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CAPES DE CRÉOLE SESSION 2008 : L'ÉPREUVE DE TRADUCTION

CAPES DE CRÉOLE SESSION 2008 : L'ÉPREUVE DE TRADUCTION

{ La session 2008 du CAPES de créole s'est déroulée début mars dans les 4 pays concernés (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion) ainsi que dans l'Hexagone. Rappellons que ce concours de recrutement de professeurs de créole pour l'enseignement secondaire existe depuis l'an 2002 et qu'il a d'abord offert 8 postes avant de descendre à 4 aujourd'hui.

Nous vous présentons ici le texte de l'épreuve de traduction.}
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Ministère Education Nationale

SESSION DE

2008

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_ Concours externe
_ De recrutement de professeurs certifiés
_ Et concours d’accès à des listes d’aptitude (Cafep)

Section : LANGUES REGIONALES

CREOLE

EPREUVE DE TRADUCTION

Durée : 4 heures

_____

L’usage de tout ouvrage de référence, de tout dictionnaire et de tout matériel électronique est rigoureusement interdit.

FERMETURE DE RYTHMES

A un âge inavouable, je reviens d’un voyage bref aux lieux où je suis né, deux ans après la mort de mon frère. Nulle âme qui vive portant notre nom n’habite l’espace où des champs et des routes ont pris la place de chantiers que traversaient, jadis et naguère, bateaux vers la rive et camion vers la ville, dont le bruit d’enfer faisait connaître à tous l’entreprise de famille. Pouvait-on y habiter ou prendre la route sans nous ? A trente kilomètres à la ronde, les murailles s’élevaient de l’orgueil de notre sable et les chemins y conduisaient sur la vigueur de nos cailloux cassés. Silence désormais pour l’appellation, maison vide, outils dissous dans la terre et l’herbe folle, avons-nous même vécu ici ? Né à la fin du siècle dernier, mon père a risqué sa vie et compromis sa santé dans une guerre atroce dont nous ne comprenons plus les enjeux et fondé une entreprise qui a disparu sans laisser aucune trace sur les bords de la Garonne ; il repose sous la terre qu’il aima en compagnie d’une femme dont nul ne se souvient plus. Cependant, rien n’a bougé, ni les lignes de l’horizon doux, ni le cours paradoxal de la rivière, ni la couleur sombre des alluvions, ni le rose des pêchers à la pointe du printemps, ni le type gascon aux traits fraternels : malgré une longue absence, je me reconnais plus que jamais issu d’ici. Dans cette constance stable, une période s’achève qui ne dura pas.

J’ai connu, enfant, une agriculture, une religiosité, une langue, mortes toutes trois et, plus tard, une marine, une culture, des façons de se conduire, toutes trois défuntes. En somme, le XXe siècle meurtrier s’écoula en un clin d’œil. Des fermes à toits ça et là effondrés, quelques églises fermées, des phrases devenues incompréhensibles, une famille dissoute, voilà ce que le retour au pays montre à la mélancolie ; mais, ailleurs, les cimetières de bateaux rouillés, les langues grecques et latines aussi perdues que l’occitan, des coutumes devenues absurdes, il faut avoir vécu la fin de certains rythmes pour estimer à presque rien l’intervalle qu’ils scandent. Si j’ajoute à ma vie brève celle de mon père, l’unité du siècle dura peu.

Michel Serres, L’Incandescent, 2003, éd. Le Pommier.

Commentaires

fela | 18/03/2008 - 12:32 :
Où a-t-il eu lieu en France? En région parisienne c'est possible?

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