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Professeur Arnaud Carpooran: «Le gouvernement a compris que je suis devenu un symbole»

Professeur Arnaud Carpooran: «Le gouvernement a compris que je suis devenu un symbole»

Arnaud Carpooran, le nouveau doyen de la faculté des sciences sociales et humaines à l’université de Maurice (UoM) a accordé un entretien à «l’express», mercredi, sur le perron de l’église de Sainte-Croix. Sa nomination venait d’être officialisée. Ce n’est pas pour autant que celui qui jusqu’à peu, a vu son poste lui glisser entre les doigts, ne dit pas quasiment tout. Et tout haut.

Ça y est. Vous avez signé votre nouveau contrat ?

 


C’est fait. Je l’ai signé 40 minutes après avoir reçu un appel de la secrétaire du doyen de l’université m’informant que j’ai des papiers à signer, mais que je dois avant tout officialiser la nomination. Dès demain, je serai le nouveau doyen de la faculté des sciences sociales et humaines.

Votre sentiment ?
Mo byen kontan. Mo pé retourn lakaz. J’ai le sentiment du devoir accompli. D’avoir fait quelque chose qui marquera l’histoire de l’UoM. J’ai eu le courage de dénoncer l’arbitraire et l’injustice à l’UoM.

De quelle injustice parlez-vous ?
Depuis un an, on savait que le prochain doyen de la faculté des sciences sociales et humaines, c’est-à-dire moi, prendrait ses fonctions le 3 juillet 2017. Tous ceux qui me connaissent savent que ça coïncidait avec mon anniversaire. Les attentes de ma mère, ma famille étaient grandes. Puis lundi, le jour venu, rien. J’ai été humilié. J’ai été traité comme de la merde.

Qu’avez-vous alors décidé ?
Après cet affront, j’ai pris la décision de ne plus remettre les pieds dans cette institution. Et que si je le faisais un jour, ce serait uniquement en tant que Dean of Faculty.

Vous aviez pourtant reçu une offre du directeur des ressources humaines le 17 mai. Que s’est-il passé par la suite ?
J’ai reçu l’offre datée du 15 mai, le 17 mai. J’avais jusqu’au 19 mai pour l’accepter mais je l’ai signée le même jour.

D’ailleurs, depuis, je me suis présenté comme le nouveau doyen aux membres du personnel. J’accompagnais aussi mon prédécesseur, Uma Bhowon, à toutes les fonctions. Une façon de faire le handing over. Puis, j’ai entendu une rumeur selon laquelle il y aurait un exercice de sélection et que je devais postuler. Je suis allé me renseigner auprès du directeur des ressources humaines. Celui-ci a confirmé la rumeur, m’expliquant que le règlement a changé le 18 mai.

Comment avez-vous réagi ?
Je lui ai demandé s’il comptait m’écrire à nouveau pour me demander de discard l’offre. Il m’a répondu par l’affirmative. À mon tour de lui dire s’il s’attendait à ce que je lui réponde moi aussi que je déclinais l’offre. Excusez-moi, je lui ai bien fait comprendre que ce n’est pas moi qui avais changé le règlement et je lui ai conseillé comme un ami, de recourir à un avis légal pour savoir s’il avait le droit de faire ce qu’il était sur le point de faire.

À partir de là, qu’avezvous fait ?
J’ai écrit deux lettres au Chairman of council, Preeaduth Chitamun. Une pour l’informer de la situation et une autre dont je ne pourrai révéler le contenu à la presse. Dans les deux lettres, j’ai signé Professor Arnaud Carpooran, the rightful and only legitimate dean of faculty of social Studies and Humanities. En parallèle, j’avais déjà identifié des avocats et étais en contact avec des regroupements. Puis, lundi, j’ai appelé une journaliste lui disant que j’ai un scoop pour elle.

Pourquoi vous ne souhaitez pas révéler le contenu de votre lettre à Preeaduth Chitamun ?
Comme doyen maintenant, je suis responsable. Je ne peux dévoiler des informations qui causeront encore plus de dommages à l’université, qui a déjà mauvaise presse. En tout cas, tout le monde a compris que si on n’agit pas rapidement, c’est l’histoire de Maurice qui pourrait changer.

Comment ?
J’étais prêt à aller jusqu’au bout. Jusqu’à une manifestation d’indignation populaire. Des gens étaient prêts à descendre dans la rue pour moi.

Professeur, vous rendez-vous compte de ce que vous dites ?
J’habite Sainte-Croix et j’ai travaillé dur pour arriver où je suis aujourd’hui. Ils m’ont pris pour un kouyon. Pour de la merde. Ça m’a rappelé quand j’avais postulé pour devenir professeur. C’est un spécialiste en Fecal incontinence et non en linguistique comme je m’y attendais, qui avait évalué mon dossier. Cela a fait scandale. J’avais alors dit de ne pas me prendre pour de la merde. Je vous raconte cela car ça a un lien direct. Je pensais qu’ils avaient compris, à l’université. Il se trouve que non. C’est la deuxième fois. J’espère qu’il n’y aura pas de troisième fois.

Qui vous a pris pour de la merde ?
Ceux qui dirigent et contrôlent le système, qui pensent pouvoir disposer de la dignité des gens comme bon leur semble et être propriétaires des institutions publiques de notre pays. Les deux personnes concernées se reconnaîtront. J’ai demandé au council de situer les responsabilités et de prendre les sanctions qui s’imposent. Il y a des bluffmasters à l’université.

Vous visez qui ?
Je ne vais pas dévoiler d’identité ici. Une archive de l’express en date du 7 septembre 2010 en dit long sur eux. Déjà, à l’époque, au moment de la mise en oeuvre de l’académie Kreol et de l’orthographe, ils commentaient dans l’express entre guillemets : ces minoritaires intellectuels et pédagogues qui défendent le créole.

Mais n’y-a-t-il pas d’autres moyens que de descendre dans la rue pour régler tout ça ?
J’ai dénoncé une injustice. Soit l’institution la réparait vite, soit on allait descendre dans la rue. Je suis toujours étonné par le fait que des gens supposément intelligents sous-estiment la capacité d’indignation des petites gens. Je viens de Sainte-Croix. Ma mère a été servante. Mon père, maçon. Les «bla bla», ça ne passe que chez les bourgeois. Ma dignité n’est pas à vendre.

Des gens dans la rue, ça aurait pu dégénérer...
Oui. Cela aurait pu être un second février 1999. Il est temps de comprendre qu’il y a des gens à Maurice qui sont devenus des symboles qu’on ne peut toucher. Je ne veux pas être un symbole. Mais, désolé, j’en suis un, malgré moi. Beaucoup de personnes l’ont compris. Le gouvernement l’a compris.

Justement, si vous n’aviez pas saisi le bureau du Premier ministre, auriez-vous décroché ce poste aujourd’hui ?
En vérité, je n’ai pas sollicité le PMO. C’est le conseiller du Premier ministre, Jean-François Chaumière, qui m’a contacté au lendemain de l’article paru dans le Mauricien.

Que vous a-t-il dit ?
Il m’a dit que le gouvernement est extrêmement embarrassé avec ce qui se passe et qu’il s’est entretenu avec la ministre de l’Éducation. Je l’ai rassuré que je n’ai fait aucun lien avec son PMO until further notice. Rassuré de cela, il est revenu vers moi pour me dire de ne pas m’inquiéter et que justice serait faite. Je savais déjà à ce moment-là que des directives seraient données pour régler tout ça au plus vite et que ma nomination me serait communiquée aujourd’hui (NdlR, mercredi). C’est ce qui est arrivé.

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