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Pandémie et crise politique et sociale

Raphaël Constant
Pandémie et crise politique et sociale

  Si on comprend bien le discours ambiant, nous sommes en pleine « catastrophe sanitaire » et cela serait de notre faute. Nous serions rétifs à la vaccination et notre « culture », sinon tout simplement le vaudou, expliquerait cela.

  Pour parfaire le tableau, voilà même l’armée française qui débarque pour nous sauver !

  Faire peur et culpabiliser, voilà donc ce qu’on veut nous présenter comme de l’information mais qui est en fait de la propagande.

  Discours culpabilisant qui marche car on entend ou on lit, y compris d’hommes et de femmes habituellement conscients des enjeux sociétaux, que tout cela est bien de notre faute. Décidément, l’aliénation se glisse partout.

  Quelle faute, quel crime aurions-nous commis de plus que tous les autres peuples de la terre à devoir subir une nouvelle vague épidémique ?

  A croire que ce pays Martinique est dirigé par les Martiniquais et qu’ils ont mal géré la crise sanitaire ?

  De qui se moque-t-on ?

  Rappelons l’évidence : Préfecture, Ars, Chum sont dirigés par de hauts fonctionnaires français de passage (n’ayant de compte à rendre qu’à Paris) et même nos chers « zélus loco », version Chaben ou Sergio, n’ont pas un mot à dire sur les décisionS prises ou à prendre sur les questions sanitaires.

  Marie Jeanne voulait que Cazelles « co-décide » avec lui. Notre gouverneur l’a envoyé sur les roses. Letchimy écrit pour faire des « observations », preuve d’un immense courage pour la galerie. Il faut dire que le préfet et Lecornu ont dit qu’ils étaient prêts à une « adaptation » du « pass sanitaire » et même une « solution martiniquaise ».

  Quelle solution, quelle Martinique alors que tout est déjà décidé ?

  Nous cumulons les choix erratiques (souvenez vous de l’histoire des masques, de l’échec des tests, de l’absence de confinement en janvier) d’un pouvoir central français avec une gestion anarchique, autoritaire et unilatérale menée par un préfet qui a inventé un nouveau système métrique ananassien !

 Le résultat est la « catastrophe » actuelle et pas du tout l’irresponsabilité et l’amour des Martiniquais pour le rhum, le vaudou ou le farniente ! A titre de simple exemple, il est effarant que l’ARS ait pensé sept mois après le début de la vaccination (en juillet 2021!) à lancer une enquête (en ligne !!!) pour comprendre la réticence des martiniquais à la vaccination.

  Il n’existe pas de « culture martiniquaise » anti-médecine, anti-vaccin. Le prétendre est une insulte. En revanche, il est vrai qu’entendre un Cazelle, un Viguier ou autres hauts fonctionnaires français avec arrogance, prétention, mépris nous dire d’aller se faire vacciner ne peut que pousser à la méfiance le martiniquais Lambda.

  Voici les représentants d’un état qui, consciemment ou au moins par abstention, a menti (et continue de mentir) aux martiniquais sur l’empoisonnement aux pesticides qui pensent avoir une quelconque crédibilité pour demander aux gens d’aller se faire vacciner.

  La gageure !

  D'autant que le monde scientifique et médical qui truste les médias ont plus donné l’impression d’être les « béni oui-oui » d’un pouvoir aux abois que des rationalistes prenant en compte la réalité et le caractère aléatoire de la science expérimentale. On a quand même eu en Martinique un chef de service qui a, pendant des semaines, prétendu que le port du masque n’était pas protecteur !! Et à chaque fois que la Préfecture prend une décision, on le revoit revenir tenir un discours au gout du pouvoir.

  Dans un tel contexte, il y a lieu à douter sans avoir besoin d’être complotiste.

 Je me suis vacciné au mois de mai dernier car j’ai considéré que dans la balance risques/avantages, ces derniers prenaient le dessus. J’ai discuté avec des proches des amis de cette question. J’en ai convaincu certains mais pas tous. Je ne prétends pas détenir la vérité.

 Il y a objectivement de quoi douter de vaccins élaborés en quatre fois moins de temps qu’habituellement, achetés des milliards d’euros au bénéfice de quelques multinationales richissimes, dont on ignore aujourd’hui le temps des effets sinon les conséquences sur la santé.

  La situation est telle qu’aujourd’hui, dans plusieurs pays, il existe une piolémique à savoir s’il faut en passer par une troisième dose. Israël avait « trouvé », selon les médias occidentaux, le miracle en vaccinant au maximum. Là aussi, nous avons une nouvelle vague et le pouvoir sioniste réfléchit à une nouvelle campagne.

  Les dernières études n’excluent pas que les personnes vaccinées peuvent encore transmettre le virus et eux-mêmes être (gravement) malades. Certes dans des proportions moindres que pour les non-vaccinés avec une réelle marge. Présenter en l’état des connaissances médicales et scientifiques, la vaccination comme la solution est mensonger.

  Il me parait raisonnable de se faire vacciner comme je pense qu’il est tout aussi raisonnable de respecter des gestes barrière et le port du masque !!! Mais l’idée de vouloir imposer la vaccination va à l’encontre non seulement des libertés mais de l’objectif à atteindre. Même l’OMS ne cesse de dire que pour la vaccination, il faut convaincre et non contraindre.

  Or, ici, la décision de l’ARS de ne s’interroger qu’en juillet 2021 sur la question de la supposée réticence des martiniquais vis-à-vis de la vaccination illustre l’absence d’effort pour expliquer les avantages (réels mais relatifs) de se faire inoculer deux doses vaccinales. On peut comprendre les réticences à la vaccination quitte à les combattre mais tout autant le combat contre la vaccination obligatoire.

  Le gouvernement français (avec un large soutien des forces politiques) pose une problématique qui est viciée. La liberté aurait un prix et il n’y aurait pas de liberté à valoir si celle-ci met en danger les autres. L’obligation de se vacciner (qui est une atteinte à la liberté) serait justifier car elle permettrait de protéger la santé et donc la liberté des autres. Autrement dit cette atteinte à la liberté se justifie car elle serait proportionnée à un objectif d’intérêt général.

  Là ou le bât blesse dans ce raisonnement officiel, c’est sur deux points. D’une part, en l’état des connaissances scientifiques (voir ci-dessous) la vaccination n’est pas du tout « l’arme absolue » contre la pandémie. Dans la meilleure hypothèse, elle en est une parmi d’autres. Donc la violation de la liberté de ne pas se vacciner n’a pas comme conséquence ipso facto de protéger un intérêt général. D’autre part, l’atteinte à une liberté peut se justifier (provisoirement) si elle permet à d’autres d’être assurées. Lesquelles ?

  Surtout quand on veut imposer un tel ordre à des soignants !

  Et même qu’on va permettre à un patron de suspendre le contrat de travail d’un salarié ou même le licencier car il refuserait de se vacciner ! La même question se pose mais en pire pour le « pass sanitaire ». Il est quand même utile de contextualiser cette problématique. Outre, masques, distance et autres gestes barrières, politique systématique de dépistage, la politique internationale a consisté pour l’essentiel à combattre la pandémie en limitant la circulation du virus. Et pour limiter la circulation du virus, il faut limiter la circulation des porteurs. D’où les politiques de confinement. Elle a été drastiquement mise en place dans des divers pays.

  Ce fut le cas en France pour la première vague, à la mi 2020. Par la suite, Emmanuel Macron a fait le choix d’un « confinement soft » limitant la circulation du virus mais maintenant une grande partie de l’activité économique. Mieux en janvier 2021, il a purement et simplement décidé de ne pas confiner en disant qu’il fallait vivre avec le virus pour devoir trois mois après faire marche arrière avec un nouveau « confinement soft ».

  Les mots ont un sens et le pouvoir en perd son français. Appeler notre situation actuelle de « confinement » est tout à fait absurde. Tous les commerces sont ouverts sauf les restaurants et les salles de sport. Donc 90% des salariés sont obligés d’aller travailler et la vie fonctionne normalement. Il n’y a une petite baisse de la circulation du virus alors que dans le même temps on nous parle de catastrophe sanitaire !

  On règne dans l’illogisme complet.

  Il est clair que l’objectif du gouvernement français (en France ou en Martinique) n’est pas de faire disparaitre ou mettre à l’étiage le virus par un confinement strict mais bien d’assurer un maintien de l’activité économique. Avec un tel choix, vaccin ou pas, la disparition du virus n’est pas programmée. Il disparaitra car toutes les épidémies finissent d’elle-même.

  Si on prend cela en compte, on comprend l’idée du « pass sanitaire ». Certes, limiter la circulation des personnes mais avant tout assurer l’activité économique. L’enjeu est d’un coté combattre le virus pour qu’il disparaisse, de l’autre s’adapter pour que l’économie continue à fonctionner et permettre d’accumuler des bénéfices.

  Ce « pass sanitaire » n’assure la défense d’aucune liberté mais en prive beaucoup. Pire, il ne peut que diviser, entre les vaccinés et les non vaccinés, entre les malades et les biens portants, entre ceux qui peuvent et ceux qui ne peuvent pas, etc…. En plus, cela va créer une société de contrôle permanent où on demande à des personnes privées de vérifier les « pass sanitaires » et donc les identités, l’état de santé de tel ou tel car il est client !

  La grande juriste française Delmas Marty écrivait en mars dernier qu’en l’état la pandémie a permis surtout de porter atteinte aux libertés publiques et qu’on allait vers une « surveillance digne d’un régime totalitaire ». Elle a bien raison. Il y a vraiment lieu d’être inquiet de la facilité et la rapidité avec laquelle la classe politique française a remis en cause du jour au lendemain des principes élémentaires de libertés publiques, ceci au nom d’une lutte contre la pandémie. D’autant qu’il est évident qu’il en restera des traces pour l’avenir, au même titre que le régime de l’urgence sanitaire ne cesse d’être prolongée.

  Constatons aussi qu’en Martinique, cette pandémie a exacerbée des tensions et une violence sociale et politique. On peut, comme la plupart des forces politiques, le condamner, le déplorer mais force est de constater cette réalité. L’opposition frontale d’une partie de la population aux mesures autoritaires et antidémocratiques prises par un préfet est normale. Il n’y a aucun consensus social ou politique sur les causes de la crise y compris sanitaire et aussi des solutions à mettre en œuvre.

  Le développement d’une violence sociale n’est pas nouvelle mais il fait peu de doute que dans le contexte politique actuel (la faible participation aux élections territoriales, l’incompétences des « élus » sur les sujets le plus importants, le mépris et l’arrogance des hauts fonctionnaires français, la marginalisation de pans entiers de la société, etc…), la violence policière (le tabassage de militants ou de simple passants sans aucune suite) et la répression judiciaire (rafles, multiples gardes à vue, procès à répétition, fichage de militants etc…) mises en place depuis fin 2019 contre les « militants antichlordécone », il serait vain de croire que les réactions violentes ne vont pas croître.

  Conconne, Letchimy, Laguerre, Nilor pourront continuer à condamner la violence et pleurer sur les « victimes » par voie de communiqués, cela ne va rien changer à la réalité des choses.

  Le procureur Gaudeul (qu’on croyait parti à Nantes) est monté au créneau pour dénoncer l’usage d’armes à feu par des manifestants dans la nuit de samedi 31 juillet. En fait, ce n’est pas malheureusement pas la première fois que cela se produit. C’est le signe d’un niveau qu’une nouvelle étape dans la dégradation et que nous sommes bien rentrés dans un cycle important de violences en Martinique. Il reste que sortir cette violence sociale et politique de son contexte, la condamner, l’instrumentaliser, ne va rien résoudre à la crise que nous connaissons en Martinique. Au contraire. Nier cette réalité, continuer sur la voie de la répression (qui elle aussi augmente et se banalise) et de la violence (qui elle serait légale et légitime ?) contre les manifestants ne feront qu’amplifier la réaction populaire.

  A une crise qui est avant tout politique, il faut une réponse politique.

  Raphaël CONSTANT

  Avocat et Militant.

Commentaires

yvleo | 04/08/2021 - 11:46 :
OUF ! J'avais cru lire Raphaël Confiant au début de l'article. Sans faire attention au style, je suis allé d'une stupéfaction grandissante jusqu'à la dernière ligne où je vis alors le patronyme d'un autre Raphaël. Oui, OUF !
Frédéric C. | 04/08/2021 - 13:50 :
Yvleo...M'enfin! justement, c'est pas du tout le même style d'écriture, çà frappe au 1er coup d'oeil.

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