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Guyane, une Conquête française de l’Amérique qui n’en finit pas

Pierre CARPENTIER
Guyane, une Conquête française de l’Amérique qui n’en finit pas

Conquête scientifique et Conquête territoriale se sont toujours nourries l’une de l’autre dans l’Histoire coloniale, et cette lucrative loi prend une signification des plus actuelles en Guyane, camp de concentration de richesse et de misères.

Les effets d’ampleur insurrectionnelle, miraculeusement pacifiques, que le plurinational peuple guyanais auquel j’appartiens a produit en début d’année (manifestations dans tout le pays, multiples mouvements de grève et grève générale du 27 mars, la marche de plus de 20.000 personnes à Cayenne le 28), n’ont fait que précéder les causes de son Histoire.

Je veux dire par là que, déjouant les lois de consécutions chronologiques auxquelles on pouvait s’attendre, les Guyanais ont su faire précéder les effets avant les causes, pour se réserver leur propre part d’Histoire politique dans le futur creuset de l’inattendu…

Exaspérés par les violences physiques, notamment par l’assassinat de Patrice Clet, ancien conseiller général de la Guyane, secrétaire général adjoint en exercice du parti politique Walwary, le 8 novembre 2016, (puis, 4 morts en une seule semaine courant mars à Cayenne, plus la mort d’un jeune homme, pour lui dérober sa chaîne en or, ce qui a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase) et les violences plus normatives des colonialités multiples (telles que les lourdes carences structurelles en moyens d’éducation, de santé publique, de désenclavement des collectivités de l’intérieur du territoire, les modes de dépendance et d’aliénation économiques et alimentaires etc.) d’un pouvoir de déprédation à large spectre, en deux mots : ulcérés par le néocolonialisme et l’exploitation française en leur vaste domaine de dépossession, les Guyanais ont pris en charge leur propre sécurité dans un premier temps grâce au courage des membres du Mouvement des 500 frères contre la délinquance.

Un premier jeune leader, Mickaël Mancée (porte-parole des 500 frères), puis un deuxième, Olivier Goudet (secrétaire général adjoint de l’Union des Travailleurs Guyanais, UTG, président de l’association Tròp Violans) et un troisième Davy Rimane (syndicaliste UTG, au sein d’EDF à Kourou) émergèrent de ce mouvement pour soumettre le gouvernement à la signature de l’Accord dit de Guyane le 21 avril dernier moyennant 3,2 milliards d’euros sur 10 ans. Pour obtenir cet engagement de l’État, il avait fallu clouer la fusée Ariane 5 au sol, pendant 37 jours, interdisant toute opération de transport spatial, causant de ce fait un cuisant déficit de recette estimé à près de 500 millions de dollars…

Aujourd’hui, ce sont nos jeunes compatriotes amérindiens (La Jeunesse Autochtone de Guyane) qui, nous rappelant sans cesse à notre milieu et à notre conscience patrimoniale, s’opposent héroïquement, au projet franco-canadien « Montagne d’or » du consortium canadien NordGold / Colombus Gold qui souhaite s’implanter au lieu-dit « Boeuf mort », promettant la « création » de près de 750 emplois sur 10 ans, et prévoyant 100 milliards d’euros d’extraction aurifère.

En effet, leur courageuse opposition leur a valu d’être molestés puis expulsés de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Guyane à Saint Laurent du Maroni par les gardes mobiles de la gendarmerie (voir l’action et le communiqué de presse signé du Collectif des Autochtones de Guyane en date du 29 juin).

Les Jeunes Autochtones de Guyane, emmenés par un quatrième et emblématique jeune leader décolonialiste guyanais, Christophe Pierre, ont réalisé une nouvelle opération contre la Montagne d’Or le 29 juillet dernier, toujours à St Laurent du Maroni, soutenue par… Olivier Goudet.

100 milliards d’euros en or ! Soit l’équivalent cumulé de 10 ans des activités de tirs du futur lanceur Ariane 6 voisin, depuis son nouvel ensemble de lancement ELA 4 à la base spatiale militaro-industrielle de Kourou qui doublera sa charge utile, une fois opérationnel dès 2020, et donc la recette unitaire actuelle, pour atteindre un milliard de dollars de recettes par tir dont la fréquence, sera de près de 15 par ans, libres à 100% de toute fiscalisation locale…

Le vivier de leaders potentiels de la nation Guyane est loin de se tarir, et la jeunesse guyanaise, qui grandit en puissance d’arrachement des libertés que l’on s’/nous/ interdit, prendra son dû à chaque fois qu’elle provoquera l’occasion de mettre en œuvre, par un soudain rapport de force, la résolution autonome de nos problématiques internes, autrement dit, à chaque occasion nouvelle de consolider l’Écart Déterminant (d’avec la France) qui demeure le seul garant de notre destin politique.

Car en définitive, si l’insurrection guyanaise, restée miraculeusement pacifique, a été analysée comme révélatrice d’un processus plus populaire que politique ; il n’empêche que la question de fond, la question centrale, demeure celle de l’Autonomie de la Guyane, voire de son indépendance ou de sa souveraineté, comme on voudra, pour maîtriser ses ressources et mettre en valeur ses patrimoines matériels et immatériels, naturels et culturels.

« Le droit ne vient pas à l’existence par les moyens du droit » É Kant.

L’heure de Nous-mêmes a sonné !

Soley’ !

Pierre Carpentier.

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