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HOMMAGE AU COMBATTANT HUMBERT MARBEUF

Raphaël Constant
HOMMAGE AU COMBATTANT HUMBERT MARBEUF

 J’ai rencontré Humbert MARBEUF en 1987 à la Prison de Fresnes. Militant du MPGI, combattant de l’ARC (Alliance Révolutionnaire Caraïbe qui a agi en Guadeloupe, Guyane, Martinique et France de 1983 à 1989), il avait été déporté de sa terre natale la Guadeloupe pour être incarcéré en France.

 Ce n’était pas la première fois qu’il avait été emprisonné pour son combat anticolonialiste. Arrêté en 1984, après un an de « mawonaj », il avait réussi avec trois autres militants (Amédien, Pératout et Reinette) à s’évader de la prison de Basse Terre le 16 juin 1985.  

 En toute honnêteté, ce n’était pas la première fois que je rencontrais Marbeuf. Je l’avais déjà vu en Guadeloupe, lors de sa seconde période de « mawonaj » de 1985 à 1987.

 Néanmoins, cette rencontre de mai 1987 fut un choc au regard de l’état de celui qui était plus un camarade de combat qu’un client. Je n’avais plus devant moi ce magnifique athlète mais un corps pétri de fractures et de douleurs. Marbeuf s’était en effet retrouvé au bas de l’immeuble du SRPJ (Service Régional de la Police Judiciaire, structure policière créée par le gouvernement français pour pourchasser les militants de l’ARC) enchaîné à un fauteuil avec de multiples fractures. Les méthodes policières menées par un personnage de triste mémoire, Spissens, étaient telles que cette chute d’un étage a été dénoncée à l’époque comme les conséquences des actes de tortures des policiers français contre les militants. Il est vrai que l’histoire doit retenir que les militants de l’ARC n’ont jamais parlé aux policiers ou aux juges français sinon pour dénoncer la politique coloniale. 

 L’arrestation et la déportation de Marbeuf avec Nicole Fréjaville en avril 1987 n’était pas la première depuis le début des actions de l’ARC en 1983 et fait partie d’une rafle générale. Elle allait être suivi par l’enlèvement à Saint Vincent de Reinette, Bernard, Amédien, Fabre. Nous allions nous retrouver avec plus d’une dizaine de militants présumés de l’ARC à Paris, ce qui a nécessité la mise sur pied d’une importante campagne de solidarité avec la création d’un comité de soutien dans l’immigration.

 Le problème de la santé de Marbeuf a été récurrent pendant de nombreux mois tant pour les avocats que le comité de soutien. Manifestement, il avait été sommairement soigné en Guadeloupe puis déporté manu militari en dépit de son état médical. A Fresnes, l’obsession pénitentiaire et judiciaire était de limiter au strict minimum les soins.

 Marbeuf fut affecté à la détention ordinaire. Il lui était difficile de participer aux « promenades ». Se déplacer de sa cellule à la cabine d’entretien avec ses avocats lui prenaient une bonne demi-heure plutôt que les 5 minutes usuels. Les transferts au Palais de Justice étaient en fait une séance de torture sous l’œil goguenard de policiers français d’élite. Ceci a entraîné de nombreuses procédures et des explications orageuses avec le juge Bruguière, le procureur Fournel et le cabinet du garde des sceaux de l’époque, etc…

 Bref, tout avait été mis en place pour le faire craquer, lui faire demander pardon, obtenir sa soumission, ses aveux et des mises en cause d’autres.

 AWA !

 Pendant tous ses mois de souffrance, Marbeuf n’a pas cédé. En dépit d’une souffrance terrible qu’il décrivait dans le secret des entretiens, il n’a jamais ni baissé les yeux, ni répondu aux questions, ni cédé aux injonctions ou invitations de ses tourmenteurs.

 Il faudra plusieurs mois pour que juge, procureur, directeur de prison en viennent à admettre qu’ils n’allaient pas le faire craquer pour que Marbeuf accède à des soins normaux.

 Ainsi, alors qu’il a rejoint l’éternité, je veux rappeler cela. En sus d’avoir été un militant au service de la cause nationale de nos pays, ce que Reinette a parfaitement dit, je voulais, car j’en ai été un des rares témoins, rappeler de ce grand courage et sacrifice que ce combattant de la liberté a démontré.

 Lonè épi Respé !

 Le 4 octobre 2020.

 Raphaël CONSTANT

 Avocat et Militant

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