Le Monde a révélé un trafic de diplômes qui aurait lieu depuis plusieurs années à l'université de Toulon voire ailleurs. Ce trafic concernerait les étudiants chinois, qui débourserait parfois quelque 3000 euros pour obtenir leur faux diplôme. Une information judiciaire a été ouverte pour "corruption passive et active, et escroquerie".
Le journal Le Monde a jeté un pavé dans la marre, ce jeudi, en mettant au jour un trafic hors du commun, et qui pourrait bien, selon son ampleur, entacher l’image des universités françaises. Selon le quotidien, des centaines d’étudiants chinois auraient, depuis quatre ans, monnayé leurs diplômes à l'Institut d'administration des entreprises (IAE) de l'université de Toulon. Le prix à payer pour ce gage de « réussite » ? Aux alentours de 2700 euros. Ce qui n’est pas donné, mais pas si cher quand on sait que l’obtention d’un diplôme français est très valorisant (était ?) dans un pays ou l’accès aux études supérieures est réservé à l’élite.
L’affaire a peu à peu « fuité » depuis son commencement. En 2005, un étudiant chinois de l'IAE qui peinait à décrocher sa licence, a joué le tout pour le tout : la corruption. Un subterfuge qui aurait apparemment fonctionné, et déclenché le début d’un sombre trafic. Seulement, les étudiants non-chinois ainsi que les Chinois modestes ayant eu vent de ce manège, n’ont pas tardé à se plaindre auprès de leurs professeurs, voire de la direction. Certains auraient même déposé une main courante au commissariat.
Puis en octobre 2008, une étudiante chinoise « qui devait une grosse somme d'argent à un intermédiaire, a été agressée sur le campus. C'est en enquêtant sur cette affaire que les policiers ont fait le rapprochement avec la main courante », précise Le Monde. C’est ainsi que les soupçons sont remontés aux oreilles des autorités universitaires, administratives et judiciaires. Le secret de polichinelle était percé.
Des professeurs ont confirmé les ouï-dire, s’étonnant par exemple du taux de réussite proche des 100% dans certaines matières, alors même que certains étudiants ne parlent pas français, et n’assistent pas au cours. Un enseignant a déposé plainte, et le parquet de Marseille a ouvert, le 26 mars, une information judiciaire pour "corruption passive et active, et escroquerie".
Sur RTL, la ministre de l’Enseignement supérieur a confirmé ce jeudi avoir « reçu toute une série d'éléments qui [les] ont poussés à lancer une enquête administrative sur le fonctionnement de l'université de Toulon ». « Il s'agit d'abord d'évaluer les responsabilités et de prendre ensuite les sanctions qui s'imposent », a poursuivi Valérie Pécresse. « Délivrer des faux diplômes, cela relève du juge pénal. Il n'est pas question qu'il puisse y avoir en France le moindre soupçon sur la valeur des diplômes », a-t-elle insisté.
Ce trafic pourrait également concerner d’autres universités, notamment celles de Poitiers, La Rochelle, Pau et en région parisienne. Pour l’heure, certains membres du corps enseignants de l’université de Toulon restent choqués. Le Vice Président, Pierre Sanz de Alba, a ainsi avoué ce matin sur France Info avoir « du mal à imaginer qu’un tel trafic ait pu avoir lieu (…) alors que les décisions de jury concernant les diplômes se prennent que de manière collégiale ». « Je ne vois pas du tout comment on pourrait imaginer ça, mais je suis peut-être un trop vieil enseignant pour imaginer de telles méthodes nouvelles », a-t-il conclu, résigné.