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Langues Régionales : Une Loiseau de mauvais augure

Langues Régionales : Une Loiseau de mauvais augure

La cheffe de file de la liste de la République en Marche est une opposante résolue de la charte européenne des langues régionales et minoritaires.

Précisons-le d'emblée : autant je suis attaché aux langues minoritaires,autant je ne crois pas que l'on doive voter aux prochaines élections européennes en prenant ce sujet pour seul critère. Si j'ai néanmoins choisi de consacrer cette chronique aux propos qu'a tenus Nathalie Loiseau sur la question, c'est qu'ils me paraissent très révélateurs. Invitée de France 3 le 3 décembre 2017, celle qui a depuis été désignée comme chef de file de la liste de la majorité présidentielle avait clairement pris position : non, la France ne signera pas pendant ce quinquennat de la charte européenne des langues régionales et minoritaires. Et, rendons-lui cette justice, elle n'avait pas mâché ses mots. Pour elle, "ce n'est pas une priorité".
Précisons-le également : je n'ai rien contre Nathalie Loiseau, et ce d'autant moins qu'elle a des attaches en Béarn ce qui, compte tenu de l'attachement névrotique que je nourris envers ma petite patrie, me la rendait instinctivement sympathique. Aussi suis-je vraiment peiné de devoir l'écrire ici : l'ancienne directrice de l'ENA est totalement incompétente dans le domaine linguistique.
Précisons-le enfin : dans la classe politique, Nathalie Loiseau est loin d'être la seule à défendre ce point de vue. Mais ce qui me frappe chez elle, c'est la pauvreté de ses arguments, que je vais maintenant exposer point par point (1).
1) Cette ratification n'était "pas dans le programme" d'Emmanuel Macron
Pas de chance. C'est l'inverse. Saisie par des militants régionalistes, son équipe écrivait ceci le 14 avril 2017 : "Emmanuel Macron lancera le processus de ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires dès son élection, comme il a eu l'occasion de le rappeler lors de son déplacement en Corse."
2) Il est écrit dans la Constitution : "Le français est la langue de la République".
Certes, et alors ? Jusqu'à preuve du contraire, une Constitution peut se changer. C'est d'ailleurs ce qui a été fait pour... introduire cet article, en 1992 ! De surcroît, à l'époque, les parlementaires avaient précisé qu'il s'agissait pour eux de s'opposer à l'anglais et surtout pas de désavantager les langues régionales.
3) Les langues régionales elles-mêmes sont entrées dans la Constitution en 2008.
C'est tout à fait exact. A ce malencontreux "détail" près. Dès 2011, le Conseil constitutionnel s'est empressé de préciser que ledit article n'ouvrait "aucun droit ou liberté opposable par les particuliers et les collectivités." Le rendant ipso facto purement décoratif.
4) Les langues régionales bénéficient déjà d'une place dans l'enseignement, sur Radio France et France Télévision, et l'Etat leur accorde des subventions.
En substance : que pourrait-on bien faire de plus ? La place me manque pour réfuter ce point dans le détail. Résumons en disant que ces dispositions sont largement insuffisantes, et parfois non appliquées. Et que, si rien ne change, elles auront toutes disparu en métropole d'ici à la fin du siècle.
5) Face aux grands enjeux auxquels 'Europe doit faire face -"changement climatique", "régulation de la mondialisation", "lutte contre le terrorisme" - "on se concentre sur ce qui est important pour nos concitoyens, on ne se disperse pas".
Si les mots ont un sens, voici comment on peut synthétiser l'analyse de Nathalie Loiseau. A ses yeux (ou plutôt à ses oreilles), le multilinguisme est par essence un facteur de division qui empêche de régler les problèmes fondamentaux. La suite logique de ce brillant raisonnement va de soi : si elle veut surmonter ses défis, l'Europe a tout intérêt à passer au tout anglais! Et c'est d'ailleurs sans doute en vertu de cette "loi" que la Suisse multilingue est le pays le plus mal géré du monde tandis que la France est synonyme depuis 30 ans de plein-emploi, d'équilibre budgétaire et de prospérité.
Bon, j'arrête là le mauvais esprit, mais, honnêtement, on doute qu'une femme du talent de Nathalie Loiseau ait beaucoup réfléchi à la question avant de proférer de telles sornettes. D'ici au 26 mai, une bonne âme pourrait-elle lui rappeler que la devise de l'Union européenne n'est autre que : "Unie dans la diversité" ?
(1) Je n'ai évidemment pas voulu me contenter de cet extrait télévisé et, sachant Nathalie Loiseau légitimement occupée, ai sollicité un entretien avec elle plus d'un mois à l'avance. En vain. Au vu de mon insistance, l'un de ses collaborateurs a simplement fini par m'adresser trois banalités. Une attitude au demeurant tout à fait significative.

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