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MARTINIQUE, TERRE ÉCHOUÉE…

MARTINIQUE, TERRE ÉCHOUÉE…

 

à Francesca Palli

 

Francesca Palli, dont on ne dira jamais assez le dévouement est professeur de biologie et chimie dans la Suisse italophone. Elle est responsable du site POTOMITAN dont on dira jamais assez la qualité. C'est une personne douce et sensible, discrète et qui sait préserver sa vie de famille. Par amitié pour Pierre Papaya, elle a accepté de se substituer à Pierre pour le travail de webmaster du site MONTRAY KREYOL. Là encore on ne dira pas assez la qualité du travail qu'elle réalise dans la perfection et selon les exigences de mise en place de la rédaction de Montray kreyol. S'il est coutumier de rendre hommages aux défunts, pour une fois, faisons-le pour des personnes en vie. HONNEUR ET RESPECT à Francesca.

Il vous naît un ami, et voilà qu’il vous cherche
Il ne connaîtra pas votre nom ni vos yeux
Mais il faudra qu’il soit touché comme les autres
Et loge dans son cœur d’étranges battements
Qui lui viennent des jours qu’il n’auras pas vécus.

Jules Supervielle

 

 

 

 

 

Un grand champ de lin bleu parmi les raisins noirs
Lorsque vers moi le vent l'incline frémissant
Un grand champ de lin bleu qui fait au ciel miroir
Et c'est moi qui frémis jusqu'au fond de mon sang

Devine

Un grand champ de lin bleu dans le jour revenu
Longtemps y traîne encore une brume des songes
Et j'ai peur d'y lever des oiseaux inconnus
Dont au loin l'ombre ailée obscurément s'allonge

Devine

Un grand champ de lin bleu de la couleur des larmes
Ouvert sur un pays que seul l'amour connaît
Où tout a des parfums le pouvoir et le charme
Comme si des baisers toujours s'y promenaient

Devine

Un grand champ de lin bleu dont c'est l'étonnement
Toujours à découvrir une eau pure et profonde
De son manteau couvrant miraculeusement
Est-ce un lac ou la mer les épaules du monde

Devine

Un grand champ de lin bleu qui parle rit et pleure
Je m'y plonge et m'y perds dis-moi devines-tu
Quelle semailles y fit la joie et la douleur
Et pourquoi de l'aimer vous enivre et vous tue

 

Jean Ferrat chante Aragon

 

 

Martinique, terre échouée ...

 

  

Elle, un jardin de géants perdu en mer
arraché d'une terre reniée, oubliée
cette lourde Afrique, aux battements sourds
étouffante de ses puissantes racines entrelacées.
L'obstination d'infatigables alizés, t'a poussée, Martinique
vers un marais marin aux vagues métissées de calme salé.
Te voici échoué, jardin étrange abandonné de tes dieux
ancestraux, avec pour mémoire leur antique semence. Elle irrigue
toute vie, tout être jusqu'à l'exubérance.
Pas de repos à cette inexorable sève.
Dans la moiteur des jours répétés, ton soleil
se hâte de disparaître, tant le feu des verdures
use son regard borgne. Lente sueur du temps aussi,
les heures circulaires ne peuvent échapper à ce feu soutenu,
porter une saison, la mélancolie de la nudité, enfermer
un frisson de fraîcheur, exploser un matin dans un fracas de bourgeons.
Non, rien, l'obsédante luxure, la fleur, impudique courtisane,
les frondaisons éternelles, narquoises.
Parfois, rare, parvient la neige d'un fromager, éphémère et blanche
ou neigent aussi les champs de canne brûlés, sueur des nègres.
Indigènes indécis, enivrés de cette sève
vous qui avez troqué le fouet de cuir contre un fouet d'or,
cette langueur est-elle l'orgueil de votre naissance ?
Le lointain souvenir de vos ancêtres titanesques ?
L'élégance de vos femmes, yoles doucement bercées,
est-elle l'arrogance des cruelles divinités qui régnaient en des temps obscurs ?
Mais vrai l'esprit vous manque, hommes-lianes, femmes-fleurs.
Entendre couler ce chant antique et puissant dans vos veines, repris
par vos rythmes martelés, vous épargne l'effort d'un fruit.
Pleurez, pleurez, nègres de là et d'ailleurs.
De plus en plus désastreux sont vos retours de Miquelon,
vos pêches corrompues. Et le monde
jaloux de la vigueur toujours nouvelle de ces sèves infinies,
souillera la source de votre majesté, par un immense déluge de cendre.
Brûlez, brûlez de rhum vos yeux, nègres de là et d'ailleurs ; alors,
rendus aveugles aux lumières des cités, aimez le fouet de cuir.
Déséchouez votre île de cette maudite lagune. Souffrez, suez,
le souffle de vos géants vous conduira vers un océan vierge et inconnu.
Mais quel homme peut vous parler ?

 

Thierry Caille

Photo du logo : un crocus ou un safran mauve de Suisse

 

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