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« Popa Singer » de René DEPESTRE

Marie-Noëlle RECOQUE DESFONTAINES
« Popa Singer » de René DEPESTRE

En décembre 1957 Richard Denizan, alias René Depestre, rentre en Haïti, après quelques années d’exil contraint. Ce récit, mis en forme de manière romanesque, n’en est pas moins en grande partie autobiographique. Le narrateur raconte les retrouvailles avec sa mère, Popa Singer, une vaillante couturière vodouisante habitée, dit-on, par l’esprit d’un commerçant allemand qui lui insuffle une force surhumaine. Et de la force et du courage il en faut à une époque où Papa Doc instaure un régime dictatorial particulièrement sanglant.

René Depestre a bien connu François Duvalier autrefois quand il était son voisin mais l’homme s’est métamorphosé en tyrannique « chef spirituel à vie de l’état nation ». Il propose au narrateur, qui le refuse, un poste de ministre. Il lui lance une invitation, déclinée, à fréquenter le palais.Les hommes de main du dictateur investissent alors la maison de sa mère qu’ils menacent d’une arme pointée sur sa nuque. Autour de Popa Singer, la famille se réunit, se réconforte, reprend des forces. Certains de ses membres luttent contre le régime car pensent-ils, « les Haïtiens ont besoin que des hommes d’action leur apprennent des formes jamais vues de lutte contre la barbarie». Le 29 juillet 1958, une vaine tentative de renversement de Duvalier a pour conséquence la glorification du dictateur miraculé, la formation d’une milice de tontons macoutes et des massacres effroyables annonciateurs d’un « cauchemar sans fin ».

Depestre nous donne à voir la façon dont Duvalier dresse les Haïtiens les uns contre les autres, ruinant la cohésion des familles, faisant des uns les bourreaux des autres, inoculant dans les esprits épouvante et soumission. L’auteur ne le dit pas mais le lecteur s’autorise à penser qu’un des freins à l’évolution sociale et politique du pays doit résider dans ce venin injecté au fil des générations, un poison pourvoyeur de haine et d’envie de vengeance.

La famille Denizan, quant à elle, finira par se déliter contrainte à l’exil laissant seule la courageuse Popa Singer tandis que le narrateur quittera sa patrie pour toujours. Sa mère lui fera cadeau d’un précieux viatique par le truchement de l’esprit qui l’habite : « Nous t’invitons, dira-t-elle, à prendre aux Haïtiens l’incandescence même de leur tragédie sans fin pour souffler le verre de la tendre parole des poètes. »

Le récit est truculent, les dialogues crus, le tout empreint de fantastique et de merveilleux en accord avec la représentation spirituelle qu’ont les Haïtiens du monde qui les entoure. Le vaudou y tient une grande place et René Depestre y voit -   pour reprendre l’expression initiée par l’écrivain André Breton lors de son séjour en Haïti en 1945 - « une forme de surréalisme populaire ».

        Marie-Noëlle RECOQUE  DESFONTAINES

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