Corinne Mencé-Caster, ancienne présidente de l'Université des Antilles et de la Guuyane, vient de publier chez ÉCRITURE un roman de 235 pages intitulé Le talisman de la présidente, que tous les Antillais et Guyanais se doivent d'acheter et lire, non pas pour l'encourager à persévérer sur la voie de la littérature fictionnelle mais pour les vérités qu'elle révèle et la leçon de courage et de dignité qu'elle nous donne.
Agrégée d'espagnol, docteur en sciences du langage, professeur des universités actuellement en poste à Paris IV Sorbonne, Corinne Mencé-Caster n'en est pas à sa première oeuvre de fiction. En effet elle s'est déjà fait connaître sur le terrain de la littérature, sous le pseudonyme de Mérine Céco, avec deux œuvres intitulées respectivement La Mazurka perdue des femmes couresse ( 2013) et Au revoir Man Tine( 2016).
Ce qui frappe d'emblée lorsqu'on lit la couverture de Le talisman de la présidente, c'est qu'elle a fait le choix de publier cet ouvrage sous son vrai nom, comme si elle entendait mieux en assumer la responsabilité face à ses lectrices et lecteurs virtuels. Et quand en découvre l'histoire qu'elle y raconte, on est fondé à se demander s'il s'agit véritablement d'un roman, d'une pure œuvre de fiction, ou plutôt d'une autobiographie déguisée. En effet, Corinne Mence-Caster raconte ses mésaventures de jeune présidente de l'Université des Antilles et de la Guyane de 2013 à 2016, le long, éprouvant et risqué combat qu'elle a courageusement mené pour faire éclater au grand jour le scandale que les médias ont appelé l' «Affaire CEREGMIA » : cette affaire de détournement de fonds européens qui ne cesse de traîner en longueur, malgré la mise en examen d'un certain nombre d'individus, dont des universitaires censés gérer honnêtement l'argent public et donner le bon exemple aux étudiants.
Le « roman », divisé en trois parties, est composé de 36 courts chapitres précédés d'un Avant- propos et suivis d'un Epilogue. L'auteure se cache derrière deux narrateurs qui interviennent de manière alternée : l'un s'exprimant « à la première personne », l'autre « à la troisième personne ». Par prudence et aussi pour s'amuser, elle déforme systématiquement les noms des personnes, -y compris ceux des femmes et des hommes qui ont pris sa défense-, ainsi que ceux des trois DFA ( Départements français d'Amérique). C'est ainsi que le personnage principal du « roman », le directeur du laboratoire Caribmia, reçoit le nom de Félix Talisman, et que la Guadelouple devient Gwada, la Guyane Gwaya et la Martinique Mada. L'UAG est appelée UFC (Université franco-caraïbe). Quant à Corinne Mencé-Caster, son nom se réduit aux trois lettres CMC dans les chapitres où la narration est à la troisième personne.
On découvre dans cette œuvre une Corinne Mencé-Caster intelligente, forte, courageuse, résolue, persévérante, mais aussi fragile, qui ne cache pas qu'elle est passée par des phases de découragement et qu'elle amaintes fois pleuré. Si elle exprime sa reconnaissance aux hommes et aux femmes (nombreuses) qui l'ont accompagnée dans ses terribles épreuves, elle se montre par contre impitoyable envers certains responsables politiques locaux qui ont tenté de faire pression sur elle ou de l'amadouer pour qu'elle cesse de remuer le caca du pauvre Félix Talisman. Elle met aussi en cause le système esclavagiste, le colonialisme français, la passivité des représentants de l'Etat en Martinique, voire leur complicité objective avec Félix Talisman. Et elle n'omet pas de condamner la mise à mort de l'UAG par le gouvernement français, une mise à mort dont elle attribue une part de responsabilité à Félix Talisman ainsi qu'à cette Guyanaise ministre de la Justice que tout le monde connaît.
Le terme « talisman », qui est inclus dans le titre du roman et désigne en même temps le personnage principal, mérite d'être commenté. Selon le dictionnaire Robert, un talisman est un « objet sur lequel sont gravés ou inscrits des signes consacrés, et auquel on attribue des vertus magiques de protection ». Si Corinne Mencé-Caster a choisi d'appeler son sinistre personnage Félix Talisman, c'est parce que celui-ci sentait invulnérable, intouchable, protégé par un puissant « talisman » symbolisé à la fois par un parti politique ( le MPN), les francs-maçons et l'immense réseau qu'il a créé au sein de l'université en usant de la corruption et de l'intimidation. Mais par malheur pour Félix Talisman, CMC a eu aussi son talisman, beaucoup plus puissant : la masse d'hommes et de femmes qui se sont mis en mouvement pour la protéger dans son dur combat pour la vérité et la justice.
On lit à ce propos à la page 194 : « Ce bouclier humain a agi comme un talisman qui m'a protégée, moi ainsi que l'université, des perversités et des infamies de cet autre Taliman qui la minait depuis des décennies ».
Cette citation permet de comprendre le titre de cet ouvrage émouvant que nous invitons les lecteurs de « Justice » à lire et à méditer.
M.Belrose ( alias Prosper Bellefleur)