Cette vérité nous éclate à la figure chaque fois qu'une grève se prolonge trop longtemps : les rayons des supermarchés "békés" se vident brutalement. A ce propos, d'aucuns oublient qu'il en va de même pour les supérettes et boutiques "nègres" de quartier populaires et des communes. A ce moment-là, même le plus pro-français des Martiniquais prend conscience de notre fragilité extrême au niveau le plus élémentaire, le plus basique. Mais ici, il convient de pointer du doigt cette expression réductrice de "dépendance alimentaire". Le mot "alimentaire" nous fait perdre complètement de vue que nous n'avons pas seulement besoin de fruits, de légumes, de lait ou de viande. Ce sont des "produits de première nécessité", mais personne, même le plus démuni d'entre nous ne peut s'en contenter dans la vie quotidienne.
Nous avons aussi besoin de dentifrice, de médicaments, d'allumettes, de savon, de vêtements, de chaussures, de papier, de pneus, d'assiettes, de verres, de pointe-bics, d'ampoules électriques, de seringues etc...toutes choses dont ceux d'entre nous qui ont vécu la période de l'Amiral ROBERT (1939-45) savent très bien de quoi on veut parler. A cette époque ce fut dur, mais la Martinique disposait encore d'une agriculture vivrière conséquente, on n'avait pas encore bétonné ou bitumé partout et surtout la population faisait preuve d'une grande inventivité : sandales fabriquées avec de vieux pneus de voiture ; huile à partir de la noix de coco ; sel avec de l'eau de mer chauffée etc... Ou encore essence à partir de la canne à sucre.
En 2020, notre territoire agricole s'est réduit comme peau de chagrin, notre population est beaucoup plus nombreuse qu'en Temps ROBERT et l'inventivité populaire s'est effondrée suite à notre francisation accélérée. Cela signifie quoi ? QUE SI JAMAIS LE CORONAVIRUS SE TRANSFORME EN EPIDEMIE MONDIALE, NOUS SOMMES FOUTUS ! Car ce ne sera pas pendant dix jours comme lors des grèves sur le port ou un mois comme en février 2009 qu'il n'y aura plus de bateaux, mais durant des mois et des mois. Quelqu'un, l'un de nos grands économistes, a-t-il cherché à calculer combien de temps la Martinique peut tenir dans pareil cas de figure sans que les gens ne s'entretuent ?
Il ne nous reste donc plus qu'à prier pour que le coronavirus soit rapidement maîtrisé. Prier, oui, kon dé timanmay !...