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«EXIT TAX» : MACRON FAIT UNE FLEUR (DE PLUS) AUX TRES RICHES

Par Lilian Alemagna
«EXIT TAX» : MACRON FAIT UNE FLEUR (DE PLUS) AUX TRES RICHES

Dans un entretien au magazine américain «Forbes», le président français annonce la suppression l'an prochain d'une disposition qui rapporte des millions d'euros.

Voilà qui ne va pas aider Emmanuel Macron à se débarrasser de son étiquette de «Président des riches». Dans un entretien au magazine américain Forbes réalisé avant son voyage américain, le président de la République annonce qu’il compte «supprimer» dès «l’an prochain» un impôt sur les plus-values mobilières (1) qui touche, sous certaines conditions, les contribuables français les plus riches partis s’installer à l’étranger. Cette «exit tax», remise au goût du jour par la droite en 2011 et durcie par la gauche en 2013, avait notamment pour objectif d’empêcher un entrepreneur ou le titulaire d’un gros portefeuille de choisir l’étranger pour profiter de systèmes fiscaux plus cléments au moment de la vente de son entreprise ou de ses titres. Aujourd’hui, lorsqu’une personne réside depuis au moins six ans dans l'Hexagone et part s’installer hors des frontières, elle reste redevable – à un taux de 30% depuis le 1er janvier – des plus-values (mobilières) réalisées en France. Dans la plupart des cas, le fisc ne lui réclamera ces sommes qu’au moment où elle décide de les vendre… sauf si cela fait quinze ans qu’elle a quitté le pays.

Un cadeau à 800 millions d’euros ?

Ce mécanisme, selon Macron, est «une grave erreur pour nos start-up parce que nombre d’entre elles, quand elles considéraient la France moins attractive, décidaient de lancer leurs projets en partant de zéro à l’étranger dans le but d’éviter cet impôt». «C’est la suite logique des mesures que nous avons prises dans le budget 2018, défend la députée LREM Amélie de Montchalin, cheffe de file des marcheurs à la commission des finances de l’Assemblée nationale. A partir du moment où on supprime l’ISF et qu’on crée une flat-tax [impôt à taux unique, ndlr] sur les revenus du capital, il n’y a pas de raison de garder un résidu de taxe qui reste un repoussoir pour que les investissements en France.»  «Macron a raison, abonde son collègue centriste Charles de Courson. En plus, elle avait pour effet de faire partir plus vite les contribuables avant leur retraite puisque au bout d’un certain temps, ils n’étaient plus imposés ! Cette taxe était une ineptie. Elle pénalisait ceux qui réussissent, et rapportait peu.» Selon les chiffres cités par les députés, elle rapporterait de «60 à 80 millions d’euros» chaque année. Mais selon un rapport du Conseil des prélèvements obligatoire qui date de janvier et repéré par Marianne, «l’exit tax représentait un rendement de 803 millions d’euros en 2016» pour quelques centaines de «redevables». Difficile de ne pas parler de «cadeau»…

Pour Bercy, cette somme représente des «recettes théoriques». La taxe, affirme le ministère des Finances  à Libération a rapporté entre 2012 et 2017 «moins de 100 millions d’euros»: «Les contribuables attendent huit ou quinze ans pour vendre. Donc on ne récupère rien.» Quelle que soit son rapport, cette taxe est aussi affaire de symbole. «On ne parle pas là des "super-riches" mais des "hyper-hyper-riches»" ! s’indigne le député LR Gilles Carrez. Quand on a profité toute sa vie d’un environnement économique favorable en France qui a permis de réaliser une plus-value, qu’on en rende 30% à la collectivité, ça me paraît légitime !» L’ex-président de la commission des finances était, en 2011, rapporteur général du budget lorsque le mécanisme avait été réintroduit dans le code général des impôts après une censure européenne en 2004. A l’époque, la droite sarkozyste souhaitait d’une part empêcher un exode fiscal de contribuables très fortunés dans la foulée de la suppression du bouclier fiscal. Il s'agissait aussi de parer aux critiques de la gauche alors que le gouvernement de François Fillon venait de relever le seuil de déclenchement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) de 800 000 à 1,3 million d’euros. «C’est une mesure dissuasive qui permet de priver l’exilé du bénéfice fiscal de son expatriation, en le taxant de la même manière que s’il n’avait jamais quitté la France», justifiait François Baroin, alors ministre de l’Economie et des Finances. «Nous avions choisi ce dispositif parce qu’à côté de chez nous, nous avons un paradis fiscal qui s’appelle la Belgique et où l’impôt sur les plus-values mobilières est de zéro ! On nous rebat les oreilles sur l’harmonisation fiscale en Europe mais on régresse !» fait valoir Carrez, pourtant favorable, cet automne, à la suppression de l’ISF et l’instauration d’une flat-tax de 30% sur les revenus du capital. «Mais là, franchement, je comprends pas…» se désole l’élu du Val-de-Marne.

«Une incitation à être sans-domicile fisc»

A gauche, forcément, on ne rate pas l’occasion de relancer l’accusation de «président de riches» contre Macron. «J’avais cru comprendre qu’ils avaient pris conscience du problème. Manifestement, ce n’est pas le cas», affirme, taquin, à Libération l’ex-ministre des Finances de François Hollande, Michel Sapin, ravi de rappeler la formule de son patron la semaine dernière : Macron «président des très riches». «D’un strict point de vue économique, en taxant moins le capital, on peut créer des investissements. A condition de flécher l’argent ! ajoute Sapin. Or, justement, l’exit tax fléchait cet argent… vers la France.» Son ex-camarade du Budget, Christian Eckert, se dit lui «indigné» par la suppression d’«un dispositif qui faisait pourtant consensus au Parlement». «Et puis annoncer ça dans un magazine américain alors qu’il est à l’étranger…» pointe l’ex-député de Meurthe-et-Moselle.

 «En fait, Macron est d’accord avec les Gafa : pour lui, c’est un taux zéro sur la finance, appuie le député PCF du Nord, Fabien Roussel. C’est une incitation à être sans-domicile fisc, à l’exil fiscal.» Côté majorité, on rejette les accusations d’un nouveau mauvais «symbole politique» quand Bercy et Matignon clament qu’il n’y a aucune «cagnotte» de disponible : «Notre projet de loi sur la fraude fiscale sera bien plus efficace sur ce sujet que ce mécanisme, renvoie Amélie de Montchalin. Nous faisons les choses de manière efficace : la politique des symboles, on essaie depuis trente ans, ça ne marche pas.» Ce qui fait sourire Sapin : «C’est sûr, ils ont une logique : donner des gages aux plus riches sans leur demander aucune contrepartie.»

(1) Portefeuille d’actions et obligations égal ou supérieur à 800 000 euros ou au moins  50% des parts d’une entreprise. 

 

Post-scriptum: 
Emmanuel Macronlors d'un discours à bord du porte-avion HMAS Canberra à Sydney, mercredi. Photo Peter Parks. AFP

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