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Les enfants apprennent mieux dans leur langue maternelle

par Jessica Ball
Les enfants apprennent mieux dans leur langue maternelle

A l’échelle mondiale, on estime qu’entre 50 et 75 millions d’enfants « marginalisés » ne sont pas scolarisés. Lorsque la langue utilisée à l’école n’est pas la première langue parlée par les enfants, le risque de déscolarisation ou d’échec dans les petites classes est plus élevé.

A l’échelle mondiale, on estime qu’entre 50 et 75 millions d’enfants « marginalisés » ne sont pas scolarisés. Lorsque la langue utilisée à l’école n’est pas la première langue parlée par les enfants, le risque de déscolarisation ou d’échec dans les petites classes est plus élevé. Des études ont montré que l’on obtient de meilleurs résultats au primaire lorsque la langue d’enseignement est la langue maternelle des apprenants. Or, malgré les preuves croissantes en ce sens et la demande des parents, de nombreux systèmes éducatifs dans le monde continuent à imposer l’usage exclusif d’une, ou parfois de plusieurs langues privilégiées, excluant de ce fait les autres langues, et avec elles les enfants qui les parlent (Arnold, Bartlett, Gowani et Merali, 2006).

Les risques de l’enseignement dans une langue étrangère

Les enjeux ne sont pas difficiles à comprendre : parce que l’école ne parle pas leur langue, les parents n’y inscrivent pas leurs enfants ; les enfants ne réussissent pas à exécuter correctement les exercices ; les enseignants se sentent impuissants face à l’incapacité des enfants à participer ; les enfants connaissent l’échec dès les petites classes, etc. Certains enfants réussissent néanmoins, parfois avec l’aide d’un programme de transition linguistique qui les aide à apprendre la langue d’enseignement. Cette réussite peut toutefois avoir des effets négatifs quand, à cause de l’enseignement dans la langue dominante, les enfants n’acquièrent pas la maîtrise de la langue qui est celle de leur famille et de leur entourage et perdent ainsi le contact avec leur propre héritage culturel. Certains enfants continuent certes à développer la maîtrise de leur langue première tout en réussissant à suivre une scolarité dans une seconde langue, mais ce n’est pas automatique. Les enfants se retrouvent alors peu à peu incapables de communiquer avec leurs parents et leurs grands-parents au-delà des situations élémentaires du quotidien, et il s’ensuit une déperdition rapide de langues et dialectes qui sont les dépositaires de savoirs culturels.

Préserver les langues maternelles

De nombreux groupes linguistiques élèvent leur voix pour souligner la nécessité de veiller à ce que les plus jeunes membres de leurs communautés conservent leur héritage linguistique. Dans certains pays (aux Philippines, par exemple) les pouvoirs publics ont récemment mis en place une politique linguistique de l’enseignement tenant compte des langues maternelles. L’UNESCO (2008b) a publié un recueil d’exemples qui atteste de l’intérêt croissant porté à cette question et qui expose la grande variété des modèles, outils et ressources qui sont expérimentés pour favoriser les programmes d’enseignement en langue maternelle.

Les enfants apprennent mieux dans leur langue maternelle

L’UNESCO encourage l’enseignement en langue maternelle au primaire depuis 1953 (UNESCO, 1953).

L’organisation souligne les avantages d’un enseignement en langue maternelle dès le plus jeune âge : les enfants sont ainsi plus nombreux à fréquenter l’école et à y obtenir de bons résultats (Kosonen, 2005) ; les parents ont plus de facilité à communiquer avec les enseignants et à accompagner leurs enfants dans leurs devoirs (Benson, 2002) ; les filles et les enfants des zones rurales qui ont moins de contact avec les langues dominantes poursuivent leurs études plus longtemps et ont moins tendance à redoubler (Hovens, 2002 ; UNESCO Bangkok, 2005) ; dans un environnement d’enseignement multilingue, les enfants ont tendance à acquérir de meilleures aptitudes à la réflexion que dans un environnement monolingue (cf. par exemple Bialystok, 2001 ; Cummins, 2000 ; King et Mackey, 2007).

Certains éducateurs estiment même que les pays dans lesquels les élèves reçoivent un enseignement dans leur langue maternelle sont les seuls à avoir une chance d’atteindre les objectifs de l’Éducation pour tous. De même, des recherches ont démontré l’efficacité du modèle d’enseignement multilingue fondé sur la langue maternelle pour les enfants marginalisés (Benson et Kosonen, 2013 ; Yiakoumetti, 2012). Nous commençons à obtenir des réponses à certaines questions essentielles. Quelles sont les conditions qui garantissent l’efficacité d’une méthode alliant enseignement dans la langue maternelle et enseignement multilingue en permettant aux enfants d’acquérir à la fois la maîtrise de la langue parlée à la maison et les bases de l’apprentissage d’autres langues ? Quels sont les coûts et les avantages associés aux méthodes d’enseignement alternatives au niveau de l’individu, de la famille, de la collectivité, de l’établissement scolaire, de la région, de la nation ? Comment mesurer ces coûts et avantages d’une manière à la fois sensée et efficace ? Quelles sont les implications de la méthode d’enseignement multilingue fondé sur la langue maternelle en matière de recrutement, formation et encadrement des enseignants et des auxiliaires d’enseignement, ainsi que sur le plan de l’élaboration et de l’évaluation des programmes ? En quoi les familles et les communautés contribuent-elles, de manière formelle ou informelle, à ce type d’enseignement, et comment mesurer cette contribution ?

Nécessité d’approfondir les recherches

Il est nécessaire d’investir dans un programme coordonné de recherche afin de répondre à ces questions et d’acquérir les connaissances qui permettront de prendre au niveau national des décisions éclairées sur la politique linguistique à mener dans l’éducation, la formation des enseignants et les méthodes à appliquer localement.

Il convient de poursuivre les recherches sur les méthodes à mettre en œuvre au cours des premières années de la vie afin de préparer les enfants — avant même leur entrée à l’école — à l’utilisation de plusieurs langues au cycle primaire.

Il faut aussi se pencher sur la question des objectifs essentiels à atteindre et des moyens de les mesurer dans différents environnements d’enseignement et d’apprentissage. Et analyser les conséquences d’un enseignement multilingue sur l’évaluation de l’efficacité pédagogique : comment celle-ci doit-elle prendre en compte la spécificité du rythme d’acquisition des compétences dans les apprentissages clés (lecture, écriture, calcul et résolution de problèmes) lorsque les enfants manient plusieurs langues d’apprentissage ?

Les recherches font également défaut en ce qui concerne les méthodes de transition à adopter pour aider efficacement les enfants ayant suivi un enseignement primaire dans leur langue maternelle à aborder le cursus secondaire dans une langue dominante.

Les membres de la famille jouent un rôle important en tant que « premiers enseignants » ; aussi la recherche doit-elle aussi se pencher sur les rôles respectifs de l’éducation officielle, de l’éducation informelle et de l’interaction familiale dans la promotion des apprentissages dans la langue maternelle (pour la lecture, l’écriture, le calcul et les capacités cognitives d’un plus haut niveau).

Afin d’assurer l’efficacité d’un enseignement multilingue fondé sur la langue maternelle, il convient d’impliquer dans le système éducatif officiel ceux qui, dans la communauté, disposent de compétences en plusieurs langues et de former des enseignants ayant des capacités linguistiques et des niveaux d’études divers. Enfin, au fur et à mesure de l’évolution des connaissances, nous devons mieux diffuser les conclusions des recherches afin d’en informer les praticiens, les responsables politiques et les bailleurs de fonds et de leur faire prendre conscience du formidable potentiel que recèle l’enseignement multilingue fondé sur la langue maternelle pour la réalisation des objectifs de l’Éducation pour tous.

 

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