Et maintenant je dis que je suis nègre non pas noir non pas homme de couleur mais nègre du sang pulsant dans mes artères oh cruauté des cordages ondulant sous ma peau maintenant je dis que je suis nègre de mes cheveux anciennement corbeau de kouli malabar de mes cheveux anciennement grainés de nomade d'Afrique de mes cheveux anciennement filasses de breton naufrageur Maintenant je dis que je suis nègre de ma poitrine nourrie à la rose des vents de mes pieds encornés de coupeur de canne de mes pieds délicats de danseur mondain Oh biguines oh mazouks oh gavottes an dro et laridés valses piquées et autres menuets Maintenant je suis nègre comme le fou prisonnier du volcan comme ma parole niée dans la cire du sceau comme mon regard perdu dans l'infini des signes Maintenant je suis nègre de la pluie qui s'irrite de ma complexité Nègre oh nègre infiniment divers claquant le tambour de ma langue sur le fil acéré de la herse des mots oh nègre dont la richesse ne se classifie pas
José Le Moigne inédit Nîmes le 15 septembre 2008