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Le long voyage d'Ismaël porté à l'écran (sur Tahiti Infos)

Le long voyage d'Ismaël porté à l'écran (sur Tahiti Infos)

PAPEETE. Jean-Charles Granjon a écrit et réalisé Te Aranui, le long voyage d’Ismaël, un film documentaire de 52 minutes produit par Bluearth Production. Le tournage a eu lieu en novembre et décembre 2017. Le documentaire est en cours de montage, il sera diffusé courant 2018 sur France Ô notamment. Il raconte l’histoire d’Ismaël, Marquisien d’origine, Tahitien d’adoption...

Rédigé par Delphine Barrais le Jeudi 15 Février 2018 à 16 : 52 sur Tahiti Infos "Le long voyage d'Ismaël porté à l'écran", ici :

 

(...) Qui a relié cinq îles de la terre des hommes à la nage. Jean-Charles Granjon revient sur ce projet qui tient plutôt de l’aventure.

 

Tahiti infos : Qui est Ismaël ?

Jean-Charles Granjon : "C’est un homme inspiré qui vit pleinement dans sa culture, un messager dont la mission est de relier les Polynésiens à leur culture, à leurs valeurs ancestrales. Il le fait par le biais de l'océan. Sa démarche est pleinement spirituelle. Ses nages sont méditatives. C'est une manière de capter, dans l'instant présent, des messages transmis par ses ancêtres. Ces messages prennent la forme d'un puzzle dont les pièces lui sont données par la présence et le comportement d'animaux, des bribes de discussions, captées dans l'instant ou encore dans des signes manifestés par les éléments de la nature."

Tahiti Infos : Comment l’avez-vous rencontré ?

Jean-Charles Granjon : "J’ai pris connaissance de sa démarche via un article de Médiapart écrit par Pierre Carpentier, un ami d'enfance d'Ismaël. J'ai trouvé d'autres références à sa démarche puis j'ai profité de ma présence sur le tournage de Laurent Ballesta en juillet 2017 à Fakarava pour le rencontrer. Je terminais par ailleurs un roman nommé Initiation Pacifique sur la base de mon premier séjour en Polynésie."

Tahiti Infos : Que raconte ce roman ?

Jean-Charles Granjon : "Il prend la forme d'un voyage initiatique abordant la communication avec la nature et les animaux. Le rêve comme moyen de contact avec les éléments de la nature et les animaux y est très présent. J'étais donc déjà sensibilisé à la démarche d'Ismaël. Ayant grandi dans la culture occidentale et donc dans un monde cartésien déconnecté de la nature, je suis en démarche de recherche et de compréhension du lien intime et profond qui relie chaque être humain à son environnement naturel. En parallèle je travaille avec un collectif d'acteurs de la communication sur un projet de plaidoyer pour l'océan, pour mettre en lumière des initiatives inspirantes proposant une nouvelle forme de relation à l'océan."

Tahiti infos : L’idée du documentaire vous est-elle venue dès la 1ère rencontre ?

Jean-Charles Granjon : "Lors de notre première rencontre, je souhaitais filmer Ismaël pour montrer sa démarche dans le cadre du collectif. L’idée de nager, dans une démarche spirituelle pour sensibiliser son peuple au respect de l'océan me plaisait beaucoup. Au fil de nos discussions, j'ai réalisé que sa vision faisait écho à quelque chose de beaucoup plus intime, à cette quête de reconnexion au monde vivant que j’explique dans mon roman. Dès mon retour, petit à petit, son histoire et l'aventure qu'il souhaitait vivre aux Marquises se sont mises à tourner en boucle dans mon esprit. Mon intuition me poussait à suivre et raconter cette aventure."

Tahiti infos : Parlez-nous de cette aventure

Jean-Charles Granjon : "Nous sommes partis de Ua pou en direction de Nuku Hiva puis Ua Huka, Hiva Oa et nous avons terminé à Tahuata pour le mini festival."

Tahiti Infos : Y-a-t-il eu des difficultés particulières ?


Jean-Charles Granjon : "Il y en a eu, comme sur tous les tournages. Rien ne s'est passé comme prévu mais au final tout s'est bien passé. Et c'est probablement pour moi l'un des plus grands enseignements de cette expérience. La préparation de ce doc a été plus que sportive. Je n'ai eu qu'un mois et demi pour tout préparer. Sur place, la population marquisienne dans son ensemble s'est montrée tout simplement exceptionnelle. Sans eux tous, je parle de toutes, et je dis bien toutes, les personnes que nous avons rencontré, rien n'aurait été possible. Sans compter que nous avions avec nous la meilleur des équipes pour cette aventure."

Tahiti Infos : Votre relation avec Ismaël a-t-elle évolué en cours de tournage ?


Jean-Charles Granjon : "Oui, c'est le propre de toutes aventures collectives. Nous avions un projet commun, à savoir valoriser une approche respectueuse de l'océan via le retour aux valeurs culturelles, mon intuition de départ est restée intacte, elle l'est encore aujourd’hui d’ailleurs. Une fois la première étape de ‘fascination’ passée, nous avons vécu l'épreuve du réel, la fatigue avec 25 jours de tournages non stop et, très souvent, une incompréhension mutuelle nourrit par nos différences culturelles. Je me suis souvent senti dérouté, je me suis souvent dit : ‘là je ne comprends pas ce qui se passe, mais ok, je vais laisser du temps. Le sens viendra’. Ismaël et moi avons, de part nos cultures deux regards différents sur le monde, avec chacun des contraintes propres."

Tahiti Infos : c’est-à-dire ?


Jean-Charles Granjon : "Moi dans ma démarche de réalisation documentaire et lui dans sa démarche de résolution des puzzles. Cela impliquait d'avancer dans cette aventure dans deux compréhensions du temps et des événements différentes. Il y a donc eu des décalages entre nous qui ont demandé de la communication et du temps. Le tournage en lui même était un laboratoire d'expérimentation interculturel. Ce fut à la fois éprouvant et passionnant car notre relation, à travers cette aventure, impliquait de la part de chacun de se remettre en question dans sa manière d'appréhender le monde, le temps, les signes, l'autre... Plusieurs fois je me suis dit que nous aurions pu faire un film sur le film. Je suis très heureux d'avoir vécu cette aventure avec lui et je me dis qu'il n'y avait pas meilleur compagnon pour nous plonger dans la culture marquisienne. Je considère Ismaël comme un ami. Lui et moi avançons dans le même but. Donc oui la relation a changé. L'amitié reste et elle est plus lucide. Finalement sans trop la connaitre, j'avais intuitivement beaucoup d'admiration pour les valeurs propre à la culture ancestrale polynésienne. Grâce à cette expérience vécue avec Ismaël, cette admiration s'est renforcée et je souhaite, à travers ce film, pouvoir transmettre ces valeurs au public."

Tahiti infos : Ce tournage a-t-il eu un impact sur vous ?


Jean-Charles Granjon : "Oui, la réalisation de ce documentaire m'a amené à de profonds remaniements intérieur. Cette expérience m'a permis de franchir des étapes importantes au niveau personnel et d'ouvrir des portes. Si j'en avais déjà l'intuition, je comprends aujourd'hui que la préservation de l'océan passe par une démarche de respect de soi-même et de l'autre, une démarche de compréhension aussi car, entendons-nous bien, les problèmes que nous observons à échelle globale au niveau de l'environnement ne sont pas du fait de la nature. Si quelqu'un ne va pas bien... ce n'est pas la nature, c'est l'humain. Ce malaise se répercute sur l'environnement qui a son tour devient malade. Il reste donc à l'humanité de se soigner elle-même. Or, comment se soigner sans un minimum d'écoute et de respect ?

Depuis 30 ans, le peuple marquisien se relève avec force, volonté et courage d'une période qui a failli l'anéantir. Comme il le fait très bien et à mon humble avis, c'est en soignant ses blessures culturelles et en reprenant pleinement confiance dans sa force et son potentiel qu'il pourra le mieux préserver sa nature, sa culture et son océan. Reprendre confiance dans cette force et cette valeur furent les messages dispensés par Ismaël tout au long de cette aventure. Un grand Kotou Nui au peuple des Marquises de m'avoir montré la beauté qui est la sienne."

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