A la vérité, comme partout ailleurs dans le vaste monde, le magistère de l'intelligentsia s'est effondré depuis deux décennies devant celui des réseaux dits "sociaux" (repère de beaucoup de "cas sociaux" serait-on tenté de dire, expression qu'ici, il faut toutefois se garder de prendre au pied de la lettre car les cas sociaux, selon la définition officielle, roulent très rarement dans des berlines à 40 ou 50.000 euros). Donc, le "grangrek" est désormais contraint ou sommé de se taire parce que, comme s'en indignait comiquement l'éminent sémiologue italien Umberto Eco, "de nos jours, grâce aux réseaux sociaux, n'importe quel quidam se croit plus intelligent qu'un Prix Nobel".
Du coup, nos "grangrek" insulaires ont la trouille de s'exprimer, sont même morts de trouille si l'on en juge par leur assourdissant silence. Bon, on peut les comprendre car dans nos îles ensoleillées l'invective, l'injure et l'absence de culture a pris le pas sur la saine polémique (terme signifiant "bataille d'idées" et aucunement concours de noms d'oiseaux). Ils et elles se terrent, nos chers sociologues, anthropologues, psychologues, politologues et autres maîtres du "logos" parce qu'ils savent qu'au moindre mot de leur part, au moindre article, ils seront immanquablement ensevelis sous un tombereau d'accusations vengeresses.
Il est d'ailleurs intéressant de remarquer__jouons au Sociologue deux minutes à la manière de ceux qui avant le covid, squattaient les pages "Débats" du quotidien local !__que lesdites accusations reprennent exactement les mêmes éléments de langage (néologisme hypocrite pour dire "langue de bois") que les anti-vax gaulois et notamment celui de "collabos". Oubliant que nos chères îles n'ont jamais subi d'occupation allemande et même que pas un seul coup de canon n'a été tiré pendant la deuxième guerre mondiale sur notre continent américain de l'Alaska à la Terre de feu. A force de se scotcher devant les télés françaises et de hanter les réseaux sociaux, nos anti-vax ne se rendent même pas compte qu'en utilisant pareil vocabulaire, ils font preuve d'un risible...assimilationnisme. Passons...
Donc, hormis deux-trois suicidaires ou durs-à-cuire habitués à prendre des coups et à subir des avalanches d'anathèmes, nos intellos se taisent. Djol-yo fèmen di kon klou ! comme dirait Ti Sonson dans son idiome naturel (généralement ignoré, voire méprisé par ces mêmes intellos soit dit en passant). Silence radio, quoi ! Sauf que le moment venu, lorsque ce cauchemar de covid sera derrière nous (puisque toute épidémie a une fin : la grippe espagnole, par exemple, a tué 10 millions d'Européens au début du siècle dernier avant de disparaître), il faudra faire les comptes. Et à ce moment-là, leur silence sera jugé aussi coupable, voire même davantage coupable, que le délire verbal des antivax facebookiens lesquels ont au moins l'excuse d'une légitime colère tant l'Etat leur a trop souvent menti, notamment sur le chlordécone.
Partout dans le "Tout-monde", un intellectuel est quelqu'un qui est fait pour prendre des coups. Quelqu'un qui n'a ni le droit d'attendre des jours meilleurs pour s'exprimer ni celui de caresser dans le sens du poil la meute Facebooko-Instagramo-Whatsapo-Titokienne. En termes clairs, et c'est là chose admise de Trifouillis-les-Oies à la Papouasie-Nouvelle-Guinée, un intellectuel est quelqu'un qui doit avoir le courage de ses idées.
QUITTE A SE TROMPER !...
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