Aucun élu de la majorité municipale ni de l'opposition n'avait jamais trouvé rien à redire de la présence de l'abolitionniste alsacien. Or, voici que le conseil municipal, en ce mois de mai 2021, vient de voter A L'UNANIMITE le retrait de son buste et une cérémonie solennelle de déboulonnement s'en est suivie sans qu'aucun média ne s'en étonne. Ni ne pose la question des vraies raisons de l'opération présentée comme un acte salvateur.
En réalité, nos chers (es) élus (es) ont cherché à prendre de court les activistes qui ont déboulonné, il y a quelques mois de cela, les statues du même Schoelcher à Fort-de-France et à Schoelcher. Au déboulonnement sauvage, ils ont sans doute voulu opposer le déboulonnement civilisé. Ce serait du plus haut comique si cela ne trahissait pas un comportement démagogique et récupérateur propre à la plupart des partis politiques martiniquais, se donner bonne conscience à peu de frais étant un sport local.
Cela trahit dans le même temps notre impuissance à toutes et à tous puisque déboulonnements sauvages ou déboulonnement civilisés ne changeront strictement rien à notre état d'ultime colonie du 21è siècle. Cela n'empêchera pas le départ définitif de 4.000 jeunes chaque année et le vieillissement accéléré de notre population, une étude récente montrant qu'en 2050, la Martinique deviendra le plus vieux département de France et de Navarre. Cela n'empêchera pas non plus la bétonisation de 1.000 hectares de terres agricoles par an ni la "profitation" békée et le renforcement mortifère de l'économie de comptoir ni l'accroissement du chômage et du nombre de personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté (62.000 à l'heure actuelle) ni le fameux génocide par substitution et le remplacement progressif des Martiniquais par des gens venus de partout (et non du seul Hexagone comme le prétendent les noiristes) etc...etc...
Ce qu'il faut bien appeler notre "nationalisme de pacotille" est un moyen de nous détourner de la seule question qui vaille à savoir notre accession à la souveraineté pleine et entière qui seule pourra nous permettre de prendre nos différents problèmes à bras le corps et chercher des solutions pouvant nous permettre de sortir de la société de gaspillage effrénée dans laquelle nous sommes englués. D'aucuns diront que notre peuple n'en veut pas et qu'il l'a démontré par les urnes en différentes occasions, notamment en 1981 et en 2010 sans se poser la question de savoir pourquoi il n'en veut pas. La réponse est pourtant simple : aucun parti autonomiste, souverainiste ou indépendantiste n'a présenté à ce jour de programme concret et chiffré d'accession ni à l'autonomie, étape sans doute obligée, ni à l'indépendance. Nous n'avons fait que brandir des slogans souvent grandiloquents auxquels il n'est même pas certain que nous croyons nous-mêmes.
Or, face aux deux solutions qui semblent être les seules possibles (une indépendance à la barbadienne ou une indépendance à la cubaine), il y a une troisième voie qu'il faudrait creuser : celle d'une société de sobriété. Seuls les écologistes semblent en mesure de la proposer mais malheureusement et contrairement à ce qui se passe un peu partout à travers le monde, ils sont peu écoutés et surtout le peuple ne vote pas pour eux. Il est vrai , d'autre part, que quand ce dernier voit de grands nationalistes (pour ne s'en tenir qu'à ce seul exemple parmi cent) rouler dans des voitures à 70.00 euros, voire plus, dans un pays qui fait 80kms de long sur 30 de large, il a, ce peuple, de sérieuses raisons de douter de celles et ceux qui prétendent défendre le péyi.
Allons-nous donc continuer à déboulonner des statues et débaptiser des rues ad vitam aeternam ?
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