Monsieur Nicolas LAMIC Trinité, le 29 mars 2010
Monsieur le Procureur de la République
Tribunal de Grande Instance de Fort-de-France
35 Bld du Général de Gaulle
97200 FORT DE FRANCE
Objet :
Affaire n° 09012113
Monsieur le Procureur,
J’ai bien reçu votre courrier daté du 20 mars 2010 dans lequel vous m’informez qu’à la suite de la procédure engagée contre Monsieur CLOUET Isabelle pour : « Injure non publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion », l’affaire sera appelée à l’audience du Tribunal de Police de Fort-de-France le 4 mai 2010 à 14 H 00.
Je constate que vous avez commis une erreur dans l’énoncé même de l’identité de la personne contre laquelle j’ai engagé cette procédure. En effet, vous comptez appeler à la barre : « Monsieur CLOUET Isabelle ». De plus, vous ne citez pas l’article du code pénal qui sanctionne ce type d’infraction. A mon sens, ces erreurs sont révélatrices de la volonté du parquet de ne pas sanctionner le véritable responsable de ces injures racistes, compte tenu des conséquences que pourrait avoir cette condamnation dans les affaires m’opposant à l’officier de police CLOUET Vincent.
Comme vous pouvez le constater dans ma plainte du 5 juillet 2009 auprès de la gendarmerie de Trinité, jointe à cet envoi, je précise bien que j’ai entendu une voix d’homme au téléphone. Je ne pouvais pas connaître l’identité de mon interlocuteur, puisque le numéro de l’appelant était masqué. Il a fallu cet entretien avec vous, au mois de septembre 2009, en présence de mes avocats Maîtres Germany et Monotuka, pour apprendre que cet appel téléphonique provenait du domicile de Monsieur CLOUET Vincent.
Pour mémoire, je me permets de vous rappeler que :
1) J’ai été insulté et agressé au mois d’août 2008 par l’officier de police CLOUET Vincent. J’ai déposé une plainte auprès de vous qui a été classée « sans suite » par vos services (voir copie de la plainte formulée par Maître Germany et l’arrêt du 10 décembre 2009 de la Cour d’appel de Fort-de-France),
2) Lorsque j’ai tenté de connaître l’identité de mon agresseur, j’ai été une nouvelle fois agressé par l’officier de police CLOUET Vincent (voir la copie du délibéré du Tribunal de Grande Instance de Fort-de-France du 26 janvier 2009).
Sur la seule foi des paroles de Monsieur CLOUET Vincent, j’ai été condamné par la justice pour des motifs d’ « injures, violence en réunion et rébellion sur personne dépositaire de l’autorité publique ». Or, il apparaît très clairement qu’avec l’appel téléphonique du 4 juillet 2009, nous tenons un élément de preuve indiscutable qui montre que l’officier de police CLOUET Vincent, en accusant sa femme Isabelle d’être l’auteur de cet appel, cherche à masquer que c’est lui qui est une nouvelle fois le déclencheur d’une agression à caractère racial. Je vous rappelle que l’appelant a imité des cris de singe et m’a insulté en me traitant d’ « enculé ».
C’est ainsi que je considère que faire venir à la barre du Tribunal de police, le 4 mai 2010, Madame CLOUET Isabelle, puisque c’est de la femme de l’officier de police CLOUET Vincent qu’il s’agit, représente un nouveau cas de déni de justice dont je suis la victime.
Cependant, je vous confirme que je me présenterai bien à l’audience du 4 mai 2010, mais que je conteste déjà la validité de l’enquête qui a été menée dans cette affaire. Elle manifeste de façon évidente la volonté de ne pas sanctionner un officier de police qui s’est maintes fois parjuré, comme vous pouviez déjà le constater à la lecture des procès verbaux rédigés dans les affaires qui m’ont opposé à Monsieur CLOUET Vincent aux mois d’août et octobre 2008 (voir article de Nicolas Lamic, « Lorsque tombe le masque de la justice coloniale »).
Parce que je ne suis pas homme à me résigner face à l’injustice, je prends la liberté d’adresser une copie de ce courrier à un ensemble de personnes, dont la liste figure au bas de cette lettre, et qui, j’espère, seront sensibles à ma volonté de voir enfin triompher la justice. Elles comprendront, peut-être, que je ne peux pas accepter d’être traité de « grand enfant », de « singe », d’ « enculé », d’être frappé et humilié en garde à vue et ensuite condamné par les tribunaux. Je ne partage pas l’attitude fataliste de mon frère, Henri LAMIC, ancien gendarme, qui, après avoir été giflé et traîné au sol, considère qu’il faut, face à l’arbitraire policier, « tourner les talons » au lieu de le dénoncer avec conviction et énergie. Dans ce sens, les éléments de preuve accumulés contre le policier CLOUET Vincent, ainsi que la démarche du parquet, visant à le dégager de toute responsabilité, ne font que rehausser le caractère subjectif des jugements rendus par les tribunaux dans les affaires me concernant. J’estime donc que ces pratiques policières et judiciaires sont discriminatoires et indignes du fonctionnement d’une société démocratique et qu’il faut les condamner. C’est dans cet esprit que j’ai mené deux grèves de la faim aux mois de septembre et décembre 2009. A la veille d’entamer une troisième grève de la faim, je constate que vous n’avez toujours pas pris la mesure du sentiment d’injustice que j’éprouve depuis le début de cette affaire.
Veuillez agréer, Monsieur le Procureur, l’expression de mes salutations distinguées.
Nicolas LAMIC
Commentaires