Quand le monde s’effondre et nous entraîne dans l’ensauvagement, quand le délitement de nos valeurs est chassé pour faire place à la violence et au désespoir, chez nous des Antilles, le Patrimoine culturel est capable de nous retenir pour ne pas sombrer.
Le repère face au malheur et à l’égarement, c’est la Culture et la Nature, ce que nous possédons et ce que personne ne peut venir nous prendre. L’Etat profite de la pandémie du Covid pour nous signaler qu’il n’est pas éternel, un certain nombre de service public ne répond plus désormais. Se rendre à la CAF, à la Sécurité Sociale, à la Poste, sont désormais devenus un chemin de Damas où le « chacun pour soi » a gommé les solidarités locales. La culture politique de chez nous ne sait pas se passer de l’Etat. On voit comment les édiles et les instances en place se courbent face aux pratiques anarchistes. Faut-il gommer le récit commun qui est, qu’on le veuille ou non, notre force citoyenne. Ne faut-il pas au contraire recréer ce facteur de résilience qui a permis à nos anciens d’avancer . C’était peut-être une prospérité sans croissance, mais c’est la seule qui nous permettrait de demeurer digne.
La question de l’eau dans le Sud de l’île , la question du transport, face à la modernité des temps réclament un changement et sont de la responsabilités des politiques. Investir dans des infrastructures qui règleraient ces problématiques qui sont anxiogènes pour la population ne peuvent pas se suffire de promesses et de paroles. A l’heure où certains sont toujours persuadés que l’exemple est la vieille Europe et sa vision xénophobe et ségrégationniste, celle qui milite encore et toujours pour une ère libérale dans laquelle il faut posséder et posséder encore, au point de s’anéantir soi-même, est la seule avancée pour une société meilleure, ils se trompent. Cette aliénation-là, a su nous mettre dans la situation d’égarement dans laquelle nous nous trouvons à ce jour. La fraternité, apprendre à s’écouter, à se respecter, ce que pratiquaient nos anciens issus de la Plantation a été supplantée. Pourtant, ils ont su par des actions collectives laisser des traces qui préconisaient un chemin vers une dignité recouvrée « o ka, an kouri-vini sé rivé » Si un malheur arrivait, une parole que j’ai souvent entendu dans la bouche de mon père quand j’étais jeune, lui qui avait perdu le sien à ses quinze ans. L’entre-aide, un principe du vivant était une règle d’or, avoir conscience de la Nature, connaître la valeur de nos terres et des océans qui nous entourent, savoir ce qui nous nourrit et ce qui nous tue, c’étaient les principes de base pour les déportés qu’ils étaient .
Ce fameux Covid qui nous a presque obligé de rester sur notre île, a aussi provoqué une obligation, celle de prendre le temps de regarder autour de nous, et prendre la mesure de ce que nous possédons. Nous fûmes aidés en cela par les dirigeants du PRNM et la CTM qui savent que le Tourisme et la Culture patrimoniale, sont les fers de lance de nos régions Et, nous ne pouvons détourner notre regard sur ce que nous sommes , les habitants d’un coin du monde à nul autre pareil .
Comment s’organiser dans un contexte où les bases de notre société n’ont rien à voir avec la société industrielle. Certes elle est plus riche et plus prospère que cette société créole que nous avons créée à la fin du dix-neuvième siècle, mais aujourd’hui, et comme un boomerang, les tensions sont plus grandes que dans la plupart des autres sociétés connues dans l’histoire.
En créant ce Festival Martinique Merveille du Monde, qui a presque parcouru l’île de part en part, mettant à jour la richesse de nos contrées et celle de notre Culture Patrimoniale et nous théâtreux de « Comédie Antillaise », nous avons été fiers d’avoir participé à ce nouvel essor. Le Festival créé par le Parc , a repris les valeurs autrefois démontrées par Césaire quand il était maire de Fort de France. Ses dirigeants ont prouvé, il en était besoin, que la Martinique a tout ce qu’il faut pour résister à la morosité de ce monde qui s’effondre. Cette pensée contemporaine de la différence est de Césaire « Plus on est nègre, plus on est universel et la culture c’est tout ce que l’homme a inventé »