Accueil
Aimé CESAIRE
Frantz FANON
Paulette NARDAL
René MENIL
Edouard GLISSANT
Suzanne CESAIRE
Jean BERNABE
Guy CABORT MASSON
Vincent PLACOLY
Derek WALCOTT
Price MARS
Jacques ROUMAIN
Guy TIROLIEN
Jacques-Stephen ALEXIS
Sonny RUPAIRE
Georges GRATIANT
Marie VIEUX-CHAUVET
Léon-Gontran DAMAS
Firmin ANTENOR
Edouard Jacques MAUNICK
Saint-John PERSE
Maximilien LAROCHE
Aude-Emmanuelle HOAREAU
Georges MAUVOIS
Marcel MANVILLE
Daniel HONORE
Alain ANSELIN
Jacques COURSIL

La matière intergalactique enfin retrouvée

La matière intergalactique enfin retrouvée

Dans le bilan du contenu de l’Univers, une grande part de la matière ordinaire manquait à l’appel. De nouvelles observations aux rayons X ont permis de la mettre au jour.

Energie sombre, matière noire et matière ordinaire, voilà en résumé les constituants de l’Univers. Les deux premiers sont de nature inconnue et pourtant, d’après une foule d’observations cosmologiques, ils représentent 95 % du contenu de l’Univers. C'est déjà assez embarrassant, mais c’était sans compter sur le fait que près de la moitié des 5 % restants – la matière ordinaire, composée d’atomes, dite baryonique – manquait aussi à l’appel ! Grâce à de nouvelles observations, Fabrizio Nicastro, de l’observatoire astronomique de Rome, et ses collègues, ont confirmé certains indices qui laissent penser que la matière ordinaire manquante se cache… exactement là où on pensait la trouver, dans le milieu intergalactique.

De nombreuses observations ont permis d’estimer la part de la matière baryonique dans l’Univers, notamment l’analyse du fond diffus cosmologique – le premier rayonnement émis par l’Univers alors âgé de 380 000 ans – et la nucléosynthèse primordiale, qui explique la formation des noyaux atomiques les plus légers dans les premières minutes de l’Univers. Un autre argument décisif vient des quasars, des galaxies dont le trou noir supermassif central très actif émet un intense rayonnement. L’étude du rayonnement des quasars très lointains (et donc observés tels qu’ils étaient dans l’Univers très jeune) conforte l’estimation de la quantité de matière baryonique à environ 5 % du contenu total de l’Univers. Si ce résultat est juste pour l’Univers âgé de moins de 3 milliards d’années, dans l’Univers plus proche, et donc plus récent, le compte n’y est plus : près de la moitié de la matière baryonique manque à l’appel. Où est-elle donc passée ?

Pour répondre à cette question, les astrophysiciens ont entrepris un recensement précis de la matière ordinaire dans l’Univers local. La première chose prise en compte est la matière directement visible : les étoiles qui composent les galaxies et les amas de galaxies. Elles ne représentent que 7 % de la matière baryonique totale. Il faut y ajouter le gaz que l’on trouve en grande quantité dans les galaxies et les amas de galaxies. On arrive alors à un peu moins de 18 % de la matière ordinaire.

Les modèles de formation des grandes structures cosmiques montrent que la matière (noire et baryonique) s’accumule en partie dans les galaxies, mais tisse aussi un réseau de filaments qui relient les galaxies entre elles. Ces filaments contiennent sans doute la matière baryonique manquante. La difficulté est que le gaz de ces régions intergalactiques, très peu dense, émet très peu de rayonnement et est donc très difficile à détecter.

Les astrophysiciens pensent que le gaz des filaments intergalactiques se trouve sous différentes formes. Une partie assez froide, principalement constituée d’atomes d’hydrogène neutre, a été observée en analysant la lumière venant des quasars lointains. Elle représente près de 28 % de la matière baryonique. Le reste serait sous forme de gaz ionisé très chaud, avec des températures comprises entre 100 000 et plus d’un million de kelvins. Seule la part la moins chaude, à moins de 500 000 kelvins, a été identifiée. Elle représente 15 % des baryons. On arrive donc à un total de 61 % de la matière ordinaire recensée. Restait à dénicher les gaz les plus chauds du milieu intergalactique…

Ces dernières années, de nombreuses équipes ont obtenu des indices de la présence de ce gaz chaud. Pour en avoir la confirmation et estimer sa contribution au bilan total, Fabrizio Nicastro et ses collègues ont analysé le rayonnement X en provenance du quasar 1ES 1553+113, dont la lumière a mis 4 milliards d’années à nous arriver. Les chercheurs ont utilisé les données de 18 jours d’observation par le télescope spatial XMM-Newton répartis entre 2015 et 2017. Ils ont montré que ce rayonnement possède des raies d’absorption liées à la présence de matière sur la ligne de visée. En particulier, la présence de raies d’absorption de l’oxygène ionisé est caractéristique de nuages de gaz intergalactiques très chauds. La lumière du quasar 1ES 1553+113 aurait ainsi traversé de tels nuages avant de nous parvenir. D’après les modèles statistiques de la répartition de ce gaz dans l’Univers, les astrophysiciens estiment ainsi que ce gaz intergalactique chaud représenterait 30 à 40 % des baryons, soit toute la matière ordinaire qui manquait à l’appel.

Milieu intergalactique

La lumière émise par un quasar (en haut à gauche) traverse l’Univers. Elle est absorbée à certaines longueurs d’onde (en bas à gauche) par le gaz chaud du milieu intergalactique (au centre) avant d’être observée par le satellite spatial XMM-Newton (en bas à droite).

ESA / ATG medialab; ESA/XMM-Newton/F. Nicastro et al., 2018; R. Cen

D’autres spécialistes nuancent cependant ce résultat. Des incertitudes demeurent sur l’estimation réelle de la densité de ce gaz chaud. Par ailleurs, le signal pourrait provenir en partie de l’intérieur des galaxies situées sur la ligne de visée. De nouvelles observations sont donc nécessaires pour confirmer cette découverte. En particulier, le futur télescope spatial de l’ESA, Athena, prévu pour 2028, dont la traque de la matière baryonique intergalactique est l’un des objectifs principaux, devrait permettre de mieux préciser cette question.

Connexion utilisateur

CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain afin d'éviter les soumissions automatisées spam.