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VICTOIRE DE VALERIE PLANTE: DES LEÇONS POUR LES CHEFS A QUEBEC

Alec Castonguay
VICTOIRE DE VALERIE PLANTE: DES LEÇONS POUR LES CHEFS A QUEBEC

La jeunesse et le message portent davantage que le bilan. Alec Castonguay identifie quatre leçons à retenir de l’élection municipale, en vue du scrutin provincial de l’an prochain.

La victoire de la première mairesse de l’histoire de Montréal envoie plusieurs messages que les chefs des partis provinciaux à Québec ont tout intérêt à comprendre avant le scrutin de 2018. Inattendue – dans le sens où encore cet été, Denis Coderre semblait indélogeable – l’élection de Valérie Plante s’appuie néanmoins sur des courants politiques forts.

Voici quatre leçons à retenir pour les chefs à Québec:

Leçon 1 : ne pas faire campagne sur son bilan

Cela peut sembler une évidence, mais Denis Coderre a commis une erreur de base: en politique, faire campagne essentiellement sur son bilan est hasardeux, voire suicidaire. Celui du maire sortant était pourtant bon : élan économique, taux de chômage le plus bas des dernières décennies, rayonnement international, statut de métropole, projet du REM en marche, finances en ordre, etc. Il a raison de dire qu’il part la tête haute.

Mais le bilan, c’est la fondation d’une campagne, pas sa structure, et encore moins son coeur. Il faut ajouter des propositions, un peu d’inspiration et de rêve. On peut juger que le concept des promesses électorales est périmé, mais c’est à ça qu’elles servent : à tracer les contours de la maison dans laquelle les électeurs vont habiter pendant quatre ans. À montrer la couleur des murs.

«Je ne veux pas savoir ce que tu as fait, je veux savoir ce que tu vas faire!», serait le slogan des électeurs pendant une campagne.

La campagne de Projet Montréal était plus inspirante, plus détaillée, plus précise, même si certaines propositions ne verront probablement jamais le jour (ne retenez pas trop votre souffle pour la ligne rose du métro, disons…)

Le message est très clair pour Philippe Couillard, qui profite d’un bon bilan économique, avec un taux de chômage à un creux historique, une économie qui performe bien, des surplus importants dans les caisses de l’État… Et alors? vont se dire plusieurs électeurs.

La nouvelle édition du magazine L’actualité, qui arrive en kiosque cette semaine, sera d’ailleurs à lire pour ceux qui souhaitent comprendre à quelle humeur électorale fait face le gouvernement libéral sortant à un an des prochaines élections. On entend le tonnerre qui gronde au loin.

 

En route pour aller visiter son équipe de campagne dans Rosemont, sous la pluie et le vent.

Éric Demers

La garde rapprochée de Philippe Couillard sait qu’elle doit éviter la gaffe de Coderre. Mais contrairement au maire sortant, qui pouvait se penser à l’abri cet été, les sondages difficiles pour le PLQ servent déjà d’alertes météo. Pendant la campagne municipale, un proche du premier ministre me confiait vouloir éviter de faire comme Jean Charest en 2007 et Denis Coderre cette année. «On ne fera pas campagne sur notre bilan», m’a-t-il dit, conscient que la fatigue du pouvoir joue contre l’équipe libérale.

Le premier ministre a envoyé le message à ses troupes : il faut plancher sur de nouvelles idées. Déjà, en juin 2016, lors d’une entrevue à son bureau de Montréal, Philippe Couillard m’expliquait vouloir éviter ce piège. «Les élections à date fixe nous mènent en précampagne des mois avant le vote. Si on veut être réélus, il va falloir présenter un nouveau projet, soutenait Philippe Couillard. Nous aurons un bilan positif dont nous pourrons être fiers, mais ne faisons pas l’erreur de penser qu’une élection se joue sur la qualité d’un bilan.»

Le verdict à Montréal ne saurait être plus clair.

Leçon 2 : les «voies ensoleillées» marquent des points

La victoire de Valérie Plante ne repose toutefois pas entièrement sur ses idées, mais également sur sa personnalité et sur la manière dont elle fait de la politique. La mairesse de Montréal est spontanée, pétillante, souriante. Elle se déguise à l’Halloween, aime prendre le métro avec les Montréalais et regarde celui à qui elle serre la main comme s’il était la personne la plus importante du monde.

Bref, elle semble adorer son travail ! Le contraste avec celui que certains commentateurs ont fini par surnommer «Monsieur Baboune» en fin de campagne était saisissant.

Il y a bien sûr de nombreux moments pour être sérieux en politique. Il faut s’adapter au contexte. Mais est-ce que la majorité du temps, ça doit ressembler à une visite chez le dentiste ? Ou à une négociation de convention collective ? Le monde va assez mal comme ça.

Lors de la course à la direction de Projet Montréal, plusieurs militants ont dénigré la candidature de Guillaume Lavoie en le comparant à Justin Trudeau. Belle gueule, photogénique, etc. Or, dans la recette victorieuse de Valérie Plante, il y a beaucoup des « voies ensoleilléesTM » de Justin Trudeau. Elle est même allée jusqu’à se rendre dans le métro au lendemain de sa victoire pour remercier les électeurs, comme Trudeau en octobre 2015.  Visiblement, les anciens stratèges du NPD qui l’entourent ont retenu la leçon.

Denis Coderre avait davantage de ressorts heureux en début de mandat. Dans les derniers mois, il avait perdu ce petit quelque chose qui permet de différencier l’authenticité et le marketing politique.

Dimanche, dans son discours de défaite, Denis Coderre a souhaité qu’on parle d’autre chose que de la Formule E lors de sa conférence de presse post-mortem. Or, cette course de voiture n’est pas en elle-même responsable de sa défaite; c’est la manière dont il a géré la controverse qui a contribué à le couler. Cette tempête a encapsulé tout ce que les gens reprochent à Denis Coderre : le manque de transparence, l’impossibilité de reconnaître ses erreurs, l’arrogance dans les réponses, le ton cassant de celui qui balaie du revers de la main les critiques sous prétexte qu’il est maire et qu’il sait, lui… C’était gris. Ça donnait l’impression qu’il était maire depuis 10 ans.

Il y a là une leçon pour François Legault, qui profite d’un élan dans les sondages. Sans se dénaturer — je le vois mal se déguiser — le chef de la CAQ doit s’inspirer davantage de Justin Trudeau et Valérie Plante, et moins de Thomas Mulcair ou Denis Coderre. Ce n’est pas parce que les électeurs sont insatisfaits et cherchent des solutions de rechange au gouvernement qu’il doit devenir Monsieur Colère pendant des semaines.

Il doit être le François Legault de la deuxième moitié de la campagne électorale 2014. Même si son parti avait chuté à 14 % dans les sondages, le chef de la CAQ gardait le sourire. Il semblait avoir lâché prise, bien vivre avec son programme et son équipe, et laisser les électeurs trancher, sans amertume. Il visitait des usines et des restaurants avec une bonne humeur que les journalistes ne s’expliquaient pas, étant donné que son parti semblait à trois semaines d’une dégelée qui pouvait signifier la mort de sa formation politique. On se serait attendu à ce qu’il soit d’humeur massacrante. Pas du tout.

À ce jour, je suis persuadé que cette attitude positive a servi de tremplin à sa remontée de fin de campagne. Ses deux bons débats des chefs n’auraient pas eu le même impact s’il avait passé les jours précédents à broyer du noir en public. Les électeurs lui ont jeté un second regard, ce qui est rare pendant une campagne.

Depuis 2015, le message des électeurs aux politiciens va dans le même sens : soyez en colère et sérieux quand c’est le temps.  Soyez heureux de faire votre job et de servir le public le reste du temps.

Leçon 3 : le virage jeunesse

Valérie Plante a 43 ans. À Ottawa, Justin Trudeau, à 45 ans, est maintenant le plus vieux chef des trois grands partis pancanadiens — Andrew Scheer et Jagmeet Singh ont chacun 38 ans. La classe politique semble dans un cycle de rajeunissement. La génération X s’installe au pouvoir.

De quoi faire vieillir prématurément les chefs des formations politiques qui n’ont pas pris ce virage jusqu’à présent.

Il n’est pas absurde de penser que les prochaines élections québécoises vont accélérer cette transition au sein des partis qui vont subir la défaite et devront se choisir un nouveau leader. Les militants qui n’ont pas encore pris note de cette réalité devront y regarder de plus près.

Ce n’est pas le seul critère, mais il est dans l’air du temps. Les électeurs cherchent du nouveau, et celui-ci s’incarne plus facilement dans une nouvelle génération.

De quoi ajouter à la déprime des partisans péquistes d’Alexandre Cloutier, et à la joie de ceux qui suivent Gabriel Nadeau-Dubois depuis son entrée en politique.

 

Philippe Couillard (2013) et François Legault (2011) sont à la tête de leur formation politique depuis plusieurs années, soit avant que cette vague de rajeunissement ne se manifeste aussi clairement — les membres du PQ ont choisi à deux reprises, en 2015 et 2016, de ne pas entamer ce virage.

Couillard, Legault et Lisée ne peuvent changer de génération, mais ils peuvent porter attention aux candidatures qui les entourent, afin d’offrir des personnalités différentes, plus jeunes, aux électeurs. Il ne s’agit pas de faire de l’âgisme : l’expérience doit être valorisée. Mais ce critère n’est pas le facteur décisif qu’il a déjà été pour les électeurs. La diversité générationnelle sera importante.

Leçon 4 : le canari dans la mine du PQ

La progression constante de Projet Montréal depuis quelques élections n’augure rien de bon pour le Parti québécois sur l’île de Montréal en 2018.

Les troupes de Valérie Plante ont davantage d’accointances militantes avec Québec Solidaire et le NPD qu’avec le PQ. Sans généraliser, une grande partie de la machine de Projet Montréal se mettra au service de QS dans des secteurs comme Hochelaga-Maisonneuve et Rosemont.

L’expérience des dernières années démontre qu’une fois implanté, Projet Montréal est difficile à déloger d’un arrondissement. Le vote de QS a montré la même résilience là où il y a des députés. Le chef du PQ et député de Rosemont, Jean-François Lisée, devra y porter une attention toute particulière.

Post-scriptum: 
Photo: La Presse canadienne/Paul Chiasson

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