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Renouer avec l'espérance d'un certain 13 décembre 2015... (3è partie)

Raphaël CONFIANT
Renouer avec l'espérance d'un certain 13 décembre 2015... (3è partie)

   Au matin du deuxième tour des élections de la CTM (Collectivité Territoriale de Martinique), le dimanche 13 décembre 2015, l'anxiété des militants du GRAN SANBLE était palpable et contrastait avec l'optimisme de ceux de leurs alliés tout neufs de BA PEYI-A AN CHANS. Les deux composantes de la coalition, la première réunissant indépendantistes-autonomistes-écologistes, la seconde gens de droite et du centre, avaient, une semaine plutôt signé un "pacte de mandature" à la stupéfaction générale des journalistes et commentateurs politiques, de la coalition adverse, le PPM/EPMN et, il faut bien le dire, de nombre de militants du tout nouveau GSPBPAC (GRAN SANBLE POU BA PEYI-A AN CHANS), acronyme imprononçable dont se gaussaient les journalistes. Pourtant, la campagne pour le deuxième tour avait attiré presqu'autant de monde que la première, même si certaines bouderies de personnes proches du mystérieux G20 avaient déjà commencé à se manifester ici et là. Signes avant-coureurs d'une fronde contre les "vieux" qu'on n'avait pas réussi à écarter, fronde qui n'osait toutefois pas encore se déclarer au grand jour.

   L'une des sources de préoccupations des militants du GSPBPAC était la fameuse prime de 11 sièges attribuée à la liste gagnante (celle qui recueille la majorité absolue des suffrages exprimés), les sièges restants étant attribuées au pro-rata de leur score à toutes les listes ayant obtenue au moins 5% des suffrages. Alfred MARIE-JEANNE et Claude LISE étaient plusieurs fois montés au créneau pour s'opposer à cette mesure qu'ils jugeaient à la fois inique et anti-démocratique. 3 ou 4 sièges de prime leur semblait amplement suffisant. Tel n'avait pas été du tout l'avis de S. LETCHIMY et du PPM qui avaient été à l'origine de ladite mesure, sûrs et certains qu'ils étaient de pouvoir remporter haut la main la toute première élection de la CTM. Mais, comme la suite devait le montrer, tel est pris qui croyait prendre !

   Si donc la mobilisation du GSPBPAC durant l'entre-deux tours avait démontré, au fil des jours, l'adhésion du plus grand nombre des militants des deux bords de la coalition à la stratégie mise sur pied par le tandem MARIE-JEANNE/MONPLAISIR, il suffisait d'une courte, voire d'une très courte défaite, pour se retrouver dans une opposition dépourvue de tout pouvoir et de toute audience puisque la loi prévoyait la mise en place non plus une commission permanente dans laquelle l'opposition était représentée comme dans l'ancien Conseil régional, mais un conseil exécutif monocolore, sorte de mini-gouvernement local.

    A mesure que s'écoulait cette journée électorale du 13 décembre, il devenait clair pour tous les observateurs que l'abstention serait beaucoup moins forte qu'au premier tour, chose certes classique dans presque toutes les élections, mais lourdes d'inquiétudes pour les états-majors. Cette mobilisation résultait-elle d'une sorte de dynamique créée par l'alliance entre le GRAN SANBLE et BA PEYI-A AN CHANS ou au contraire signalait-elle un raz-de-marée du PPM/EPMN ? Le GSPBPAC et son leader, Alfred MARIE-JEANNE avaient misé sur la dynamique en question, mais c'était là un pari risqué car jamais dans l'histoire politique de la Martinique, deux mouvances aussi éloignées l'une de l'autre n'avaient conclu d'alliance électorale. Même le fameux "bout de chemin avec l'Usine" du député socialiste Joseph LAGROSILLIERE au début du XXe siècle n'était pas allé aussi loin. Du côté du PPM/EPMN, on faisait confiance aux 23 maires (sur 34) qui se réclamait du lui pour apporter leur électorat communal au service du vote territorial. Cet ancrage municipal était même l'un des arguments forts qui avait été martelé durant toute la campagne : "Nous avons l'essentiel des maires de la Martinique avec nous !". 

   Puis, le soleil se coucha et une pluie-fifine se mit à tomber sur la Place du Nègre marron au Lamentin, à quelques encablures de la permanence du député qu'était alors Alfred MARIE-JEANNE. Le dépouillement commença dans toutes les communes de l'île et très vite, radios et télés se mirent à égrener les premiers résultats. En télévision, certains grands commentateurs ne virent pas venir le coup, trompés qu'ils furent ou alors grisés par les toutes premières remontées qui donnaient partout le PPM/EPMN en tête. Sauf qu'il s'agissait en fait des plus petites communes (Ajoupa-Bouillon, Morne-Vert, Prêcheur, Macouba etc.) et que les résultats en question ne pouvaient en aucune façon donner une radiographie ou une tendance dominante du vote. Ces premiers résultats eurent cependant l'effet d'une douche froide, ajoutée à la pluie-fifine, sur les militants du GSPBPAC rassemblés sur la Place du Nègre marron. L'inquiétude se mit à enfler et les visages se firent ternes. D'autant que sur certaines radios, des élus ou des militants du PPM/EPMN, beaucoup trop pressés, se risquaient déjà à pronostiquer leur victoire...

   Enfin, les résultats des grosses communes se mirent à tomber et là ce fut un véritable coup de massue tant pour le PPM/EPMN que pour les journalistes et commentateurs comme Eddy MARAJO qui avaient pronostiqué l'inverse. L'argument sans cesse martelé de "l'alliance de la carpe et du lapin" visant à discréditer le GSPBPAC n'avait donc pas fonctionné ! Hormis à Fort-de-France, la liste conduite par Alfred MARIE-JEANNE écrasait partout son adversaire, y compris dans les communes tenues par les fameux "23 maires". De toute évidence, l'électoral communal ne s'était pas plié aux injonctions de leur premier édile, même pas dans la ville du Lamentin, tenue pourtant par le deuxième parti le plus important de la coalition EPMN à savoir BATIR LE PAYS MARTINIQUE. C'était même une déroute, une véritable Bérézina qu'était en train de subir ceux qui s'imaginaient déjà diriger la future Collectivité Territoriale de Martinique.

   Final de compte, le résultat final fut proclamé. Résultat sans contestation possible. Résultat net et sans bavure.

 

   . GRAN SANBLE POU BA PEYI-A AN CHANS : 54,4% des suffrages.

 

   . PM/EPMN : 45,86%.

 

   CHABEN venait là de gagner son pari jugé fou par beaucoup. Son coup de "serbi" avait sorti le chiffre "11". Sur la Place du Nègre Marron où la foule avait encore grossi, ce fut alors un véritable délire. Puis, les leaders des différents partis du GSPBPAC firent leur apparition, main dans la main, alors que la pluie-fifine menaçait de se transformer en pluie battante. MARIE-JEANNE, MONPLAISIR, LISE, CAROLE, BOUTRIN, BRANCHI, LEOTIN, LAVENTURE et tous les autres se frayaient difficilement en chemin au mitan d'une foule qui à se livrer à un véritable "vidé", scandant "CHABEN ! CHABEN !", bien consciente qu'elle était que le principal artisan de cette victoire n'était autre qu'Alfred MARIE-JEANNE. 

 

   Il est cependant nécessaire d'examiner de plus près tous les chiffres concernant cette victoire "non annoncée" du couple formé par "la carpe et le lapin" selon l'expression sarcastique des leaders du PPM/EPMN. D'abord en termes de voix, on s'aperçoit que 147.736 électeurs, soit 47,62% des électeurs inscrits, n'ont pas jugé bon de se déplacer, ce qui est énorme (il y avait déjà eu 58,82% d'abstentions au premier tour). Soit presque la moitié des Martiniquais en âge de voter !!! D'aucuns argueront du fait que l'abstention est traditionnelle chez nous, certes, mais tout de même, on votait pour une toute nouvelle collectivité qui remplacerait le Conseil régional et le Conseil général. Une nouvelle collectivité allait se mettre en place et cela n'intéressait pas du tout presque la moitié des Martiniquais ! Faut-il y voir le signe d'une défiance envers les politiques de tous bord ? Sans doute. En effet, quel que soit le parti au pouvoir, le nombre de chômeurs, pour ne prendre que ce seul exemple, reste quasiment identique (autour de 40.000 environ). A quoi bon aller voter donc ?

   Deuxième donnée chiffrée intéressante à examiner : l'écart des voix entre le PPM/EPMN et le GSPBPAC d'un tour à l'autre. Cet écart permet de comprendre immédiatement que le "pacte de mandature" du GSPBPAC  avait bel et bien créé une formidable dynamique puisque la liste conduite par "CHABEN" gagne 47.018 voix au 2è tour passant de seulement 36.523 suffrages au premier à...83.541. A l'inverse, la liste conduite par LETCHIMY, sans faire du sur place, n'avait gagné qu'un modeste 23.774 voix, passant de 47.002 voix à 70.776. L'analyse selon laquelle le PPM/EPMN avait presque fait le plein de ses voix au premier tour n'était donc pas totalement infondée. En créole, cela s'exprime par l'expression "Prèmié so pa so" autrement dit "Le premier saut n'est pas forcément le meilleur". Enfin, toujours au niveau des chiffres, l'injuste prime de 11 sièges (défendue par LETCHIMY, rappelons-le !) attribuée au gagnant faisait que le GSPBPAC raflait 33 sièges (soit 64,70%), n'en laissant que 18 (soit 35,30%) au PPM/EPMN. Alors que seulement 12.675 voix séparaient les deux listes !

   "CHABEN" venait donc de gagner son audacieux pari. Contre toute attente. Contre ses adversaires mais aussi contre ceux qui, dans son propre camp, l'avaient jugé trop "vieux". Contre nos grands journalistes et éminents commentateurs politiques qui avaient pronostiqué, dès avant le premier tour d'ailleurs, la victoire de S. LETCHIMY, et qui, au second tour, en furent pour leurs frais...         (A suivre)

 

Commentaires

Véyative | 28/12/2017 - 05:25 :
Cette histoire est belle. Personnellement je crois toujours à leur réussite à la CTM, je crois que la mandature peut se terminer en apothéose.Ils sont juste en train de faire des fondations, comme une maison en construction.

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