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LA TENTATION NATIONALISTE

Par Thierry Caille
LA TENTATION NATIONALISTE

Il est difficile pour un blanc-France, un métropolitain, de s’exprimer sur la Martinique, dans certains cercles antillais, sans être taxé de tous les maux, d’être un simple touriste inoffensif ce qui est sans conséquence, d’être ce petit-blanc qui cache l’ambition trouble d’acquérir un pouvoir qu’il n’aurait pas en métropole et de véhiculer une mentalité de néo-colons probablement héritée de ses ancêtres esclavagistes, d’être surtout issu de la nation dominatrice qui exploite depuis des siècles le peuple martiniquais et si ce n’est lui c’est donc son frère comme l’agneau de la fable. Car le monopole du cœur et celui de la critique lui sont irrémédiablement interdits. Que l’on soit Ouzbek, Papou, Tchétchène ou Français on se doit de passer sous les fourches caudines d’une adhésion sans discernement de tout ce qui se passe à la Martinique. Il est ainsi suspect que l’on puisse aimer la Martinique sans arrière-pensées et comble d’imposture de formuler une quelconque critique sur la société actuelle martiniquaise qui pourtant, sans la moindre vergogne, s’est soumise depuis quelques décennies au culte de l’argent et d’une consommation effrénée avec l’arrogance qui va avec au point qu’il faut se lever de bon matin pour rencontrer un antillais authentique ou ressemblant à l’idée que l’on se fait de la population autochtone. Celle par exemple que nous propose avec saveur et délice Raphaël Confiant dans ses livres. Sans parler naturellement du fameux génocide par substitution dont chaque ressortissant français porte une parcelle de responsabilité. A ce sujet, ils sont néanmoins plus que nombreux à ne pas s’éterniser sous le soleil martiniquais ; la substitution ne dure que le temps de la déception. Les exemples foisonnent de ces retours amers et désabusés : se déraciner, sous un climat sans nom, pour trouver la caricature de la société de consommation française n’a rien de bien excitant.

Tout découle d’un nationalisme que l’on brandit à tout instant, exacerbé, qui s‘appuie sur l’identité et la culture martiniquaise et qui se solidarise des nationalismes de tous bords et au-delà de la lutte de tous les opprimés de la terre. Vaste programme ! Il se traduit, n’en déplaise à ceux qu’un certain vocabulaire fait bondir, par une réelle xénophobie voire, le mot doit être lâché, par un racisme réel. N’en déplaise encore à mes détracteurs, le nationalisme martiniquais tire principalement son origine de l’insularité ce que j’appelle la peur des steppes infinies. Certains ici n’hésitent pas d’ailleurs à soutenir le nationalisme corse dans la même situation d’insularité, nationalisme dévoyé, usant d’un terrorisme intimement mêlé aux mafias locales, sans honneur, s’exprimant par une violence aveugle, assassinats politiques et crapuleux dans une île en proie à la corruption, à la fraude en tous genres, aux détournements des fonds de l’Etat, totalement improductive, sous perfusion à plus de 90 % des mannes de l’Etat français. Mais quelques rodomontades en langue corse, quelques nuits de plastiquages contre des symboles de l’Etat, l’assassinat, dans le dos, d’un préfet de la République et voilà des interlocuteurs que tous les gouvernements français ont rencontré.

La situation de la Martinique est tout à fait différente car sa géographie en fait d’abord une aberration dans le territoire français. La Martinique appartient à l’arc antillais et n’a rien à voir avec un quelconque pays d’Europe du nord. Combien de Français n’en ont d’ailleurs jamais entendu parler ou la situe dans l’océan indien, voire ailleurs. Le fonctionnement propre de la société française, ses luttes, ses mouvements d’opinion, ses choix politiques, économiques et internationaux ne concernent que l’hexagone. Quel est le poids de la Martinique ultra-marine et ultra-périphérique ? Anecdotique. Sans parler d’un mépris avoué de cette miette de l’empire colonial, puisque bon gré mal gré les administrations françaises sont présentes sur l’île, la France n’a jamais pris la mesure des spécificités de la Martinique, de son histoire et de son peuplement. La colonisation, souvent décriée, quand la Martinique était encore l’île à sucre ne prend plus les formes d’antan. Elle est plus insidieuse. La Martinique ne correspond plus et depuis longtemps à l’essence même de ce qui fait une colonie. Elle ne présente plus le moindre intérêt économique, militaire, stratégique ou humain pour la France métropolitaine. Bien plus, elle est devenue une danseuse coûteuse dont la seule justification est le maintien de l’intégrité du territoire national, des départements d’outre-mer dans le giron de la France. L’Histoire est là aussi pour cimenter une appartenance, le passé colonial, les guerres et la départementalisation qui a soudé de façon quasi-irréversible la Martinique à la France.

Ainsi depuis une trentaine d’années s’est progressivement mise en place une classe moyenne, une bourgeoisie rompant avec la structuration ancienne de la société. Cette classe moyenne s’est soumise aux mirages de la consommation, au culte avilissant de l’argent, grâce aux subsides déversés par la France. Il ne s’agissait pas de régler la dette de l’esclavage, aboli cent ans auparavant, ce genre de dette peut-il d’ailleurs se régler par l’argent. Non ceci porte le nom d’assimilation, permis par un progrès économique global. C’est certes la méthode la plus pernicieuse d’annihiler l’âme d’un peuple comme ont été annihilés les particularismes régionaux de la France métropolitaine. Je veux croire que c’est contre cette forme de colonisation que s’élèvent les discours enflammés des anti-colonialistes martiniquais. Il est vrai que c’est une tendance mondiale, le capitalisme triomphant, le libre-échange, la pensée unique, les moyens de communication, imposent à peu près partout dans le monde le culte de l’enrichissement et la disparition des spécificités locales, dans des standards de consommation. Il ne s’agit donc plus de colonisation à proprement parler mais de néo-colonisation sournoise, insidieuse, par la corruption de l’argent, dans un pays où 95 % des biens de consommation proviennent de la France, pays qui à ce titre a le droit de se taire et de s’identifier à n’importe quel département français ce qu’il ne sera pourtant jamais.

La répartition des mannes financières déversées sur l’île est cependant sujette à caution. Un exemple, le fameux traitement spécial des fonctionnaires est purement scandaleux. Il concourt à accroître l’inflation et les écarts de ressources avec les moins nantis. Il y a ainsi aujourd’hui des paradoxes à la Martinique qui soulèvent le cœur. Comment à quelques encablures peut-on laisser coexister le quartier de Volga-plage et le complexe commercial de la Galleria, avec ses luxueux commerces de parfums et autres ? Il y a des révoltes à mener au sein même de la société. Mais qui les mènera ? Si l’émergence des classes moyennes au Chili a assis le pouvoir de Pinochet, ce n’est pas à la Martinique qu’elle fera la révolution. Au lieu de chercher des poux sur la tête des ressortissants métropolitains et de l’impalpable Etat français, les activistes de tout bois feraient mieux de s’en prendre à la classe dominante et putassière, la caste des békés à la longue tradition de mépris et d’exploitation. Qui tordra le cou à la racaille des blancs créoles au lieu de crier avec les loups contre l’Etat français responsable dans le pire des cas d’une indifférence notoire à l’égard de la Martinique ?

Face à un constat clair que la France avait un certain mépris pour ses territoires lointains sont apparus des mouvements nationalistes et indépendantistes. Le nationalisme martiniquais repose, je l’ai dit sur l’insularité mais aussi sur la mémoire de l’esclavage, particulièrement présente chez les intellectuels quand il s’agit d’introduire n’importe quel discours. Autant il est difficile d’en faire l’économie dans la mémoire populaire car il fonde le peuple martiniquais autant pour le blanc-France il est difficile de se sentir concerné par cette abjection de l’Histoire, a fortiori de s’en sentir coupable, de porter en soi la faute du négrier et de se battre la coulpe d’appartenir à la race esclavagiste, la race blanche.

« La Martinique aux martiniquais » voilà un slogan nationaliste qui doit rencontrer un certain écho sur l’île. Transposé à la France c’est « la France aux français » soit le discours de Le Pen, de l’extrême droite française et des ligues fascistes, discours qui se fonde sur le racisme et sur la xénophobie, l’un ou l’autre, souvent les deux. A méditer.

Malgré tous les cahots de l’Histoire, et dieu sait s’il n’ont pas toujours été à l’honneur de la « mère patrie » l’histoire de la Martinique est intimement mêlée à celle de la France. De nos jours encore nul ne saurait décemment proposer une rupture simple avec la France car il n’en aurait aucune légitimité populaire. Sans parler du coût économique d’une indépendance que pas un martiniquais ne serait prêt à assumer. Si les mouvements indépendantistes sont des forces de revendication pour plus de justice, pour plus de respect, plus de considération alors qu’ils prospèrent. Il y a, à l’évidence, de très nombreux domaines où la dignité des martiniquais est bafouée. Mais si ces mouvements indépendantistes sont des forces de sécession, inspirées par quelques idéologues révolutionnaires illuminés, je doute qu’ils ne se coupent de la base populaire et qu’ils ne s’enferment dans un radicalisme désespéré. Le nationalisme ne croît que sur la détresse sociale ou identitaire des peuples, relayées par des intellectuels en mal de rhétorique et des petits chefs en mal de pouvoir. Il est responsable de bien plus de conflits à l’échelle du globe, au cours de l’Histoire, que la fraternelle amitié entre les peuples que d’aucuns se plaisent à mépriser et qui est plus qu’une réalité pour qui a un peu voyagé à travers le monde…

Pour ma part, je dénie à quiconque le droit de me reprocher d’aimer par dessus tout la Martinique car c’est une île où l’émotion me gagne en chaque lieu. D’y être ou d’y penser, c’est une île où j’ai laissé mon cœur et mon âme dans ce petit village des Anses d’Arlet parmi une population certes simple, mais affectueuse, humaine, rabelaisienne, jubilatoire et sans préjugé aucun. Une île que j’aime aux confins de mon errance. Et qu’il me soit permis sans porter atteinte aux règles de l’hospitalité d’avoir un jugement sévère sur certains comportements de parvenus, de nouveaux riches, arrogants, hautains et xénophobes, d’une partie de la société martiniquaise.

L’identité nationale, le nationalisme, le drapeau tricolore, l’orgueil national sont des valeurs montantes en France métropolitaine, l’apatride que je suis souhaite ardemment que la Martinique reste une terre d’accueil et de tolérance, cosmopolite et pluriethnique, bien loin d’un nationalisme étriqué, source d’ostracisme, de replis frileux sur soi et avouons-le de bêtise grotesque.

Commentaires

nasyon_matnik | 19/11/2007 - 23:47 :
Voici une vidéo qui parle du génocide par substitution ( zorey ) en martinique :
nasyon_matnik | 19/11/2007 - 23:49 :
DANS LA PARTIE 7 il parle de petrole et de richesses ne martinique. .

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