Cette rubrique vise à participer à l'indispensable mouvement de recréolisation qui seul permettra à la langue créole de se sortir de la spirale mortifère dans laquelle est se trouve happée depuis une bonne trentaine d'années déjà. Il ne s'agit aucunement, dans un premier temps, d'intervenir sur l'oral, sur la manière de parler des créolophones, mais de construire une langue écrite créole laquelle, par la suite, rejaillira sur l'oral. Toutes les langues écrites sont construites c'est-à-dire artificielles pour la bonne et simple raison que l'écriture est un "artefact", une pure création de l'esprit humain. A l'inverse, la parole est naturelle, innée, non créée par l'intervention humaine.
C'est dire que la langue écrite ne peut en aucune façon est une simple reproduction, une sorte de photocopie de la langue orale, ne serait-ce que parce que l'une et l'autre obéissent à des logiques très différentes : la logique de l'oral repose de la communication in praesentia, immédiate ou directe (même si la personne est au bout du fil à des milliers de kilomètres) alors que la logique de l'écrit repose sur la communication in absentia, non-immédiate, différée (un message écrit est rarement lu immédiatement après avoir été écrit et nous lisons des livres d'auteurs morts depuis des centaines d'années).
Dans la communication orale et donc immédiate, le message émis par l'un ou l'autre des interlocuteurs peut être désambigüisé sur simple demande de l'un d'entre eux alors qu'aucun lecteur ne peut demander à Platon ou à Glissant ce qu'il a voulu écrire dans tel passage de tel de leurs livres. Cela signifie que la langue écrite doit se doter d'outils permettant de clarifier, de désambiguïser son message, puisque celui qui écrit un texte ne sera pas là pour aider le lecteur lorsque ce dernier prendra connaissance dudit texte.
C'est le principal défi auquel eest confronté une langue jeune et encore profondément ancrée dans l'oralité comme c'est le cas du créole. Nous y reviendrons...
Pour l'heure, venons-en au MOT/EXPRESSION CREOLE DU JOUR :
FRANCAIS : TOMBER DE CHARYBDE EN SCYLLA //// CREOLE : Sòti an sann pou tonbé an difé.