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JE M’APPELLE NICOLAS LAMIC, JE SUIS PSYCHOLOGUE, PAS UN « TUEUR DE FLIC »

Par Nicolas LAMIC
JE M’APPELLE NICOLAS LAMIC, JE SUIS PSYCHOLOGUE, PAS UN « TUEUR DE FLIC »

J’ai eu l’occasion de vous informer précédemment des conditions de mon interpellation, en compagnie de mon frère, au mois d’août 2008 par la police de Fort-de-France. Vous avez dû apprendre par les médias, ma nouvelle interpellation, le 28 octobre 2008. Si je prends, aujourd’hui, la décision d’écrire ce texte, c’est pour vous informer des raisons qui m’amènent à faire appel du jugement qui a été rendu le lundi 26 janvier 2009 par le tribunal correctionnel de Fort-de-France.

En effet, je suis condamné à :

- 9 mois de prison avec sursis,
- Verser 3 000 euros de dommages et intérêts au policier Vincent C.,
- 1 500 euros de frais de procédure,
- 1 an de suspension de permis de conduire.

La peine qui m’a été infligée ne me permet pas de me faire beaucoup d’illusion sur la possibilité que justice me soit rendue par les tribunaux français. Je constate en effet que malgré tous mes efforts visant à expliquer, devant le juge, la façon dont les événements se sont déroulés, j’ai été condamné sur la base de l’enquête mensongère réalisée par la police de Fort-de-France.

Le lundi 15 décembre 2008, comme dans mon précédent récit intitulé « violences policières à connotation raciste », j’ai expliqué au juge les circonstances exactes dans lesquelles j’ai perdu mes lunettes lors de mon agression par le policier Vincent C., en août 2008. Aussi, lorsque le mardi 28 octobre 2008, en me dirigeant, aux environs de 15h30, vers l’université de Schoelcher pour assurer mes cours et croisant sur ma route un contrôle de police devant lequel je prends la décision de ralentir, croyant reconnaître l’un de mes agresseurs, je n’avais à aucun moment la certitude de m’adresser au principal acteur de mon agression. C’est ainsi que sans aucune animosité, en m’adressant à lui en lui disant « il me semble vous reconnaître », je ne pouvais pas imaginer un seul instant que je commettais là une erreur qui me sera fatale, comme vous pouvez déjà vous en apercevoir. En effet, le policier auquel je m’adresse, feignant ne pas me reconnaître, me répond sur le même ton « non, non, votre visage ne me dit rien ». J’insiste, car le physique de cet homme d’origine métropolitaine, aux cheveux coupés très courts, me rappelle étrangement l’un des policiers de type européen qui m’avait frappé au mois d’août. C’est ainsi que, craignant de gêner la circulation, j’essaie très rapidement de lui rafraîchir la mémoire en lui demandant s’il connaît un policier qui s’appelle Vincent C. A cette question, il me répond par la négative et me demande en retour pourquoi je m’intéresse à ce policier. A cela, je lui réponds que mon frère et moi avons été agressés par des policiers dont l’un d’entre eux s’appelle Vincent C. Voyant qu’il ne paraît pas désireux de décliner son identité, je lui adresse un petit signe de la main pour lui signifier « Ok, je laisse tomber », je relâche ma pédale de frein et j’appuie sur l’accélérateur pour avoir suffisamment de puissance pour effectuer un démarrage en côte. C’est à ce moment que je l’entends hurler par la vitre du côté passager « Qui êtes-vous ? ». Je lui réponds, alors que mon véhicule prend de la vitesse, « Nicolas Lamic ». Mais à peine lui ai-je répondu, que je l’entends crier de nouveau « arrête-toi, arrête-toi », je me retourne dans sa direction et je le vois déjà sur le marche-pied de mon véhicule et l’instant d’après, le corps à moitié dans l’habitacle, essayant de tirer sur mon frein à main. Ma réaction est aussitôt de lui maintenir la main, l’empêchant de mettre à exécution son projet qui, s’il aboutit, risque de provoquer une perte du contrôle du véhicule, et d’appuyer sur les pédales d’embrayage et de frein afin d’immobiliser ma voiture dans de bonnes conditions. Une fois la voiture à l’arrêt, je lève mes mains du volant, le policier, très excité, tire sur mon frein à main, enlève les clés de contact et me demande de descendre du véhicule. Je m’exécute, il est à présent en face de moi, le visage tout rouge, me traitant de fou, m’accusant d’avoir voulu le tuer. Très vite, il est rejoint par trois autres de ses collègues qui décident ensemble de me passer les menottes et de m’emmener au poste.

Dans la voiture qui nous ramène au commissariat, je lui dis qu’il agit comme son collègue Vincent C. qui, comme lui, m’a agressé il y quelques mois. Dans le tumulte qui règne dans le véhicule, je le vois prendre son téléphone et appeler le commissariat central et disant « Central, je suis le brigadier-chef Vincent C., j’arrive avec Nicolas Lamic qui m’a agressé ». C’est ainsi que je prends subitement conscience que je me suis fait piéger une nouvelle fois par Vincent C, qui pour finir lâche, en arrivant au commissariat, « ça tombe bien, j’ai une plainte à déposer contre toi pour des textes publiés sur internet ».

Dès cet instant, je prends la décision de ne pas répondre aux interrogatoires consécutifs à ma mise en garde à vue, souhaitant réserver ma version des faits au seul juge du tribunal. Durant les 48 heures pendant lesquelles je serai retenu prisonnier par les policiers, je prendrai une seule fois la décision de rompre mon silence. Cela se produira au moment de la reconstitution des faits, sur le parking situé à l’intérieur du commissariat. Dans sa version des faits, le policier Vincent C. affirmera que je me suis arrêté auprès de lui pour l’invectiver, le disant « Toi, le Blanc, je t’ai reconnu, enculé », et que lorsqu’il s’est approché de mon véhicule, du côté passager, pour m’écouter, j’ai fait remonter la vitre afin de l’étrangler, il s’est ainsi retrouvé prisonnier, le corps pour moitié, à l’intérieur du cockpit. J’ai alors redémarré, l’entraînant sur une distance de 200 mètres avant qu’il ne parvienne à me contraindre de stopper ma voiture en tirant sur mon frein à main. A mon tour, je donne ma version des faits et c’est à ce moment-là que l’un des policiers constate que mon véhicule est équipé d’un dispositif anti-pincement bloquant le mécanisme lorsqu’un corps étranger fait obstacle à la fermeture. Ce policier fait aussitôt part de ses doutes quant à la véracité du récit de son collègue Vincent C., d’autant plus que celui-ci ne porte aucune trace sur le corps montrant que l’on a essayé de l’étrangler ou qu’il a été traîné sur la chaussée sur plusieurs mètres.

Au terme de la garde à vue, je serai présenté directement au juge pour un procès en comparution immédiate. Mon avocat, présent à l’audience, obtiendra un délai pour préparer ma défense. Quelques jours après cette épreuve, dans le cabinet de mon avocat, je prendrai connaissance du contenu du dossier d’accusation. La lecture de la deuxième déposition du policier Vincent C., les contradictions contenues dans les différents témoignages des collègues de Vincent C., comme dans celles des soi-disant témoins de l’accusation ne pouvaient que me permettre d’être très optimiste quant à l’issue favorable du procès à venir.

La certitude que j’avais que l’audience permettrait de faire éclater la vérité sur cette machination policière s’évanouira dès les premières minutes du procès. Je m’aperçois que mon avocat n’est pas présent dans la salle d’audience. Le juge quant à lui ne veut rien entendre de mes protestations, compte tenu de sa décision de vouloir débuter l’audience en dehors de la présence de mon avocat. Mon avocat, une fois arrivé, se rattrapera en faisant, au final, une très belle plaidoirie montrant que les policiers avaient menti, ce n’était pas très difficile à faire, mais je savais déjà que nous avions perdu la partie. Plusieurs éléments me permettaient d’arriver à cette conclusion. Tout d’abord l’attitude du juge, partiale, il était visiblement là pour défendre la police et se montrait très agacé par ma volonté de ne pas admettre des faits mensongers qui tendraient à faire croire que j’ai voulu me faire moi-même justice. L’attitude de mon avocat ne lui plaisait pas davantage et il montra ouvertement qu’il n’avait aucun respect pour lui.

Voilà pourquoi, j’ai pris la décision d’écrire ce texte, pour vous donner une version plus proche de la réalité des faits qui ont conduit à mon interpellation puis à ma condamnation, que celle divulguée par la police et diffusée dans les médias. Mais aussi, pour vous informer de la façon dont le système policier et judiciaire tente de me faire taire en faisant pression sur tous ceux qui me soutiennent : ma femme, des collègues de l’Université, des membres de mon collectif de soutien… C’est ainsi qu’au travers de cette épreuve, je découvre que l’on ne me laisse plus d’autre choix que celui de me soumettre ou d’être écrasé par un pouvoir qui se couvre de tous les atours de la légalité.
En effet, aucune enquête n’a été diligentée par la justice pour faire la lumière sur cette affaire. Le juge s’est appuyé sur la seule version de la police, alors que l’on sait que dans des affaires de violences policières qui ont défrayé la chronique, Vincent C. a été impliqué dans plusieurs d’entre elles. Ces éléments sont bien connus des renseignements généraux, des collègues de Vincent C. et notamment d’un journaliste de RFO avec qui j’ai eu l’occasion d’échanger sur ces affaires. Ce n’est donc pas par hasard qu’une enquête de l’Inspection Générale de la Police Nationale a été ouverte, mais dans mon dossier, le juge a choisi de feindre d’ignorer cette procédure en cours. C’est ainsi qu’il est permis de s’interroger sur ses véritables motivations.

Pour moi, il s’agit de me faire taire et tant pis si au passage, en me retirant mon permis de conduire, on me fait perdre mon emploi et, en inscrivant une peine sur mon casier judiciaire, on brise mon projet de mener une carrière universitaire pour laquelle j’ai déjà consenti énormément de sacrifices. Pour le juge, ceci fait sans doute partie des dégâts collatéraux dans une procédure visant à « préserver l’image de l’institution policière et judiciaire » !

Soyons clairs, je me suis arrêté auprès de ce policier parce que je voulais connaître l’identité de l’ensemble des membres de la brigade d’intervention qui, au mois d’août 2008, nous ont abusivement frappés, mon frère et moi. Je continuerai à crier à l’injustice jusqu'à ce que je sois entendu et cela même si je dois en payer le prix fort !

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