Obélix fils de René Goscinny et d’Albert Uderzo, eut la chance de basculer dès sa naissance dans un grand chaudron de potion magique qui heureusement pour lui devait être froide car il aurait été cuit, sa renommée avec, et nul n’en parlerait. Il fut donc bien tombé.
J’ai eu comme lui la petite chance d’être moi aussi bien tombée, en débarquant sur terre dans la bibliothèque de mon père qui possédait un violon d’Ingres : l’homme aimait lire et avait le goût du partage. C’est ainsi que nous eûmes nos lectures à faire, et d’autres à ne pas faire comme celle de L’Amant de lady Chatterlay dont mon père en nous montrant le livre nous ordonna de ne pas y toucher. Inutile de dire que nous avons cherché et trouvé la cachette. Et, bravant le danger, nous l’avons lu. Pourquoi ne fallait-il pas le lire ? Il nous fallait le découvrir. Il nous fallait le lire, pour savoir, pour connaître.
Lire, il nous fallait lire et venir raconter nos découvertes à notre mère qui en faisait le contrôle. Avec un livre, on fait le tour du monde, disait elle.
La comtesse de Ségur, Sophie Rostopchine, nous raconta tous ses malheurs, elle nous parla aussi de l’Auberge de l’Ange gardien, des Petites Filles modèles, des Mémoires d’un âne, et du Général Dourakine.
Nous ne ne fûmes pas fan du Club des cinq de la série Rose et verte. trop puéril peut-être.
Cependant, Le blé en herbe de Colette se présenta avant que ne s’impose avec l’âge, le volumineux Comte de Monte-Cristo, roman sans illustration comptant 798 pages, en livre de poche, qu’il fallait lire, absolument. C‘est alors que me vint l’idée de cette stratégie : lire le début, lire la fin et réfléchir pour imaginer l’intrigue qui avait pu construire l’épilogue. Je me mettais alors à me faire mon propre dénouement, avant de me relancer dans la lecture de l’ouvrage. Je procédai ainsi pour tous les livres de Dumas. Peut–être est-ce lui qui m’a donné par la suite le goût de l’écriture, celle de la réflexion, de l’évasion scripturale, de la construction littéraire. Je le pense.
Il faut dire aussi que les cadeaux de ma tante étaient encore des livres. Les douze travaux d’Hercule, une histoire de Cherry Ames infirmière à bord d’Hellen Wells (1910-1986). Cherry Ames est le personnage d’une série de romans policiers ayant comme base les milieux hospitaliers, mais, l’ouvrage important, celui qui à mon avis a réveillé en moi le goût de la belle poésie s’appelle : Une saison au paradis de Breyten Breytenbach.
En plus des notes de voyage de cet exilé qui jette un regard intérieur et extérieur, sur son pays, on découvre les souvenirs de son enfance, ses réflexions qu’il illustre par des poèmes parlant de sa terre déchirée : l’Afrique du sud de l’Apartheid.
Dans toute sa simplicité ce texte Une saison au paradis de Breyten Breytenbach m’a littéralement subjugué, et je crois qu’avec Alexandre Dumas dont je suis redevable pour la construction d’un texte, je lui dois, lui aussi, beaucoup pour la beauté d’écrire. Merci à mes parents qui ont su m’ouvrir grandes les pages des livres, et merci à mes lecteurs pour leur confiance.
Térèz Léotin