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La Région Bretagne met 8 millions d'euros sur la table pour le breton

L'express - Michel Feltin-Palas
La Région Bretagne met 8 millions d'euros sur la table pour le breton

Peut-on encore sauver les langues de Bretagne ?

Le breton est utilisé par des entreprises de pointe et arrivera bientôt sur le moteur de recherche Qwant. Encourageant, mais il en faudra plus pour assurer sa pérennité, ainsi que celle du gallo.

"Savomp asambles ho Siber-sideroni". Soit, en français : "Construisons ensemble votre cybersécurité". Non, vous ne rêvez pas : cette phrase est bel et bien extraite du très officiel site Internet d'une entreprise de pointe, Locyber, spécialisée dans la cybersécurité. Une société de haute technologie qui communique en français, en anglais et, donc, en breton. Ce n'est pas tout : dans le courant du mois de mai, le conseil régional signera avec Qwant un accord comprenant notamment un partenariat de valorisation sur le moteur de recherche français des deux langues historiques de la région : le breton et le gallo.

Le point commun entre ces deux initiatives ? Elles prouvent que les langues minoritaires ne sont pas condamnées à déplorer la lente disparition d'un monde rural dépassé par les réalités contemporaines. "Cela montre qu'elles sont tout aussi modernes que les grandes langues internationales, se réjouit Loïg Chesnais-Girard (PS) qui a succédé à Jean-Yves Le Drian à la tête de la région. On m'interroge parfois sur l'utilité du breton ou du gallo. Je réponds : à ce compte-là, à quoi sert de parler français ? Passons tous à l'anglais !"

Ces initiatives sont méritoires, à condition de disposer de locuteurs. Et c'est là que le bât blesse, comme le montre la remarquable enquête sociolinguistique menée par la région . En résumé ? On compte environ 200 000 brittophones et 200 000 gallèsants sur les cinq départements de la Bretagne historique (Loire-Atlantique comprise). Verre à moitié vide : la forte chute observée au cours de la décennie précédente n'a pas été compensée. Verre à moitié plein : ces chiffres sont relativement stables depuis 10 ans. Il n'empêche : ramené à une population totale de 4,7 millions d'habitants, c'est encore peu. D'autant que la moyenne d'âge est élevée : 60 ans pour le gallo, 70 ans pour le breton.

Le seul point rassurant concerne la forte demande sociale exprimée par les habitants, qui souhaitent conserver ou s'approprier les langues de leur territoire. D'où le plan présenté par le conseil régional de Bretagne en décembre dernier. Un plan volontariste quand on le compare à la plupart des régions françaises, et pourtant largement insuffisant par rapport aux besoins.

Ce qui pose problème ? D'abord, le financement. La région met 8 millions d'euros sur la table, une somme jugée en deçà des besoins par la plupart des acteurs locauxProcès en partie injuste, dans la mesure où les autres collectivités locales dépensent moins que le conseil régional à lui seul, mais pas infondé, dans la mesure où ce montant n'est clairement pas à la mesure de l'enjeu.

Cela dit, le principal obstacle se situe ailleurs. Toutes les études le montrent : pour sauver une langue, il faut avant tout que celle-ci soit "utile" - c'est généralement pour obtenir un diplôme ou pour trouver du travail qu'on l'apprend et qu'on la transmet. Ce qui suppose de lui conférer une place significative dans l'éducation, les entreprises, les médias, l'administration, comme c'est le cas pour le français au Québec, par exemple. Or c'est peu dire que l'on n'en prend pas le chemin en France, où Paris entrave leur essor dans tous les domaines. C'est bien simple : du manque d'enseignants dans les classes bretonnes au refus du prénom Fañch, en passant par une réforme du bac défavorable aux langues régionales, tous les signaux ou presque vont dans le mauvais sens.

Dès lors, on le comprend, les mesures clefs ne dépendent pas d'un élu local, fût-il président de région, mais de l'Etat. Cela n'empêche pas d'être surpris par la pusillanimité de Loïg Chesnais-Girard. Au contraire de son homologue corse Gilles Simeoni, celui-ci refuse ainsi de se battre pour la coofficialité, l'une des rares mesures susceptibles de modifier radicalement la donne."Ce n'est pas mon combat, explique le Breton à L'Express. Si je demandais la coofficialité, non seulement je ne l'obtiendrais pas, mais cela risquerait de heurter une partie de la population et de créer des oppositions aux dispositifs qui existent en vigueur."

Cette attitude modérée a le mérite de la cohérence, mais elle n'a évidemment pas la moindre chance d'amener le gouvernement à changer radicalement d'attitude vis-à-vis des langues minoritaires. Autant dire que, si Loïg Chesnais-Girard persiste dans son attitude, l'avenir est écrit. La Région retardera sans doute de quelques années la disparition du breton et du gallo. Elle ne l'empêchera pas.

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