Accueil
Aimé CESAIRE
Frantz FANON
Paulette NARDAL
René MENIL
Edouard GLISSANT
Suzanne CESAIRE
Jean BERNABE
Guy CABORT MASSON
Vincent PLACOLY
Derek WALCOTT
Price MARS
Jacques ROUMAIN
Guy TIROLIEN
Jacques-Stephen ALEXIS
Sonny RUPAIRE
Georges GRATIANT
Marie VIEUX-CHAUVET
Léon-Gontran DAMAS
Firmin ANTENOR
Edouard Jacques MAUNICK
Saint-John PERSE
Maximilien LAROCHE
Aude-Emmanuelle HOAREAU
Georges MAUVOIS
Marcel MANVILLE
Daniel HONORE
Alain ANSELIN
Jacques COURSIL

LA DEUXIEME MORT D'ORPHEE NEGRE OU LE TEMPS DES NECROPHAGES

Daniel Boukman
LA DEUXIEME MORT D'ORPHEE NEGRE OU LE TEMPS DES NECROPHAGES

Le mercredi 6 avril 2011, à Paris, sous la coupole du Panthéon, s'est déroulée une séance publique de nécrophagie…. Cette grande messe, le président de la république française en psalmodia les versets mis en musique par ses spécialistes outre-mer auxquels, comme le veut une vieille tradition, se sont joints un ou deux nègres domestiques.

Il convient de préciser que le corps du personnage dévoré reposait à 8000 kilomètres du lieu où s'opéra cette tragi-bouffonnerie, puisque, suite à un subtil coup de welto (jeu en lequel excella le défunt concerné), il fut décidé qu'à la terre martiniquaise, restera confiée sa dépouille, tandis que, sur une plaque, à l'un des murs du vénérable édifice, sera concédé le nom du poète panthéonnisé. (1)
Avec quelle délectation, le maître de cérémonie, en petites bouchées comptées, se mit à consommer l'homme qu'il était enfin parvenu à inclure dans son tableau de chasse !

Habile charcutier, il découpa en morceaux choisis la vie et l'œuvre de celui que ses soi-disant héritiers (avec l'assentiment de sa progéniture), lui avaient (à l'issue de quelles tractations ?) livrées.
Une première bouchée : « La Martinique pleura. Elle venait de perdre son père. Les Antilles pleurèrent. La France pleura. Elle venait de perdre l'un de ses enfants [Aimé Césaire] qui lui faisait le plus honneur. »

Une deuxième bouchée, délicieusement salivée : « Le plus beau combat de cette vie politique, celui peut-être où il a été le plus grand, fut le combat qu'il [Aimé Césaire] engagea et qu'il gagna pour la départementalisation. »

Une troisième bouchée, lentement mâchonnée : « A Malraux, venu défendre le « oui » à la Martinique, il [Aimé Césaire] déclara : « je salue en votre personne, la grande nation française à laquelle nous sommes passionnément attachés » (2).

Une autre bouchée, suavement gloutonnée : « Il [Aimé Césaire] réclamait qu'on reconnût [aux Martiniquais] cette dignité d'avoir enfin le droit, après des siècles de servitude, de choisir librement de rester français. ».

Et puis, poussant un rot jouissif, le nécrophage et président d'éructer : « La parole politique, comme toutes les paroles politiques, finira par s'éteindre avec le souvenir des combats anciens. Sauf le Discours sur le colonialisme qui n'est pas un discours politique mais une leçon de morale »

Une fois terminé ce macabre repas, le président, ses chiens de garde, ses courtisans noirs et blancs, s'en sont allés, panses repues, digérer… Et maintenant quel est le nom de l'homme (ou de la femme) d' « outre-mer » que le Préposé aux Affaires Nécrophagiques rêve d'inscrire sur ses tablettes, pour, un jour prochain, en petites bouchées comptées, le dévorer ?

Daniel Boukman

NB : Les parties ci-dessus mises entre guillemets sont des citations extraites du discours prononcé par le président de la république française, le 6 avril 2011.
(1) Décidément, le destin des chantres de la Négritude donne à réfléchir : Léopold Sédar Senghor, volontairement, en 1983, s'est engouffré sous les voûtes de l'Académie française ; en 2011, Aimé Césaire est symboliquement panthéonnisé, alors que, comme l'a déclaré le sénateur Claude Lise, il n'est pas sûr « que Césaire aurait aimé ce type de manifestation. Il avait en horreur tout ce qui était manifestation publique, décorations, etc ..( in France-Antilles, 7 avril 2011).

(2) Faux ! Lors du referendum organisé, en 1958, par le Général de Gaulle, alors Président de la République française, à l'instar du Guinéen Sékou Touré, Aimé Césaire était au départ partisan du « non » à la question relative à la création d'une France-Afrique, cornaquée en fait par l'Etat (colonial) français. C'est suite à la venue en Martinique d'André Malraux, envoyé du Général de Gaulle, que le « non » de Césaire tourna en « oui ».

Connexion utilisateur

CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain afin d'éviter les soumissions automatisées spam.

Pages