Il y a quelque chose d'amusant à observer le hall d'arrivée de l'aéroport Aimé Césaire, en la bonne ville du Lamentin, Martinique (French West-Indies), chaque fois qu'un Martiniquais ramène un trophée, un titre, une médaille ou n'importe quoi jugé valorisant de quelque contrée étrangère. Nos politiques, du sexe prétendument fort comme du sexe censément faible, s'y précipitent en masse afin de féliciter le héros ou l'héroïne de retour au pays natal, bousculant sans vergogne parents, amis, alliés et fans ou supporters, pour pouvoir être les premiers à féliciter, embrasser, brandir la main du héros/héroïne.
Il faut à tout prix, ces politiques, qu'ils figurent sur la photo qui sera diffusée sur les réseaux asociaux (autrement connus sous l'appellation de "Makrélaj 2.0"), en Une de La Pravda insulaire le lendemain matin et bien sûr dans les JT des chaînes de télé de proximité (comme d'éloignement assimilationniste). Ainsi le politique récupère-t-il à peu de frais un peu de la gloire du héros/héroïne et ainsi voit sa côte remonter dans l'opinion publique comme par un coup de baguette magique sans pour autant que lui (/elle), le (/la) politique ait eu à verser une seule goutte de sueur à pédaler ou taper dans un ballon, ni à brûler le moindre neurone si le revenu au pays natal exerce ses talents dans un domaine intellectuel (encore que cette catégorie, soit, hélas, trois fois hélas, très peu nombreuse).
Tout cela est amusant, certes, mais aussi pathétique et grotesque. Car s'il y a bien une différence fondamentale, abyssale entre, d'une part, le héros/l'héroïne qui revient au pays avec son trophée et d'autre part, le/la politique, c'est celle-ci : le premier est arrivé là où il est par ses propres moyens soit physiques soit intellectuels. Il s'est imposé grâce à sa valeur propre, ses qualités intrinsèques. On ne devient pas champion cycliste ou on ne reçoit pas le Prix Goncourt parce que cinq mille ou dix mille individus lambda ont voté pour vous...