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Renouer avec l'espérance d'un certain décembre 2015...(2è partie)

Raphaël CONFIANT
Renouer avec l'espérance d'un certain décembre 2015...(2è partie)

   Au soir du premier tour du scrutin pour l'élection de la nouvelle Collectivité Territoriale de Martinique (CTM), comme nous l'avons vu dans notre article précédent, le 6 décembre donc, le moral n'était pas des plus hauts dans le camp du "GRAN SANBLE" avec son modeste score de 30,38% des voix tandis que l'on jubilait dans le camp adverse, le PPM/EPMN, qui, lui, avait recueilli presque 39% des voix (38,96% très exactement). En effet, rattraper quasiment 10 points semblait improbable, sinon impossible aux yeux de nombreux militants de la coalition indépendantiste-autonomiste-écologiste qui s'étaient donnés corps et âme pendant deux mois à travers toute la Martinique. A la télévision, tous les experts, notamment Eddy MARAJO et Justin DANIEL, donnaient le "GRAN SANBLE" perdant au second tour. Quant au PPM/EPMN, il était si sûr et certain de sa victoire qu'il dédaigna toute offre d'ouverture de sa liste à d'autres composantes de la gauche, aux fameuses "petites listes" qui, pour certaines comme NOU PEP LA (6,4%), avaient réalisé un score honorable.

   "Chronique des sept misères" donc pour le GRAN SANBLE et "Chronique d'une victoire annoncée" pour le PPM/EPMN...

   C'est alors qu'Alfred MARIE-JEANNE, autrement dit "CHABEN" pour ses supporters, fit un coup de "sèbi", ce jeu de dés aux règles complexes et à vrai dire ésotériques que les "Vié Neg" jouaient autrefois lors des fêtes patronales. Il décida de proposer une alliance à la...droite pour le second tour, droite conduite par Yan MONPLAISIR qui avait réalisé un bon score quand on sait l'état de capilotade dans lequel se trouve cette mouvance politique en Martinique depuis une quinzaine d'années, sinon plus. L'autre "Chaben", MONPLAISIR donc, venait de rafler 14,2% des suffrages.

   Coup de dés d'autant plus osé que lorsque l'on additionnait les scores du GRAN SANBLE et de BA PEYI-A AN CHANS, le rassemblement des diverses tendances de la droite et du centre conduite par MONPLAISIR, on était loin du compte.Assez loin du compte même puisque le total ne dépassait pas de manière significative le score réalisé par le PPM/EPMN. En effet, les 30,28% du GRAN SANBLE + les 14,2% de BA PEYI-A AN CHANS faisaient 44,5% des voix contre quasiment 39% pour le PPM/EPMN. Or, il y avait eu une abstention importante (41,65%) et chacun sait que si, comme dans toute élection, elle constitue un réservoir de voix dans laquelle puiser, il s'agit aussi d'un électorat indécis, très volatile, sur lequel il est imprudent de tabler.

   Sans compter qu'il y avait un autre problème : comment les militants, tous de gauche, du GRAN SANBLE, prendraient-ils une alliance avec la droite jugée assimilationniste par les uns, archaïque, par les autres ?...

     Et puis, autre question : la droite accepterait-elle de faire alliance avec des gens qu'elle qualifie régulièrement de "séparatistes", voire d'"anti-français" ? Certes, elle n'avait que trois possibilités face au second tour. Soit ne s'allier avec aucune autre liste encore en course et donc disparaître complètement du paysage politique, se condamner à n'avoir aucun élu dans la nouvelle assemblée ; soit s'allier avec le PPM/EPMN, chose hautement improbable quand on sait la virulence avec laquelle celui-ci dénonçait Yan MONPLAISIR (d'ailleurs, dans une sorte de prescience, six mois avant l'élection, Serge LETCHIMY, dans un discours prononcé lors d'un rassemblement du PPM à Sainte-Luce, avait dénoncé "l'alliance du bakoua" autrement dit l'alliance MARIE-JEANNE/MONPLAISIR. Il ne croyait pas si bien dire !) ; soit s'allier avec le GRAN SANBLE.

   Choix hautement cornélien comme on le voit. En politique habile, MONPLAISIR avait laissé entendre qu'il serait d'accord pour une alliance avec l'une ou l'autre liste"dans l'intérêt de la Martinique". N'ayant reçu de proposition d'alliance que du GRAN SANBLE, les responsables de deux coalitions, BA PEYI-A AN CHANS et GRAN SANBLE, se sont alors réunies, sous la houlette d'Alfred MARIE-JEANNE, pour discuter d'un accord, d'un "pacte de gestion" de la nouvelle collectivité...

   Les discussions, qui furent rudes, durèrent de 9h du soir à presque 2h du matin et son racontées dans l'ouvrage "DECEMBRE 2015. UNE NOUVELLE PAGE DE L'HISTOIRE DE LA MARTINIQUE" (Caraibéditions) co-écrit par L. BOUTRIN et R. CONFIANT. Final de compte, un accord fut signé et le GSPBPAC (GRAN SANBLE POU BA PEYI-A AN CHANS) était né. Plusieurs mois après, S. LETCHIMY déclarera sur Radio SUD-EST qu'il s'agissait d'un coup monté à l'avance pour la simple raison que les expressions créoles "GRAN SANBLE" et "BA PEYI-A AN CHANS" s'emboitaient beaucoup trop bien. Et ajouta-t-il, monté dans le bureau de Nicolas SARKOZY à Paris en plus !!! Cela est totalement loufoque évidemment ! Car les discussions connurent plusieurs interruptions de séance et même faillirent capoter à diverses reprises, notamment à cause de personnes de la droite dure qui voyaient avec horreur une alliance avec leurs ennemis jurés de toujours, les indépendantistes. Mais là encore, la science et la sagesse de MARIE-JEANNE ajoutées à celle de MONPLAISIR (et de ses colistiers Miguel LAVENTURE, de Marinette TORPILLE, de Karine MOUSSEAU etc.) auxquelles vinrent s'ajouter celles de Daniel MARIE-SAINTE, Louis-Félix DUVILLE, Francis CAROLE, Claude Lise, Michel BRANCHI, de Marie-Hélène LEOTIN et Louis BOUTRIN, permirent à cet accord de voir le jour. Et cette expression était presque appropriée puisqu'on allait sur les 2h du matin au moment de sa signature... 

 

   Cet accord entre le "GRAN SANBLE d'une part et BA PEYI-A AN CHANS de l'autre prit la forme d'un contrat de mandature", expression indiquant que l'objectif de cette alliance inédite était d'abord et avant tout de gérer la Martinique ou plus exactement de la redresser après cinq longues années de règne du PPM/EPMN. Le slogan favori tout au long de la mandature de ce dernier avait été "LA MARTINIQUE AVANCE", mais chacun constatait que cette dernière n'allait nulle part. Chantier du TCSP ? Bloqué ! Chantier de transformation de l'ex-Maternité de Redoute en lycée de transit pour loger les élèves du lycée Schoelcher ? Bloqué ! Courbe du chômage ? N'a jamais baissé ! Projets du "Grand Saint-Pierre" et de "L'Embellie des Trois-Ilets" ? De l'imaginaire ! Sans compter tous les scandales ayant émaillé ladite mandature et le soutien pour le moins scandaleux de S. LETCHIMY et du PPM aux mafieux du CEREGMIA qui ont détourné 14 millions d'euros de subventions européennes au détriment de notre université.

   La Martinique n'avançait donc pas du tout et cela un grand nombre de Martiniquais le ressentait. Mais en bonne logique, un "contrat de mandature" signifiait que la revendication institutionnelle devait être provisoirement mise de côté, pilule un peu difficile à avaler du côté de certains indépendantistes, mais dont ils finirent par s'accommoder puisqu'à moins d'être complètement aveugle, chacun voit bien que la majorité des Martiniquais, tout en étant très insatisfaite du système en place, n'est pas encore prête à faire le grand saut...

 

 

   Evidemment, gros coup de tonnerre à l'annonce de la signature de ce contrat de mandature entre la coalition indépendantiste-autonomiste-écologiste du GRAN SANBLE et les diverses tendances de la droite et du centre rassemblées dans "BA PEYI-A AN CHANS" ! Stupéfaction chez les journalistes et autres commentateurs politiques ! Déchaînements de sarcasmes et d'anathèmes du côté du PPM et de NOU PEP LA ! La Martinique venait de vivre un petit séisme de force 4 sur l'échelle de Richter politique et nul ne savait qu'une semaine plus tard, elle en vivrait un deuxième de force 8. Les plus virulents furent tout naturellement les PPM/EPMN qui parlèrent de "l'alliance de la carpe et du lapin", accusèrent MARIE-JEANNE de déviationnisme politique et de trahison de son idéal indépendantiste. A ce moment-là, dans l'entre-deux tours de l'élection donc, entre le 6 et le 13 décembre 2015, personne ne misait un penny sur le GSPBPAC (GRAN SANBLE POU BA PEYI-A AN CHANS), y compris parmi certains militants du GRAN SANBLE encore désarçonnés par le coup de "sèbi" joué par CHABEN. Nos grands journalistes, commentateurs politiques et autres politologues en faisaient même des gorges chaudes sur les ondes ou les plateaux-télé, assurant que "le peuple ne marcherait pas dans une telle combine" ou que "MARIE-JEANNE venait de tuer le camp patriotique et MONPLAISIR d'étrangler la droite".

   Dans cet entre-deux tours, le PPM/EPMN continuait de plus belle à parader, sûr et certain de sa victoire aux second tour contre la carpe et le lapin. Mais par mesure de prudence tout de même, on attribuait des primes à des petits copains dans des organismes dépendant de la Région comme au Parc Naturel et l'on embauchait à tout va dans les quelques quatre-vingt organismes dépendant de celle-ci. Du côté du tout nouveau GRAN SANBLE POU BA PEYI-A AN CHANS, la campagne électorale repartit, mais avec un moindre enthousiasme qu'au premier tour, la crainte de la défaite s'insinuant sournoisement dans l'esprit de beaucoup. On nota toutefois la participation "très réglo", selon le mot qui revint fréquemment, de la droite aux différents meetings et aux propos mesurés et constructifs de ses représentants, ce qui en surprit plus d'un, habitué qu'on était à les diaboliser dans le camp dit patriotique. La droite n'avait donc pas signé cet accord de mandature juste pour tenter de se refaire une santé, mais pour porter sa contribution au déblocage d'abord, puis au redressement de la Martinique. Cela fit taire les dernières oppositions à l'alliance avec elle et les militants du GSPBPAC mouillèrent leurs chemises dans la dernière ligne droite.

   Mais une inquiétude demeurait tout de même : que ferait le peuple dans le secret de l'isoloir le dimanche 13 décembre 2015 ? Les quelques 41% d'abstentionnistes se décideraient-ils à sortir de chez eux ?      (A suivre)

 

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