Le grand public connait le terme "délocaliser" quand il s'agit du domaine économique, mais il est assez peu familier de sa signification judiciaire.
Pourtant, en Martinique, la délocalisation judiciaire est devenue depuis des lustres une sorte de spécialité de la justice-sous-les-cocotiers. Très concrètement : quand une affaire gêne, quand elle risque de mettre trop de gens bien placés en cause, on la transfère, la "délocalise" au Tribunal de Paris. Une fois arrivée sur les bords de la Seine, ladite affaire s'y noie corps et biens. Entre temps, ici, en Martinique, on finit par l'oublier et tout rentre dans l'ordre ou plutôt les délinquants en col blanc peuvent enfin respirer et continuer leurs magouilles.
Car bien évidemment, on ne délocalise que les affaires concernant des cols blancs. Pour les autres : direction Ducos. C'est ainsi que fut délocalisée l'Affaire du CREDIT MARTINIQUAIS dans laquelle des Békés avaient pillé la banque au détriment des milliers de Martiniquais "de couleur" qui y avaient leurs comptes. Tellement de temps fut mis à les traîner à la barre des tribunaux que les responsables eurent le temps de décéder de leur belle mort dans leur lit !
Autre affaire de délocalisation plus récente : le scandale de l'empoisonnement de notre île par le CHLORDECONE. Depuis au moins quinze ans, diverses associations écologiques ont porté plainte en justice contre les responsables et contre l'Etat français, mais rebelote ! L'affaire a été délocalisée au Tribunal de Paris et depuis, évidemment, on n'en entend plus parler du tout. Autant dire que si les écologistes ne continuent pas à mettre la pression, on aboutira au même résultat que pour le CREDIT MARTINIQUAIS.
Troisième affaire délocalisée : celle qui concerne la disparition de 12 millions d'euros au détriment de l'Université des Antilles. Malgré 2 rapports accablants de la Cour des comptes, 1 rapport tout aussi accablant du Sénat et divers rapports du SRPJ français et de l'OLAF (ou "FBI européen"), la justice-sous-les-cocotiers s'en est dessaisie au bout de 5 ans au motif qu'elle n'aurait pas les moyens techniques de la mener à son terme. Délocalisée aussi au Tribunal de Paris !
Mais ça n'a pas empêché cette même justice-sous-les-cocotiers de condamner notre site-Internet, MONTRAY KREYOL, par deux fois suite à des plaintes déposées par des personnes impliquées (par ailleurs radiées à vie de la fonction publique) dans cette affaire. Motif de notre condamnation à chaque fois : "atteinte à la présomption 'innocence". On comprend, en effet, que ces personnes soient innocentes, tout comme l'ont été les fossoyeurs du CREDIT MARTINIQUAIS et les empoisonneurs au CHLORDECONE : la justice ne les juge pas et délocalise leur affaire.
Belle logique, n'est-ce pas ?
En tout cas, cette justice "délocalisatrice" peut continuer à nous condamner autant qu'elle le veut, cela ne nous empêchera pas de continuer notre travail de dénonciation de toutes les saloperies et autres "vakabonnajri" qui gangrènent notre Martinique.
Raphaël CONFIANT (directeur de publication de MONTRAY KREYOL)