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TOURISME A LA MARTINIQUE

Nady NELZY-ODRY
TOURISME A LA MARTINIQUE

Les intempéries des mois d’aout et septembre derniers  ont ravagés les îles de l’Arc caribéen et  en ont épargné d’autres. Nous fûmes de ceux là, Dieu merci !

En cette fin de l’hivernage, février entraine dans son sillage sa cohorte des  carnavaliers, en même temps que des visiteurs nouveaux,  heureux d’avoir eu à éviter la sévérité de l’hiver européen. Français, Italiens, Anglais, belges, Allemands arrivent, le cœur rempli de fraternité et de magnanimité. La première visite est pour les flancs du volcan, découvrir ce qui reste de la nuée ardente qui rasa  la ville capitale du Nord Caraïbe.

 Accompagnatrice d’un groupe que j’avais formé à la découverte de Saint Pierre, une ville pour laquelle je dois le dire j’ai une tendresse particulière, ma joie fut  profonde en remarquant Nos guides.  Une jeunesse martiniquaise diplômée pour  les visiteurs dans notre ville d’Art et d’Histoire. Nous commençons par les flancs du volcan,  un ami volcanologue  s’émeut « C’est  une ville fantôme, faite pour hanter, diaphane comme aux portes de l’oubli. Pourtant poursuit-il, Saint Pierre est le témoin de l’histoire des Sciences et de l’histoire coloniale, on ne le dit pas assez dans l’Hexagone  ».

En arrivant  au petit musée de Saint Pierre, je suis comblée, la jeune femme qui nous reçoit est aussi charmante qu’elle est compétente. Son verbe est clair, chacun des mots qu’elle prononce est précis, Dans son discours, il n’y a pas de place pour l’historiette, mais plutôt un exposé loyal de ce que fut la ville de Saint Pierre avant 1902 .

Mon  plaisir se poursuit tout le long de la visite. Nous sommes reçus à la Maison de la Bourse par une autre jeune personne magnifique et diplômée.  Attachée au service du patrimoine, aucun vestige du « Petit Paris », aucune ruine du bâti de la ville Capitale ne lui est étrangère. Elle nous fait une description précise de l’héritage architectural en nous évoquant les contours d’un style antillais et cette valeur esthétique qui donne naissance aux galeries, aux vastes auvents, aux maisons largement ouvertes à la brise et aux rayons du soleil, tout cela  au milieu d’une végétation et d’une chaleur humide.

Mon plaisir n’est pas feint de voir qu’en dépit des freins que, nous-mêmes, nous nous posons, la vie continue.  Notre jeunesse ne réclame plus son du, elle le prend.  

Aussi lorsque au cours de nos pérégrinations au centre de la ville, après s’être ébahis sur la curieuse rue monte au ciel, nous parvenons rue  Levassor,  la partie la plus riante, la plus fraîche et à l’époque, la plus salubre de Saint Pierre.

Ce quartier contient  les ruines de l’hôpital de la Charité, ex maison des aliénés, Curieusement, un silence religieux  se fait parmi le groupe de visiteurs

 Au beau milieu d’une verdoyance paisible  animée par  les chants d’oiseaux et le bruit du torrent de la Roxelane, le lieu est  particulièrement beau. Je suis accompagnée de la petite fille d’Hub, en vacance chez son grand-père,

A trente ans, Inès la déesse, est psychologue, dans une grande ville de France, attachée à un service traumatologique des accidentés de la route. Le site l’impressionne et la touche peut-être plus que les autres visiteurs. Inès a, en effet, beaucoup étudié sur la folie des gens des  îles, particulièrement ceux que l’on nomme les « créoles, ni blanc, ni noir ». Elle me dit que très peu d’esclaves connaîtront cette maison, les frais d’hospitalisation étant à la charge des maîtres. Pourtant son succès rapide conduit à son agrandissement. Dès 1843, une maison attenante est achetée, portant sa capacité totale à 80 lits. Après 1848, date de l’abolition de l’esclavage, les émancipés pourront être pris en charge, dons et financement par l’Assistance publique.   Et moi,  je suis baba de l’humilité et de tout le savoir de cette toute jeune femme qui n’est autre que ma petite fille.   

Les ruines de la Maison de Santé,  laissent imaginer  une énorme bâtisse en pierre et en brique, construite sur  trois niveaux au moins. L’hôpital fut construit en 1838 par rapport à la loi de Juin de la même année  dite « loi d’humanité »  Une cour pavée s’ouvre sur un  quartier d’isolement pour les nouveaux arrivants et les plus turbulents. Il  est voisin d’un espace à ciel ouvert,  occupé par des bassins en pierre pour des bains et où se traite la maladie de la folie par l’hydrothérapie, un traitement renommé pour sa modernité et son efficacité.

 La douceur des  jardins qui séparent les salles de soins et  des dortoirs, laisse penser qu’ici on est bien loin des « maisons de fous », où la violence et les brimades étaient  les premiers traitements.  Les ruines de ce site sont si chargés que des visiteurs sensibles sont comme moi, émus aux larmes.

 J’ai l’impression que  toutes ces âmes, face à la brusquerie de l’évènement, asphyxiés, elles  n’ont pas eu le temps de souffrir de la nuée ardente. Au-delà du temps qui passe, leur présence  nous accompagne dans notre visite.

Nous quittons Saint Pierre, mus d’émotion après une journée de découverte, Ceux qui ont fait la visite de la ville,  demande une halte pour « assimiler » tout ce qu’ils ont vu et qu’ils n’auraient jamais imaginé.  

 Quant à moi, je réfléchis à cette activité économique que l’on nomme « Tourisme » et que nous  appelons de nos vœux, Je  me pose une  question qui ne me quitte jamais. Même si à la Martinique  le soleil et la mer, les champs de canne à sucre, les jardins fantastiques, le parc régional  fabuleux, n’ont rien à envier aux autres îles de l’Arc Caribéen, Je crois sincèrement que nous sommes en capacité d’avoir des programmes de visite différents,  intenses et riches.

Ici, le visiteur n’a pas d’autres choix que d’aimer notre pays qui surprend par sa particularité de marier l’inconciliable, sa beauté et le péché originel de l’esclavage. La réalité martiniquaise fascine, bouleverse et captive, non pas  par  des musées fascinants,  ni en ruines grandioses, mais quelque chose, comme dirait l’autre, qui de l’ordre évident ne déplacera rien, mais qui laisse découvrir la beauté de l’humanité ….    

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