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Collectivités d’Outre-mer : Injuste et violente attaque de la Cour des comptes

Collectivités d’Outre-mer : Injuste et violente attaque de la Cour des comptes

Beaucoup de nos concitoyens ne savent pas ce que c’est que la « Cour des Comptes ». Pourtant ils devraient s’en inquiéter.

Car beaucoup de prétendues réformes appliquées par les gouvernements de droite et socialistes et visant à instaurer l’austérité en matière sociale, économique et budgétaire ont été concoctées par cette Institution chargée en principe de veiller à la régularité des comptes publics. Cependant depuis dix ans elle dépasse régulièrement les limites de ses prérogatives financières pour imposer des potions néo-libérales en matière politiqué.

Or le 11 octobre dernier ce vénérable aéropage a publié un véritable brûlot contre les collectivités d’outre-mer.

Comme un air de « danseuses de la France »

 

Le quotidien « France-Antilles a traduit le contenu de ce rapport par un titre choc le 13 octobre : «  La Cour des comptes attribue un zéro en gestion à nos collectivités ». La grande presse économique de France (« Les Echos, « Challenge », « Capital », etc)  reprend la même accusation : Si la situation financière de nos communes, communautés de communes, départements, régions et collectivités uniques se dégrade de plus en plus, c’est par « défaut de gestion » et à cause de charges de personnel trop importantes du fait d’effectifs pléthoriques et de l’application « injustifiée » de ladite « sur-rémunération » de 40 %. Mauvaise gestion des élus : Point. De quoi alimenter le préjugé des « danseuses de la France » qui sont un fardeau pour les Français… Une « violence inédite à l’égard des élus d’outre-mer  » de la Cour dénoncée par le sénateur guyanais Georges Patient (En Marche) dans une interpellation de la ministre des outre-mer Annick Girardin le 17/10/2017. « Pourquoi une telle charge, a demandé le sénateur, alors que les collectivités d’outre-mer sont dans une impasse budgétaire structurelle ? ».

 

Les deux tiers des 136 collectivités des quatre DOM « connaissent une situation financière fragile, dégradée ou critique », reconnaissent cependant les juges financiers. Elle s’est dégradée depuis le dernier diagnostic de 2011 alors que-dixit la même Cour des comptes - cette situation se serait améliorée en France dite hexagonale. Il ne s’agit donc pas d’une dérive de quelques maires imprudents ayant pratiqué des recrutements électoralistes ou clientélistes, même s’il en existe hélas.

Le décor est planté.

Situation « difficile » ou mal-développement de type néo-colonial ?

 

La Cour des comptes admet par euphémisme que les pays d’outre-mer sont affectés par « une situation socio-économique difficile » : démographie en sévère régression en Guadeloupe et en Martinique et en expansion en Réunion et Guyane, taux de chômage de plus du double de celui de l’aut’bô,  richesse par habitant (PIB) nettement plus faible qu’en France, poids deux fois plus élevé des dépenses sociales dans les budgets, etc. En réalité ce n’est pas seulement une situation « difficile ». Par dogmatisme idéologique, la Cour feint d’ignorer le sous et mal-développement de ces pays et qui explique fondamentalement l’insuffisance de ressources fiscales des collectivités et leur obligation de jouer l’amortisseur social tout en promouvant le développement. En réalité une situation de type néo-colonial.

Les citoyens des DOM paient fortement pour leurs collectivités 1 milliards 500 millions d’euros

 

Dans ce contexte, nos experts croient pouvoir affirmer que nos collectivités bénéficient de ressources plus importantes que celles des collectivités de la France française grâce à l’octroi de mer (1 milliards d’euros) et  à la taxe spéciale sur les carburants (473 millions d’euros). Près d’un milliard et 500 millions d’euros. En réalité, ce sont les contribuables de nos pays qui paient ces impôts spécifiques pour tenter de donner des ressources à leurs collectivités et cela exonère d’autant l’Etat français de ses obligations financières. Ce qui pèse sur le pouvoir d’achat des consommateurs sans être pour autant le facteur principal de la « vie chère »..

Dom 2013/2016 : Amputation de 160 millions de dotations de l’Etat

 

Cela n’a pas empêché le gouvernement Hollande-Valls de leur appliquer ce qui est délicieusement désigné comme « la contribution au redressement des finances publiques » pour diminuer le déficit et la dette de l’Etat français soumis aux injonctions péremptoires de l’Europe. En fait la diminution des dotations de l’Etat aux collectivités. Une diminution approuvée par les parlementaires PPM et EPNM.

Pour la première fois néanmoins, on dispose d’un chiffre global. De 2013 à 2016 les collectivités des DOM ont perdu 159,9 millions d’euros de dotation générale de fonctionnement (DGF), soit moins 11,5 % (page 174 du rapport).  La Martinique, quant à elle,  a perdu 39,1 millions d’euros de DGF, soit un recul de 12,25 % (Guadeloupe : moins 27,7 millions d’euros et moins 9,76 %).

Le résultat c’est que, les recettes diminuant, l’épargne des collectivités (différence entre recettes et dépenses de fonctionnement) est s’amenuise encore pour devenir faible, voire négative. De la sorte leurs possibilités d’emprunter se réduisent et deviennent souvent inexistantes.

Description d’un champ de ruines

 

En Martinique 27 communes sur 34 n’ont aucune capacité de financer leurs investissements après remboursement de leurs emprunts (p 185 du rapport). Et 19 communes de Martinique ont des « délais de paiement structurellement supérieurs à 100 jours en 2016 », dont 146 jours pour Fort-de-France. Un désastre pour les entreprises fournisseurs et une cause de renchérissement des offres de marchés publics au détriment des collectivités. La Cacem (Communauté des communes du Centre de la Martinique), gérée un temps par Serge Letchimy puis Pierre Samot, est en « déficit structurel depuis fin 2015 » (p. 187 du rapport). Certaines collectivités importantes sont particulièrement endettées : ainsi la moitié de la dette des communes de Martinique a été contractée par Fort-de-France ! Comment s’étonner que la Martinique soit « à l’arrêt », comme le répètent certains pompiers pyromanes (p 195 rapport Cour des comptes) ?

La situation des collectivités uniques de Guyane et Martinique est jugée soit « critique » pour la première, soit « fragile » pour la seconde et toutes deux  en butte à de « graves difficultés financières » (page 212 du rapport).

Voilà le champ de ruines décrit par la Cour des comptes.

Quand le politologue Justin Daniel pratique la politique de l’autruche

 

Le politologue Justin Daniel peut toujours, du haut de l’Olympe sa science politique, juger que le budget de la CTM « n’est porté par aucun souffle, par aucune ambition » (FA du 23/10/2017). En dehors du fait que manifestement il ne l’a pas lu ou est de mauvaise foi, il fait la politique de l’autruche et feint d’ignorer le poids énorme du fardeau financier laissé par les anciennes mandatures de l‘ex-Région et l’ex-Département dont on sait qu’il est trèe proche. Par exemple, la CTM a du en 2016 payer 256 millions d’euros de dettes d’avant 2016 sur un budget total de 1 100 millions d’euros et remontant parfois jusqu’à 2010. Et cela continue en 2017… Quel « souffle » peut-on avoir quand on vous a asphyxié ? Quant à l’ambition, c’est se payer de mots de paroles verbales.

La Cour des comptes émet des préconisations pour le redressement.

Certes des efforts de rigueur de gestion contre les cas de gabegie et- de gaspillage sont parfaitement justifiés. Mais l’essentiel des prescriptions des docteurs Diafoirus de la Cour (« la saignée, vous dis-je, la saignée ») porte sur de nouvelles restrictions budgétaires, notamment la baisse des effectifs des collectivités et la suppression du complément de traitement de 40 %.

Comme pour les contrats aidés, c’est aller vers l’explosion sociale assurée. 

Alors que faire ?

Oui  il faut prendre nous-mêmes les problèmes à-bras-le-corps et faire face avec lucidité et courage. C’est ce que la majorité de la CTM s’efforce de réaliser.

Mais nous devons aussi exiger que l’Etat français prenne ses responsabilités, toutes ses responsabilités.

C’est ce qu’on fait les Guyanais au lieu de se déchirer. Ils ont obtenu une promesse de plus d’un milliard d’euros (pour laquelle ils devront se battre pour que son octroi soit effectif).

A nous, Martiniquais(es), de prendre les nôtres.

                                                                            Michel Branchi (24/10/2017)

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