À quelques jours du Congrès qui réunira les deux assemblées locales de la Martinique (le 18 décembre très exactement) afin de rediscuter de l’évolution institutionnelle de ce pays, le président du Parti Progressiste Martiniquais et député-maire de Fort-de-France, Serge Letchimy, se fend d’une longue lettre aux accents lyriques dans laquelle il appelle à ce que ce jour-là les querelles politiciennes, les cancans et les haines cessent face à la nécessité de poser les bases d’un véritable idéal national martiniquais. Il évoque même l’esclave Romain qui, un certain jour de mai, 1848 battit pour la première fois du tambour afin de défier l’ordre colonial.
C’est joliment écrit. On dirait du Chamoiseau par endroits ; du Glissant à d’autres.
Le seul problème c’est que monsieur Letchimy fait le silence total sur le seul vrai problème qu’affronte la « Nation martiniquaise » à savoir ce que feu-Aimé Césaire, père-fondateur du PPM, avait appelé, il y a déjà une vingtaine d’années, avec le sens de la formule implacable qu’on lui connaissait, « le génocide par substitution ». Aujourd’hui, plus que jamais, les Martiniquais sont menacés de disparition en tant que peuple c’est-à-dire en tant que collectivité humaine ayant sa langue, sa culture, sa propre vision du monde etc… Cette menace prend diverses formes :
- destruction du tissu productif et dilapidation du foncier au profit de spéculateurs étrangers d’où l’impossibilité pour le Martiniquais moyen de construire une maison ;
- installation massive de populations étrangères dans les communes balnéaires (Diamant, Sainte-Luce, etc.) où elles estiment désormais pouvoir faire la loi et traiter les autochtones en indigènes ;
- concentration du pouvoir économique entre les mains des Békés d’une part et des prédateurs venus de l’extérieur attirés par les différentes lois de défiscalisation ;
- destruction de l’environnement par une bétonisation et une bitumisation quasi inarrêtables ;
- état sanitaire catastrophique de la population martiniquaise suite au déversement inconsidéré pendant plus de quarante de toutes sortes de pesticides cancérigènes (DDT, chlordécone, paraquat, etc.) dans les bananeraies de l’île ;
- déliquescence avancée de la jeunesse martiniquaise (62 % des moins de 30 ans sont au chômage) dont une partie se laisse tenter par la drogue ou la délinquance armée etc. etc. …
LA NATION MARTINIQUAISE EST EN DANGER DE MORT ET PENDANT CE TEMPS M. LETCHIMY JOUE DE LA LYRE AVEC LES MOTS DE L’AUTRE.
Et cela dans quel objectif ?
Pour, nous dit-il, « insérer la Nation martiniquaise dans le pacte républicain français ». On croit rêver ! Ce pacte a déjà écrabouillé la nation occitane, la nation bretonne, la nation basque, la nation corse, etc., on ne voit vraiment pas comment la minuscule nation martiniquaise pourra lui faire face.
Soyons sérieux !
Commentaires