valdingua dans les bras d'un participant éberlué et emberluqué. Mais le sang nègre remonta à la surface (du moins ce qu'il en restait au bout de trois siècles de métissage et de troussage) et la Viking, comme habitée par les dieux Thor de Norvège et Papa-Legba du Dahomey, se rua sur son agresseur et lui flanqua un modèle de palaviré qu'on l'entendit jusque sur la Place ordinairement paisible des Terres-Sainville où, à l'heure vespérale, les immigrés venus de l'île de Toussaint-Louverture jouent à la borlette, une sorte de loterie mystérieuse, incompréhensible en tout cas pour les natals de l'île d'Aimé Césaire.
   Manman ! Goumen atè, manmay ! Ladjè madanm ! Woy Papa !
   Jusque-là le Grand Chauve s'était tenu coi quoiqu'il eut envie de croire qu'il s'agissait d'un couac tout en se disant qu'on ne lui raconterait plus de craques. Face de Rat continuait, pour sa part, à volubiler, véhémenter, cracher, menacer, toujours prêt à acheter un combat alors qu'il approchait à grands pas, pauv' diab', de la septuagénaire sagesse. Les participants, eux, médusés, ne bougèrent point, mais déjà les médisants parmi eux battaient déjà de la langue, ayant hâte d'aller déblatérer hors de l'Ancien Réservoir les mille et un détails de cette homérique, gynécologique et tragi-comique bagarre.
   C'est alors que Boudouf ! Le Grand Chauve chuta une deuxième fois. Non pas au fin fond des urnes comme la première, mais sur le carrelage de l'Ancien Réservoir. C'en était trop pour lui ! Aussitôt l'assistance se mit à crier, à appeler au secours. On se mit à éventer l'évanoui, à lui passer de l'alcool camphré sur les tempes, à lui réciter le Notre Père-qui-êtes-aux-cieux et le Notre Césaire-qui-êtes-à-La Joyau. Quelqu'une proposa même de lui faire un bouche à bouche lorsqu'il émergea peu à peu des limbes, ouvrit un œil, puis deux, et referma les deux quand il découvrit les mines faussement éplorées de Fourmi rouge et Face de rat. Entre temps, un participant, qui avait conservé tous ses esprits, ayant fait appel au SAMU, nostre homme fut embarqué et conduit dare-dare à l'hôpital.
   Sé pri fen !

 

Commentaires

izaninon | 23/12/2015 - 07:54 :
C'est le début du commencement des règlements de compte en interne pour le PPM ; ces flots de violences et de frustrations personnelles permettront, je l'espère, aux uns et autres d'avoir le courage de se regarder dans un vrai miroir, sans maquillages... Il ne s'agit pas de se croire investi corps et âme de Césaire et de se dire " je suis le fils spirituel doté de tous ses pouvoirs" ( que ce dernier repose en paix) pour imposer à son parti de telles flagellations . C'est fini. La population et les Martiniquais n'acceptent plus cela. A bon entendeur salut. Pour finir chaque médaille à son revers. Par conséquent et il ne faut surtout pas jouer à pile ou face

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